News - 05.08.2012

J'ai lu pour vous le rapport du FMI

La presse  a reproduit succinctement  les paragraphes qui lui ont paru utiles dans le dernier rapport du FMI. Le Chef du Gouvernement a brandi un rapport en arabe à la face du journaliste et  qui pourrait constituer en fait  une mouture de ses services. Ce qui m’a le plus choqué, c’est la flèche dirigée à l’encontre de l’ancien Gouverneur de la Banque Centrale.

Pour remettre les pendules à l’heure je me suis dit que rien ne vaut, par respect de l’intelligence de nos concitoyens, de leur livrer ce que le FMI  a effectivement écrit.
 
« Conformément aux dispositions de l'article IV de ses Statuts, le FMI procède, habituellement chaque année, à des consultations bilatérales avec ses membres. Une mission des services du FMI se rend dans le pays, recueille des données économiques et financières, et s'entretient avec les responsables nationaux de l'évolution et des politiques économiques du pays. 
 
De retour au siège, les membres de la mission rédigent un rapport qui sert de cadre aux délibérations du Conseil d'administration. À l'issue de ces délibérations, le Directeur général, en qualité de Président du Conseil d'administration, résume les opinions des administrateurs, et ce résumé est communiqué aux autorités du pays »
 
Sur la base de la Note d’information au public (NIP) n° 12/96 le 3 août 2012 faisant suite à la mission du FMI ,au titre de l’article IV, et qui a pris fin le  25 juillet 2012, voici ce que le Conseil d’administration du Fonds monétaire international (FMI) a notamment écrit . 
 
Informations générales
 
«La Tunisie a connu une grave récession en 2011 accompagnée de troubles intérieurs et dans la région. Le PIB s’est contracté de 1,8 % en termes réels, en raison d’une forte baisse du tourisme et des investissements directs étrangers. En conséquence du repli économique et du retour des travailleurs tunisiens qui étaient en Libye, le chômage a fortement augmenté pour atteindre 19 % en 2011, le chômage des jeunes se situant à 42 %. La position extérieure de la Tunisie s’est affaiblie, le déficit du compte courant se creusant nettement, à 7,3 % du PIB en 2011, et les réserves officielles diminuant, de 9,5 milliards de dollars EU fin 2010 à 7,5 milliards de dollars EU à fin 2011.
 
Après une décélération à 3,5 % en 2011, l’inflation a augmenté pour atteindre 5,7 % en avril 2012 (en glissement annuel) .
 
Les autorités ont suivi une politique expansionniste pour répondre aux revendications sociales et soutenir l’économie. 
 
Dans un contexte de hausse des dépenses budgétaires courantes en raison de l’augmentation de la masse salariale, de l’augmentation des subventions aux produits alimentaires et énergétiques et de nouvelles mesures sociales ainsi que de l’accroissement des dépenses d’investissement, et nonobstant une hausse marquée des recettes, le déficit budgétaire global est passé de 1,1% en 2010 à 3,5 % du PIB en 2011.
 
En conséquence, le ratio d’endettement public, après une baisse pendant la dernière décennie à 40 % du PIB en 2010, est remonté à 44,5 % du PIB fin 2011. 
 
La politique monétaire a soutenu le crédit bancaire, en injectant d’importantes liquidités et en abaissant le taux d’intérêt directeur.
 
La contraction de l’activité économique, particulièrement dans le secteur du tourisme, a affecté la qualité du portefeuille des banques. Face à cette situation, la banque centrale a assoupli ses exigences réglementaires. 
Elle a autorisé les banques à rééchelonner les prêts accordés aux entreprises touchées par la récession et a injecté d’importantes liquidités dans le système bancaire pour aider les banques dans un environnement de baisse de la performance des actifs.
 
En conséquence, la plupart des banques sont devenues très dépendantes du refinancement de la banque centrale.
 
Des signes d’un rebond de l’activité économique sont apparus au début de 2012 : au premier trimestre, le PIB a crû en termes réels de 4,8 % (d’une année sur l’autre) et le tourisme et les investissements directs étrangers sont en hausse.
 
Une reprise de la croissance du PIB en termes réels serait aussi soutenue par une importante expansion budgétaire. 
 
Toutefois, les risques à court terme sont élevés et plutôt orientés négativement, dont une récession plus grave que prévu en Europe qui pèserait lourdement sur les exportations, une augmentation des tensions sociales dans le pays qui découragent les investissements domestiques et étrangers, des contraintes de capacités et des retards dans les financements qui risqueraient de freiner la relance budgétaire envisagée pour soutenir la croissance. 
 
