News - 06.08.2019

Caïd Essebsi: la première fois où j'ai vu Bourguiba

Caïd Essebsi: la première fois où j'ai vu Bourguiba

Paru en 2009, chez Sud Editions, le livre autobiographique « Bourguiba, le bon grain et l’ivraie » de Béji Caïd Essebsi, est un témoignage de premier ordre qui nous renseigne autant sur l’auteur que sur la période qui a précédé l’indépendance et ses acteurs, notamment Bourguiba. Un personnage central par l’ampleur de sa contribution autant à l’indépendance du pays qu’à l’édification d l’Etat moderne. Nous vous en proposons ci-après des bonnes feuilles.

Bourguiba chez Moncef Bey à Hammam Lif

A l’époque, Bourguiba était attendu à Tunis après sa libération du Fort Vancia à Lyon par les Allemands et son passage par l’Italie. L’avion qui le ramenait de Rome avait fait un atterrissage forcé à Menzel Temime le 8 avril 1943. Il se rend aussitôt à Hammam-Lif pour rencontrer Moncef Bey. Puis il y revient quelque temps plus tard auprès de son ami Dr Sadok Boussofara. Je l’apercevais en ville où il apparaissait en toute simplicité, dans sa jebba, entouré de quelques notables ou devisant avec le petit peuple: je n’osais pas l’approcher, encore moins lui parler. C’est seulement au cours de mes études à Paris que j’ai eu l’occasion de le voir de près et de le connaître.

Un camarade d’école, un ami de toujours

J'avais pour camarade d’études son fils Habib Junior qui avait été, comme moi, élève à l’annexe du Collège Sadiki. Sa mère, Mathilde, connaissait ma mère et, quand elle accompagnait le jeune Habib à Sadiki, elle me repérait toujours dans la foule des élèves et exerçait sur moi une autorité affectueuse.

Etudiant à Paris, j’étais membre de la cellule destourienne et membre du comité de l’AEMNA, mais je n’avais pas de contact particulier avec les hauts dirigeants du Parti. Je participais aux débats et m’engageais seulement quand j’étais personnellement convaincu de la décision, mais je n’endossais guère les ordres qui tombaient de haut, surtout quand ils ne me semblaient pas motivés. Habib Jr était évidemment identifié dans le milieu des étudiants de Paris comme le fils de son père. Pour moi, il était un ami et j’appréciais particulièrement son caractère indépendant, comme moi-même. Nous habitions deux quartiers différents, mais nous étions liés; nous poursuivions les mêmes études à la Faculté de droit et nous partagions tout. Sans bourses d’études, nous partagions notamment les livres que nous achetions en commun. Je lui dois mon succès en dernière année de licence car, ayant trop dépensé mon temps dans les activités militantes, j’avais résolu cette année de sauter la session de juin et de reporter l’examen à la session de septembre. En mai, à quelques semaines de l’échéance, Habib Jr m’a forcé à m’y mettre; il m’a prêté les notes et les cours et, en définitive, je lui dois ce succès libératoire qui m’a permis de regagner Tunis dès le 15 juillet 1952.

Tout au long de ces années, nous avions des discussions intenses sur les dirigeants du Néo-Destour et, pour ma part, je ne dissimulais guère ma déception en estimant que certains étaient loin de répondre aux exigences du moment. Habib Jr soutenait que son père était différent. «Pourquoi le serait-il ?», lui disais-je, incrédule.

Taïeb Mehiri, mon aîné, voisin de quartier, la star de l’Espérance et mon mentor à Paris

En fait, mon mentor à Paris était Taïeb Mehiri. Il était mon aîné déjà à Sadiki et nous habitions ensemble la même rue à Tunis dans le quartier Bab al Aqwas. Il jouissait en outre d’une aura particulière du fait qu’il jouait ailier dans l’équipe de football de l’Espérance, très populaire dans le quartier de Bab Souika. Ayant lui aussi perdu son père très jeune, il avait été pris en charge par son grand-père, un honorable négociant en huile d’origine jerbienne. Pour ma part, je le saluais avec respect et lui-même me prenait en sympathie, il se montrait attentif à mes études et à mon action militante. Le leader Salah Ben Youssef se rendait occasionnellement à Paris et ne manquait pas de s’adresser à notre cellule ; normalement, j’aurais dû me rapprocher de lui, comme il était marié à la sœur de Fathi Zouhir, un parent proche. Mais Salah Ben Youssef me paraissait cassant et autoritaire, ce qui m’irritait. Mohamed Masmoudi était un militant actif avec qui nous discutions vivement mais sans lien de sympathie. Je me sentais plus proche de Taïeb Mehiri. A Paris, où il m’avait précédé, Mehiri me témoignait sa confiance et me confiait parfois des responsabilités dans l’action estudiantine.   

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