News - 13.01.2018

Traite des êtres humains - Lorena Lando : La nouvelle loi tunisienne a rendu la dignité aux victimes

Lorena Lando: La nouvelle loi tunisienne a rendula dignité aux victimes

Présente en Tunisie depuis 2004, l’Organisation internationale des migrations (OIM) contribue à gérer les problèmes liés à la migration et à fournir l’aide nécessaire aux migrants les plus vulnérables en situation de détresse. L’OIM lutte contre la traite des personnes depuis près de 25 ans et a pu assister de par le monde plus de 70 000 victimes de la traite, en se fixant pour objectifs de prévenir la traite, protéger les victimes et leur assurer le retour volontaire et une réintégration positive et reconstructrice dans leur pays d’origine. Chef de la mission de l’OIM en Tunisie, Lorena Lando apporte à Leaders un éclairage instructif.

Quand avez-vous commencé à travailler sur la traite en Tunisie ?

La traite est un phénomène mondial d’une grande ampleur. Son caractère clandestin rend difficile l’estimation difficile, mais des millions de personnes sont victimes de la traite chaque année. La Tunisie, de par sa localisation et de par la spécificité géopolitique qu’ont connue la région sud-méditerranéenne et le Moyen-Orient, ne pouvait échapper à ce fléau. Afin de déterminer son ampleur et mieux lutter contre la traite et l’esclavage moderne, l’OIM a entamé en 2012 une étude exploratoire qui a permis de révéler l’ampleur du phénomène de la traite des personnes en Tunisie, ses caractéristiques, les différents groupes concernés et les facteurs qui la favorisent. On a pu ainsi confirmer que la traite est interne et transnationale. Les victimes sont exploitées dans la servitude domestique, le travail forcé dans l’agriculture, la construction ou la restauration, mais aussi la mendicité et la prostitution forcée. 

Sur la base des résultats de cette enquête, l’OIM a apporté son aide et son assistance technique en organisant un comité de pilotage pour œuvrer à l’élaboration d’un projet de loi contre la traite conformément au Protocole de Palerme ratifié par la Tunisie en 2003. Cette loi organique relative à la prévention et à la lutte contre la traite des personnes (loi n°61-2016) a vu le jour en août 2016, et une instance nationale de lutte contre la traite des personnes a été mise en place en février 2017. C’est l’engagement de tout l’Etat tunisien pour lutter contre ce crime selon les 4 P : prévenir, protéger, poursuivre les criminels et développer les partenariats pour mieux lutter contre ce crime.

Quel est le rôle de l’OIM aujourd’hui pour aider à lutter contre la traite des personnes en Tunisie, et particulièrement dans la traite transnationale?

L’OIM continue à apporter son assistance technique et met à disposition de la Tunisie tous les moyens logistiques, les réseaux de partenaires pour renforcer les capacités de l’Etat tunisien dans la lutte contre la traite. L’organisation poursuit son projet Share II, intitulé «Renforcer les capacités nationales pour mettre en œuvre la loi de lutte contre la traite des personnes en Tunisie». Dans ce cadre, l’OIM travaille en étroite collaboration avec le gouvernement tunisien pour soutenir la Tunisie en matière d’élaboration de politiques publiques contre la traite des personnes, faciliter la mise en application de la loi n°61-2016. L’OIM œuvre également à renforcer les capacités des autorités tunisiennes par des cycles de formation des magistrats, juges et agents de sécurité nationale. L’OIM coopère également avec l’Instance nationale de lutte contre la traite des personnes, les ONG et les associations qui œuvrent au profit des victimes, pour garantir les services et l’aide aux victimes.

Par ailleurs, l’OIM continue à accueillir et fournir une aide directe aux victimes de traite, en assurant l’accueil (numéro vert 80 10 15 66), l’assistance sociale, médicale et psychologique, dans le respect de la dignité et de la confidentialité. L’OIM assure par ailleurs une aide financière et juridique ainsi que l’aide au retour volontaire et à la réintégration dans les pays d’origine des victimes.

Comment évaluez-vous la situation de la Tunisie aujourd’hui en matière de lutte contre la traite?

La Tunisie a déployé beaucoup d’efforts dans ce domaine. La loi 2016-61 et la mise en place de l’instance en sont le meilleur exemple. Elle a d’ailleurs vu ses efforts récompensés puisqu’elle a atteint le Niveau Tier 2 dans le classement mondial des pays en matière de lutte contre la traite des personnes, selon le Rapport 2017 sur la traite des personnes du Département d’Etat des Etats-Unis d’Amérique, Bureau de lutte et de contrôle de la traite des personnes (J/TiP) en juin 2017. Les progrès réalisés par la Tunisie n’occultent pas les défis qui lui restent à relever pour combattre ce crime. La loi de prévention et de lutte contre la traite des personnes doit être mise en application et l’Instance nationale de lutte contre la traite des personnes doit avoir accès à tous les moyens (structures logistiques, locaux, financement…) pour engager l’élaboration des politiques publiques de lutte contre ce crime et les mécanismes de protection des victimes tunisiennes ou étrangères.

Lorena Lando: Chef de la mission de l’Organisation internationale des migrations à Tunis.

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