Le potentiel de croissance économique de la Tunisie à moyen terme reste favorable, mais pour libérer ce potentiel, il est nécessaire d’adopter un programme de réformes structurelles pour promouvoir les investissements privés.
 
La réalisation d’une croissance plus forte et plus inclusive à moyen terme est nécessaire pour diminuer le chômage élevé, particulièrement parmi les jeunes, et pour réduire les disparités sociales et régionales. 
La croissance en termes réels devrait progressivement atteindre 6 % en 2017 dans un scénario de référence prenant pour hypothèse la poursuite de la stabilité macroéconomique, l’amélioration de la gouvernance et du climat des affaires, des réformes du marché du travail et du système éducatif afin de remédier aux asymétries en termes de formation professionnelle, et le renforcement du secteur financier.
 
Pour obtenir une croissance plus forte, il faut aussi mobiliser d’importants financements extérieurs, sous forme notamment d’investissements directs étrangers et d’emprunts par le gouvernement et les entreprises.
 
Évaluation par le Conseil d’administration
 
-Les administrateurs notent qu'après sa transition politique, la Tunisie aura des défis économiques et sociaux urgents à relever, notamment un taux de chômage élevé et des disparités régionales.
 
-Les administrateurs soulignent la nécessité de jeter les bases de la transformation de l'économie et de la promotion d'une croissance plus solide et plus solidaire.
 
-Compte tenu des risques auxquels se heurte la reprise économique à cause de l’instabilité de la situation économique et de la faiblesse de l'environnement mondial, les administrateurs estiment qu'il convient d'appuyer l'activité économique, tout en sauvegardant la stabilité macroéconomique.
 
-Les administrateurs estiment que la politique budgétaire pourrait appuyer la croissance et l'emploi à court terme. 
 
-Globalement, ils considèrent que l'expansion ciblée prévue des investissements publics — s'accompagnant d'une maîtrise des dépenses courantes — est appropriée.
 
 -À cet égard, ils saluent les efforts déployés par les autorités pour rationaliser la passation des marchés publics et améliorer l'exécution des programmes d’investissements.
 
-Les administrateurs soulignent que le rééquilibrage des finances publiques devrait reprendre à moyen terme afin de préserver la viabilité du budget et de la dette et mettent en exergue la nécessité d'un plan clair de rééquilibrage.
 
- Ils se déclarent favorables aux réformes fiscales prévues en vue de renforcer les recettes et de rendre le système fiscal plus équitable et favorable à la croissance.
 
-Ils insistent aussi sur la nécessité de maîtriser les dépenses publiques à moyen terme, notamment la masse salariale, et de réformer le système de subventions et des pensions.
-Les administrateurs sont favorables au resserrement de la politique monétaire pour contenir l'inflation et se félicitent que la banque centrale soit prête à relever le taux directeur si les pressions inflationnistes subsistent.
 
-Ils soulignent l'importance du renforcement du cadre institutionnel pour la politique monétaire, de même que de la coordination des politiques monétaire et de change.
 
-Les administrateurs signalent qu’une souplesse accrue du taux de change pourrait contribuer à préserver les réserves de change. 
 
-Ils soulignent la nécessité d'assurer l'indépendance de la banque centrale dans la conduite des politiques monétaire et de change, de même que pour la supervision bancaire.
 
-Les administrateurs encouragent les autorités à remédier aux vulnérabilités du secteur bancaire identifiées dans l’ESSF. 
 
-Ils rappellent qu'il est nécessaire de s'attaquer aux questions des prêts non productifs et de la recapitalisation bancaire, et d'améliorer la gouvernance des banques publiques.
 
 -Ils rappellent aussi l'importance d'aligner la supervision bancaire sur les normes internationales.
 
- Les administrateurs encouragent la banque centrale à élaborer une stratégie de sortie pour retirer progressivement son important soutien à la liquidité des banques, tout en continuant à satisfaire leurs besoins de liquidités.
 
-Les administrateurs considèrent que des réformes structurelles exhaustives sont requises pour réorienter l'économie tunisienne et exploiter son potentiel pour réaliser une croissance plus élevée et plus inclusive.
 
-Eu égard à la nécessité de réduire le chômage, la réforme du marché du travail et du système d'éducation sera cruciale. 
 
-Il sera aussi important d'améliorer le climat des affaires et la gouvernance pour accroître les investissements dans le secteur privé.
 
-Le développement de secteurs à haute valeur ajoutée contribuera à absorber la main-d’œuvre qualifiée.
 
