Hommage à ... - 08.04.2009

Dr Anouar Achich: un homme de coeur au service de l'humanité souffrante

Anouar"L’incarnation de l’homme de coeur soucieux de ses malades autant que de ceux qui étaient dans la détresse, un ardent tunisien qui  alliait une grande délicatesse, l’esprit moderne de la jeune Tunisie et la sagesse foncière de l’ancienne tradition". Le docteur Mohamed Anouar Achich, décédé il y a un an, à l'âge de 56 ans, est tout entier dans ce vibrant hommage de son vieil ami, Michel Cerato.

Il avait effectué ses études de médecine en France, à la faculté de médecine de Reims où il avait obtenu, en 1981, sa qualification de pédopsychiatre et exerça à l'un des CHU de la ville où il assurait les fonctions d’interne en psychiatrie, notamment, dans le service de pédopsychiatrie. Très tôt, il avait montré un grand intérêt pour la façon dont était organisée la pratique de la pédopsychiatrie en France. il était intéressé par l’aspect pluridisciplinaire de cette spécialité et par la qualité des échanges à l’intérieur des membres d’une même équipe soignante. Surtout, il s’était montré très sensible au développement de l’approche psychopathologique d’orientation dynamique dont il appréciait l’éclairage qu’elle apporte à la compréhension de la vie psychique de l’enfant et aux échanges qu’elle permet à l’intérieur des équipes soignantes.

Parallèlement, il avait su, comme interne, s’impliquer largement dans la vie de l’institution et apporter à celle-ci sa contribution personnelle dans l’écoute des besoins des enfants et de leur famille et dans l’échange avec les soignants de l’équipe.                                                                                         

" Pourquoi un tel besoin de faire des choses ingrates?"

Un de ses collègues de Reims, le Dr Michel Dugnat  qui avait bien connu le Dr Achich témoigne: "je me souviens du partage d’énergie déployée à convaincre encore  et toujours, de l’importance de faire une vraie place aux enfants autistes, aux enfants abandonnés… Je me souviens des attentions que tu portais aux collègues algériens dans les périodes noires  de leur histoire récente quand tu les accueillais pour partager avec eux l’expérience que tu avais contribué à accumuler en Tunisie...Je me souviens de ton ouverture au vieux juif rescapé du ghetto, professeur et directeur de recherche à l’INSERM à qui tu donnais ton attention et qui te donnais son expérience de soins…Je me souviens de ces interrogations, de cette question: pourquoi passer tant de temps déployé à essayer de faire naître des façons plus dignes et plus respectueuses de regarder, d’entourer, d’accompagner, de soutenir, de soigner, de prendre soin de tous les plus abandonnés…Pourquoi un tel besoin de faire des chose ingrates, peu reconnues ? pourquoi une telle ténacité à approfondir ce lien entre le soin aux autistes, aux polyhandicapés, aux enfants abandonnés, avec la culture, la culture de profondeur, la culture de ton pays, que tu connaissais si bien et que tu nous faisais partager. »

anouarAprès sa  formation pédopsychiatrique en France, Anouar Achich avait souhaité retrouver son pays et sa chère ville de  Sfax. Il y exercera jusqu'à sa disparition.

Un extraordinaire dynamisme créateur:

Dans la pratique de cette discipline, il fera la preuve de l’excellence de ses connaissances professionnelles, de la chaleur de sa relation humaine et surtout d’un extraordinaire dynamisme créateur : ainsi, il fonda et dirigea en 1993, le service de psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent du CHU de Sfax, avant de choisir la libre pratique. Mais, surtout, attentif aux enfants les plus déshérités du Sud tunisien, notamment à ceux atteints le plus lourdement, les enfants polyhandicapés et les enfants abandonnés. Il fut amené, ainsi, à s'investir dans la vie associative en  créant et en  animant diverses institutions et associations souvent radicalement innovantes avec un talent rare :

  • l’Association Ibnou Sina, spécialisée dans l’autisme, la psychose infantile et les handicaps psychiques profonds ouvrit, en 1989, le premier hôpital  de jour pour enfants autistes et psychotiques de Tunisie avant de créer la première ferme thérapeutique pour adolescents en 1995 et le premier CMPP ;
  • l’Association El Mouroua, spécialisé dans la prise en charge des enfants polyhandicapés, développa des services à domicile et un accueil en journée dans des locaux adaptés (1998);
  • l’Association Errafik pour les enfants abandonnés (1992) fut la seconde association gestionnaire d’une pouponnière en Tunisie…

Anouar Achich était un homme ouvert sur le monde. Il avait, notamment, souhaité développer des liens d’amitié et de coopération avec la France. C’est dans cette perspective qu’il contribua à fonder l’Association d’Amitié Tunisie-France

Mais il était aussi imprégné de sa propre culture et cherchait souvent à la faire partager à ses amis. Dans cet esprit, il s’était impliqué largement dans l’organisation du Festival International de Sfax. C’est dans cet esprit aussi qu’il participait à la revue Sud Nord (folies et cultures), aux éditions ERES.

Nous savons aussi à quel point, son action de transmission de ses réflexions sur la santé mentale et le développement de l’enfant à partir des dictons de la sagesse populaire en langue arabe à la radio était créative.

Ses confrères français et   tunisiens; ses patients enfants et adultes pour lesquels il était plus qu'un médecin, un frère et un père attentionné; toute l'humanité souffrante   qui appréciait en lui son  attachement à ce qu'il considérait, plus qu'un métier, un véritable sacerdoce, son extrême sensibilité à toutes les misères du monde auront à cœur de lui rendre hommage le samedi 11 avril, à partir de 14h30, au Syphax.

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3 Commentaires
Les Commentaires
Samir AYADI - 09-04-2009 19:54

Le gentleman de la psychiatrie tunisienne nous a quitté A l’année de sa naissance un poète Français disait : Quand les Hommes vivront d’amour Il n’y aura plus de misère Et commenceront les beaux jours Mais nous serons morts, mon frère… Mohammad Anwar a juré de faire de la lutte contre la misère une carrière Il a opté pour la psychiatrie Il a lutté contre la maladie Contre l’handicap et la folie Contre le mal et la douleur Par le médical et le social Par l’art et la psychothérapie Par les médias et la culture Par le savoir et l’amour Au prix cher, très cher Le veuvage et l’orphelinat La mort, sa mort Et la notre…dans l’âme ! Pour lui, Il n'y a pas de fin, il n'y a pas de début, juste un amour infini de la vie, il a tout donné et il est parti Mais il a donné un nom au souvenir ; il l'a appelé espérance et de l’espérance renaît l'espoir l’espoir de voir un sourire réapparaître sur les lèvres d’un patient, de l’amour resurgir dans un foyer, un remède guérir un mal…

TRIGUI - 10-04-2009 21:44

Bon article et excellent hommage au Dr Achich

tarek yangui - 17-09-2009 16:47

La Tunisie est et restera fière de cet Grand Homme.

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