Hommage à ... - 16.03.2011

Ahmed Hamza

Sa fine silhouette, son élégance raffinée et sa superbe voix nous manqueront. Ahmed Hamza qui s’est éteint, mardi, à Ennasr (Tunis), à 80 ans (né le 14 décembre 1930), laisse le souvenir impérissable d’une grande figure de la chanson tunisienne contemporaine et un riche patrimoine musical. Top Star au Maghreb ainsi qu’auprès de la communauté nord-africaine en Europe, il a su conquérir son public par des paroles simples et vibrantes, un rythme puisé dans le patrimoine et une invite à la fête.

Né en plein cœur de la médina de Sfax, son enfance a été marquée par les confréries de chants liturgiques, conduites par les cheikhs Mohamed Boudeya et Haj M’hammed Barkia, entre Sidi Saada et autres mausolées. Impressionné par leurs chants, il les suivait dans leurs sorties hebdomadaires, traversant les rue du Bey et de la grande mosquée, jusqu’à Beb Jebli, pour partir en banlieue, étendard déployés et encens allumés. La musique égyptienne étant en vogue, les cafés rivalisaient d’ingéniosité pour faire venir les derniers disques et les faire tourner à plein tube, créant ainsi une superbe ambiance pour retenir leurs clients. C’est dans cette ambiance qu’il a contracté la passion de la musique et du chant, dans une ville en effervescence culturelle et politique du dernier quart d’heure pour l’indépendance. Fréquentant le Café Al Jemiaa, rue du Bey, il sera rapidement adopté par les musiciens qui l’encourageaient à participer à leurs soirées lors de fêtes et mariages. Et ce fut le coup d’envoi de toute une saga.

A l’indépendance, Ahmed Hamza monte à Tunis et fréquente le milieu artistique, à la recherche d’une place parmi les stars montantes de l’époque : Ali Riahi, Naama, Oulaya, Youssef Temimi, et autres voix. Mais, sa véritable révélation musicale, il la fera à partir de Sfax où Abdelaziz Achiche le fera revenir. Créant la première radio régionale, le 8 décembre 1961, il lui demandera de constituer la troupe musicale et de la diriger. Dans l’ancienne bâtisse des PTT, en face du kiosque à musique, sur l’avenue Bourguiba, transformée en siège de la station naissante, Abdelaziz Achiche avait eu l’intelligence d’aménager un café maure culturel qui est rapidement, le lieu de rencontre de tous les artistes, journalistes, hommes de lettres et amateurs d’arts. Il sera d’ailleurs le noyau du comité culturel et des différents clubs de théâtre, de cinéma, de peinture, de belles lettres et de musique qui feront émerger les Nouri Bouzid, Mohamed Dammak, Moncef Dhouib, Adel Megdiche, Moncef Mezghanni et autres stars, sans parler de la troupe théâtrale dirigée par Jamil Joudi et regroupant Ayed Souissi, Touhami Nahali, Haddad Bouallègue, etc.

Ahmed Hamza était sous le charme total d’une ambiance culturelle fort inspiratrice : il lui suffisait de trouver de bonnes paroles, de les mettre en musique et d’y mettre la troupe musicale, premier orchestre professionnel disponible à plein temps. Les répétitions se faisaient dans les modestes locaux de Radio Sfax et l’enregistrement au théâtre municipal, le tout à un rythme soutenu. Pour les paroles, la perle rare a été trouvée en Ahmed Salem Belguith. Tarbouche rouge sur la tête, costumes bien coupés et une grande finesse d’esprit, cet instituteur amateur de belles lettres avait le verbe facile et la rime collée à l’esprit. A l’origine, il devait présenter des émissions enfantines e d’autres pour les zones rurales, mais le voilà embarqué pour écrire des chansons.

Pour l’y inciter, Abdelaziz Achiche avait trouvé la bonne méthode : un bureau éloigné du vacarme était mis à sa disposition, avec des boissons rafraîchissantes à volonté, alors qu’Ahmed Hamza se tenait pas loin des lieux, prêt à relire avec lui ses rimes, les fredonner, lui proposer quelques chansons, avant de partir de son côté les mettre en musique. Ce qui était génial, c’est que tout se faisait très vite et en 24 heures, parfois, la chanson, enregistrée, diffusée, devient un tube sur toutes les lèvres. Chaque mois, le grand concert donné au théâtre municipal deviendra un immense succès renouvelé. Le tout-Sfax s’y prépare et en savoure les nouveautés.
Toute sa carrière durant, Ahmed Hamza sera nostalgique de cette époque. Il collectionnera les succès à l’Olympia et sur d’autres prestigieuses scènes de par le monde, mais il gardera  toujours vivace le souvenir d’une véritable frénésie créatrice.

Le reste est connu. Ahmed Hamza re-montera à Tunis, à la rencontre d’un public plus large et plus nombreux. Les tubes se succèderont, surtout avec la reprise de vieilles chansons du patrimoine, telles que «Jary Ya Hammouda». Invité partout, particulièrement en Algérie, au Maroc, et en Europe, il portera la chanson tunisienne dans les cœurs. Jusqu’au dernier soupir, Ahmed Hamza gardera ce grand raffinement, cette élégance et un talent inégalé.

Une grande voix nous quitte, son œuvre nous réconfortera.


 
 

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3 Commentaires
Les Commentaires
Lassaad - 18-03-2011 21:10

Quand il s'agit de chanson ancienne, on ne peut pas créer une chanson parce qu'on manque de références, et voilà une ... n'est plus

haddad - 31-03-2011 06:59

toute la communauté juive tunisienne est très peinée par le décès de ce grand chanteur que nous avons maintes fois cotoyé dans nos fêtes, homme de tolérance, gentil, courtois, il va vraiment laisser un grand vide. paix à son âme et toutes nos condoléances à sa famille et aux tunisiens que nous aimons tout particulièrement.

bellaiche - 31-03-2011 07:29

Tous les juifs regretteront ce grand chanteur et amique j'ai con nu tout petit dans nos mariages et autres . Il est de la même trempe que NAAMA, OULAYA, ALI RIAHI? HEIDI JOUINI, MOHAMED AHMED et j'en oublie. Mais par contre, je suis déçu quand je viens en vacances à TUNIS et que dans je déclin e mon identité, on me répond tu es juif, donc tu es israelien, j'ai beau leur dire que je suis né à TUNIS et que je suis juif, mais ils ont du mal à comprendre car leurs parents et familles ont fait une grande impasse sur les juifs de TUNIS, comme si nous n'avions jamais existé. C'est dommage, car nous, la TUNISIE, nous l'aimons toujours et restera dans nos coeurs comme une grande tache indélibile dans le bon sens bien sûr

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