-Les administrateurs mettent en exergue la nécessité de hiérarchiser les réformes, tout en améliorant la capacité de mise en œuvre. »
 
La lecture de ce rapport  me conforte dans l’idée que l’ancien gouverneur de la BCT et le Ministre des Finances avaient raison et ont accompli leur mission correctement.
 
C’est aussi un message pour le nouveau Gouverneur pour sauvegarder l’Indépendance de la Banque Centrale, s’il veut mériter notre respect et surtout notre estime.
 
Mokhtar el khlifi
 
- L’italique qui n’émane pas du FMI est destiné à faciliter une lecture rapide
 
 
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7 Commentaires
Les Commentaires
Mhamed Hassine Fantar - 05-08-2012 20:11

Cette analyse, malgré l'effort louable de son auteur, reste quelque peu absconse pour les profanes. Mais on voit très nettement les conditions requises pour que notre économie prenne son envol vers la voie du progrès durable. le danger, tout le danger résiderait dans une politique de captatio bene volontiae tant à l'égard de ceux qui gouvernent avec des préoccupations électorales qu'à l'égard du peuple auquel il faut expliquer les cause de la récession et les conditions nécessaires du développement fiable et durable loin de toutes les séductions trompeuses e de toutes les fausses promesses.Pour réussir, ceux qui le pouvoir doivent tout expliquer et dire toute la vérité rien que la vérité.Il suffirait d'un leurre ou d'une manoeuvre malhonnête pour que le peuple retire sa confiance. Or, la bonne gouvernance requièrt la confiance de la Nation tout entière. A tous les citoyens, hommes et femmes, de prendre conscience des nécessités de l'heure et d'agir en leur âme et conscience pour la liberté et la dignité de tous et de toutes. Voilà pourquoi nous devons travailler davantage et éviter à notre pays tout ce qui risque de gêner sa marche vers le bien-être de toutes et de tous quels qu'ils soient et où qu'ils soient.

Angel - 06-08-2012 00:33

Dans un contexte de hausse des dépenses budgétaires courantes en raison de l’augmentation de la masse salariale, de l’augmentation des subventions aux produits alimentaires et énergétiques et de nouvelles mesures sociales ainsi que de l’accroissement des dépenses d’investissement, et nonobstant une hausse marquée des recettes, le déficit budgétaire global est passé de 1,1% en 2010 à 3,5 % du PIB en 2011. C'est ce paragraphe qui a le plus retenu mon attention sur ce rapport que j'avais lu dans le texte il y a 3 jours! Rien de nouveau sous le ciel du FMI, toujours les mêmes recommandations, -comprimer la masse salariale publique - revoir à la baisse les pensions et subventions - augmenter la pression fiscale .... Ce qui est intéressant ce sont les chiffres plus réels qu'ils donnent: 19% de chômage dont 42% chez les jeunes, contraction de 1,8% du PIB, 2milliard de réduction de la réserve, de 7,3% du PIB et une inflation à 5,7%... Le FIM glisse en silence sur la phrase clé "nonobstant une hausse marquée des recettes," dont on n'entend plus un mot dans tout le reste du post!!! (origine?, montant? distribution budgétaire?) Avez vous des données à ajouter ? Pourquoi justement ce gouvernement prend t-il précisément la posture inverse?

khaled kefi - 06-08-2012 01:45

Il me semble que le contenu de ce rapport est une description technique objective et optimiste de la réalité sociale, économique et politique depuis la révolution. Il est évident que la croissance économique est tributaire de plusieurs facteurs parmis lesquels et par ordre d'importance la consommation indissociablement lié au pouvoir d'achat,les investissements dependent du climat sociale et de la stabilité politique, la balance commerciale qui necessite une bonne activité industrielle à haute valeure ajoutée. Le malheureux constat est que la plus part, pour ne pas dire tous les acteurs de la vie économique ont contribués, chacun de son coté à la recession sans aucune pitié de la nation pour laquelle une partie du peuple s'etait soulvé. Manifs, greves, sit-in, ont bloqués la machine de la production et dissuadés les investisseurs sappant au passage le deuxieme pilier d'une économie déja affaibli par la fuite des capitaux, étaient l'aspect general de la première periode sous le gouvernement de Mr Beji CE, comme si cela ne suffisait pas la periode électorale avait permis l'injection mortelle de plusieurs centaines de millions de dinars pour les financement illicite des élections, principale cause de l'accroissement de l'inflation. Tout le monde s'attendait à un apaisement de la situation éconmique et sociale aprés les élections y compris les touristes et les partenaires économiques, en vain les produit alimentaires de bases ont atteints des records historiqes aux benifices des "petits bourgeois" comme disait Marx, écrasant au passage le pouvoir d'achat premier pilier de la croissance, enfin pour achever la bete nous voila dans un caffouyage politique cacophonique dirrigé par un pseudo gouvernement obsedé par le pouvoir et laissant le champ libre au massacre programmé de la république, n'ayant dans la ligne de mire que les élections et manifestement armé de dogmes macabres. Madame Chrisyine Lagarde, pour un pays sans pétrole je trouve votre rapport trop optimiste.

