News - 11.12.2014

Journée internationale des droits de l'homme 2014: Israel assassine un ministre résistant palestinien

A l’occasion de la Journée Mondiale des Droits de l’Homme, mercredi 10 décembre 2014, Ziad Abou Ein, ministre palestinien en charge de la lutte contre la colonisation et contre le Mur de l’apartheid – illégal pour la Cour Internationale de la Haye -  manifestait pacifiquement avec 150 personnes et des militants de l’ONG israélienne des droits de l’homme Yesh Din. Ils protestaient contre la légalisation de la colonie Adei Ad, proche des villages de al-Mughayer et Turmusiya dans le gouvernorat de Ramallah, légalisation que les Palestiniens et Yesh Din contestaient devant la Cour Suprême israélienne. Les manifestants voulaient atteindre, pour y planter des oliviers, un terrain confisqué aux paysans palestiniens. Des soldats et des garde-frontières les en empêchèrent utilisant des gaz lacrymogènes et des grenades assourdissantes  contre «ces émeutiers» - à en croire les autorités - alors qu’ils brandissaient des rameaux d’olivier et voulaient tenir une conférence de presse. Reut Mor, militant de Yesh Din  affirme, qu’au départ de Turmusiya, l’atmosphère était plutôt festive et «nul ne pensait que la journée finirait de cette manière» (The New York Times, 10 décembre 2014).

Brutalement frappé à la poitrine et traîné sans ménagement par le cou par un élément casqué de la police des frontières alors qu’il était au premier rang de la manifestation, Ziad Abou Ein, âgé de 55 ans, devait presque aussitôt mourir. La soldatesque sioniste avait connaissance pourtant de la qualité d’Abou Ein.

Peu avant cette altercation mortelle avec les forces sionistes, il déclarait aux journalistes présents: «Cette armée est criminelle. Elle commet des crimes contre notre terre. Nous ne leur avons pas lancé une seule pierre et ils nous agressent».

Un résistant palestinien

Abou Ein est un membre  du Conseil de la Révolution du Fatah bien connu dans les médias - notamment israéliens. C’est un ancien prisonnier politique qui a connu, des années durant, les geôles israéliennes. Il avait auparavant servi comme vice-ministre en charge des affaires des prisonniers de l’Autorité Palestinienne. Sa première arrestation a eu lieu alors qu’il n’avait que 18 ans en 1977. En 1979, il posa une bombe qui tua un adolescent israélien à Tiberias, au nord d’Israël. Extradé des Etats Unis en 1981, Israël le condamna à la prison à vie mais il fut libéré en 1985 dans le cadre d’un échange de prisonniers. Ce qui n’empêcha pas les sionistes de lui imposer par la suite une longue détention administrative sans le traduire en justice.

Pour Mahmoud Abbas, ce meurtre «de sang froid, en plein jour» est «un acte barbare» que l’Autorité Palestinienne marque par un deuil de trois jours. Le négociateur en chef palestinien Saeb Erakat déclare: «Notre frère Ziad a été assassiné alors qu’il célébrait la Journée Internationale des droits de l’Homme en plantant des oliviers, symbole à la fois de paix et de justice. Nous avons là un exemple des résultats de la culture de l’impunité octroyée à Israël par la communauté internationale ; ce qui lui permet de commettre des crimes à l’encontre du peuple palestinien. Nous avons là un autre exemple des actions vicieuses et arrogantes commises contre notre peuple». Pour Erakat, l’entière responsabilité du meurtre du ministre est imputable au gouvernement israélien «plein de colons et d’extrémistes» et le responsable palestinien de demander à la communauté internationale de «protéger» son peuple. De son côté, Jamal Zahalka, membre du Parlement israélien et président du parti Balad, a condamné l’armée sioniste pour son utilisation de moyens dangereux pour disperser les manifestants pacifiques. Le Hamas a présenté des condoléances et demandé «l’unité de toutes les forces palestiniennes pour faire face aux violations commises par l’occupation israélienne».

L’ONU, l’Union Européenne et les Etats Unis demandent une enquête rapide et transparente sur cet assassinat.
Benyamin Netanyahou, essayant d’échapper à ses responsabilités dans la chasse aux Palestiniens, a envoyé ses condoléances à Ramallah «en recommandant le calme aux Palestiniens». Menaces à peine voilées.

La signification d’un meurtre

Le meurtre d’Abou Ein met en lumière les moyens tordus et hypocrites qu’ Israël met en œuvre pour déposséder les Palestiniens de leurs terres. Chaim Levinson a démonté cette énorme escroquerie dans un éclairant article du quotidien israélien Haaretz (9 décembre 2014). Au cours des dernières années, l’Administration Civile des Territoires occupés (c’est-à-dire l’armée israélienne) a procédé aux relevés topographiques de près de 3,5 millions de m2 de terres palestiniennes destinées à servir comme «champs de tir et d’exercices» dans un premier temps. Ensuite, elles seront cédées aux nombreuses organisations sionistes financées par les dons de l’étranger pour établir des colonies. A la suite des accords d’Oslo, l’armée israélienne a cessé d’utiliser certains de ces camps de tir mais elle continue à empêcher les Palestiniens d’y pénétrer et démolit toute construction éventuelle. Levinson écrit : «D’après la loi ottomane en usage en Cisjordanie, une terre cultivée pendant dix ans devient propriété de celui qui la travaille. Cependant, la terre qui n’est pas travaillée, par exemple celle dont le propriétaire ne peut y avoir accès  parce qu’elle a été expropriée par l’armée israélienne, peut être déclarée terre de l’Etat. 99% de ces terres en Cisjordanie ont été attribuées aux colons». «Propriété de l’Etat, affirme Dror Etkes qui a étudié de près ces relevés de l’armée, n’est rien d’autre qu’une fiction destinée à empêcher les Palestiniens d’utiliser ces terres» et de conclure : «ces champs de tir ne sont rien d’autre que des banques de terres qu’Israël administre en vue du développement des colonies. Ils n’ont donc rien à faire avec les exercices militaires ou la préparation opérationnelle».

En cela, le gouvernement d’extrémistes au pouvoir en Israël reste bien en phase avec les promoteurs du sionisme qui avaient, à l’époque, cherché les conseils des colons français en Algérie en vue de les appliquer en  Palestine.

Le regretté Ziad Abou Ein a été tué comme le recommandent   les  visées sionistes sur la terre de Palestine, le jour où le monde célébrait les droits de l’homme. Aujourd’hui,  tout comme en 2012, quand  Justine Asher Grunis, juge à la Cour Suprême israélienne déclarait que ces droits « ne sont pas une prescription au suicide national ». (Voir « Human rights equated with national suicide», Al Jazeera English, 12 janvier 2012).

L’Etat-nation juif  que veut établir le gouvernement d’ultras de Netanyahou ne saurait s’embarrasser de considérations relatives aux droits de l’homme. D’autant que les élections israéliennes sont prévues pour le 31 décembre.
Que vaut la vie d’un Palestinien - fut-il ministre - face à une nouvelle mandature pour le Likoud?

Mohamed Larbi Bouguerrra

Tags : Mahmoud Abbas  
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