Lina - 06-08-2012 07:06

Cher Ami, Vous n'avez pas lu le rapport original ( Article IV) qui fait 55 pages et dont la presse a traduit quelques extrait. Je doute fort que vous l'avez. C'est un rapport extrèmement favorable à la politique de relance du gouvenement tunsien et critique quant à la Banque centrale pour la formulation de la politique monétaire et les réformes bancaires. Il va même jusqu'à demander que le gouvernement poursuive sa politique expansionniste et que la BCT change sa politique en politique restrictive!!!!! Je vous conseille d'essayez d'avoir le rapport complet et non la déclaration du conseil

Mohamed Mabrouk - 06-08-2012 07:34

Le FMI ce n'est pas du Coran. Il y a donne parfois des bons conseils et parfois des conseils moins bons, en tout cas par rapport à l'intérêt de la Tunisie. Ce qui se dégage nettement du rapport, c'est le rôle stratégique de la BCT dans le redressement économique du pays. En particulier, le rapport souligne l'importance de la coordination entre les différentes formes de la politique conjoncturelle: monétaire, budgétaire et de change. Ces choses sont connues, surtout en situation de crise. Autrement dit: un pays doit bien coordonner ces 3 aspects de la politique conjoncturelle afin de se dégager de la crise, créer de l'emploi et rétablir les équilibres. En réalité, ces 3 politiques ont aussi un effet durable, structurel, sur la répartition des revenus, la dette extérieure, la dépendance financière, la politique des régions... La politique de change, que le rapport conseille discrètement d'activer (et il y a là un revirement à 180° pour le FMI), peut avoir des effets particulièrement dévastateurs en terme d'aggravation des disparités de revenu si elle n'est pas assortie de précautions. Voilà pour le coté "bons conseils". Le mauvais conseil, c'est l'indépendance de la BCT du gouvernement de la Tunisie. Comment voulez-vous que tout ces enjeux: disparités de revenu, emploi, équilibres macro, dépendance financière, épargne, croissance, politique des régions...soient indépendants du gouvernement? A quoi ça sert alors de voter un gouvernement? des députés? à palabrer sur la liberté de la femme? L'insistance de la finance mondiale depuis le début de la révolution Tunisienne sur l'indépendance de la BCT du gouvernement Tunisien ne signifie pas autre chose que: "Laissez-nous les décisions économiques et occupez-vous d'autre chose". Autre chose comme écrire des lois qu'on ne pourra pas appliquer puisqu'on aura cédé les commandes de notre économie. Je précise que ce que je critique, c'est l'idée d'indépendance de la BCT du gouvernement, et non l'indépendance de la BCT des intérêts partisans, chose évidemment souhaitable. Cette démission, c'est exactement ce qu'a fait le régime précédent: il a simplement cédé les commandes économiques à la finance mondiale. On en subit aujourd'hui les conséquences. En effet, la finance mondiale est une machine bien huilée où différents intérêts s'affrontent, des privés, des Etats... Elle ne peut prendre en charge nos problèmes, surtout s'il n'existe pas de voix Tunisienne qui exprime ces problèmes. Je crois qu'aucun Tunisien ne voudrait poursuivre dans cette voie. C'est pour cela qu'il faudrait qu'il existe dans ce débat une voix qui se charge de défendre raisonnablement l'intérêt de la Tunisie, sans tomber dans la démagogie et dans le militantisme idéologique. Par la profondeur de sa réflexion, notre élite économique devrait contribuer à créer cette voix, plutôt que d'adopter tout le "package" FMI sans prendre de précaution.

tounesnalbaya - 06-08-2012 10:56

Cri d'alarme, les investisseurs n'ont plus confiance en ce gouvernement, la ressession est à nos portes.

khlifi - 07-08-2012 00:38

Chére LINA:Je ne pense que le FMI publie à la même date deux versions différentes d'une même consultation à propos de la Tunisie.Je ne peux pas l'admettre.Donnez-nous, si possible, les références de cette "version originale de 55 pages" que vous dites avoir lue.Sur le site du IMF, je n'ai rien trouvé.

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