News - 10.11.2011

Quand la femme et les salafistes s'invitent dans une réunion d'Ennahdha sur le tourisme tunisien

Une réunion pour rien ? Oui, si l’on pensait que cette initiative prise par Ennahdha pour débattre des problèmes du tourisme, jeudi du côté des berges du lac allait faire avancer le débat sur ce secteur. Or, ce qui a été dit sur les maux du tourisme tunisien nous a laissé une impression de déjà entendu.

Une déclaration liminaire de Hamadi Jébali aux accents de discours de politique générale qu’on prononce généralement lors d’une investiture et les débats démarrent. Le surendettement des hôteliers, le manque de diversification du produit touristique, la dégradation de la qualité du service, la dépendance vis-à-vis des TO étrangers, l'open sky. Des problèmes qui perdurent au point qu’on se désespère d’y trouver un jour une solution, ou même un début de solution. Par contre, ce qui est nouveau, c’est le ton des débats. Fini le bel ordonnancement des réunions d’antan, avec leurs tabous, leur langue de bois et leur unanimisme. Désormais, on n’hésite pas à interpeller les responsables, sur un ton comminatoire, à la limite de l’irrespect, dans une joyeuse anarchie. Un intervenant, en retard d'une guerre, croit bon de remercier le Secrétaire général d’Ennahdha pour… sa ponctualité. Mouvements divers dans la salle. Des cris fusent : « pas de flagornerie (yezzi mitbendir) ». Tout penaud, il rend le micro et se rasseoit . Un jeune se saisit du micro pour parler de ses problèmes. On le lui «arrache» gentiment. « Y a-t-il une alternative aux marchés traditionnels ? », s’interroge un autre intervenant, « par exemple, les marchés du Golfe ». La salle désapprouve et le fait savoir par des sifflets. Un hôtelier a une idée lumineuse : La Tunisie a été chrétienne pendant quatre siècles et abrité une forte communauté juive. Il propose entre autres que les édifices chrétiens et juifs du pays soient restaurés pour "promouvoir le tourisme religieux". H. Jébali opine.

Mais la grande, la belle surprise de cette réunion est ailleurs : la femme et les salafistes se sont invités dans les débats. A priori, on peut se demander, ce que viennent faire ces deux sujets dans une réunion sur le tourisme. En fait, nous sommes au cœur du problème. Car les agressions contre les femmes non voilées dans la rue et les enseignantes dans les facultés, les affaires du Nikab à l’université, les files d’attente séparées, la cacophonie autour du code du statut personnel, les dernières déclarations de  Souad Abderrrahim, membre du bureau politique d’Ennahdha sur les mères célibataires, tout cela a, de l'avis de nombreux professionnels du tourisme, écorné sérieusement l’image d’une Tunisie tolérante et respectueuse des droits humains à l’étranger et provoqué l’inquiétude non seulement des Tunisiens, mais aussi des étrangers qui y sont extrêmement sensibles, d’autant plus que la presse a amplifié ces évènements.

Malgré toutes ses lacunes, notre tourisme  a maintenu plus ou moins ses parts de marché sur les principaux pays émetteurs et notamment la France, parce que la Tunisie a su rester fidèle à l’héritage de Bourguiba en matière de droits de la femme, se démarquant nettement des autres pays de la région. A cause de ces agissements, confirme un TO Juif tunisien basé à Paris «la Tunisie souffre d'un déficit d'image auquel il faudra très vite remédier», révélant que certains de ses clients qui avaient réservé depuis l'été pour le réveillon de fin d'année ont annulé leurs réservations».  S’adressant à Hamadi Jebali, une jeune directrice d’agence de voyage lui demande une position claire sur ces sujets. Cette intervention a le mérite de délier les langues.  Un de ses confrères ne s’explique pas l’attitude du leader d’Ennahdha : « Comment ose t-il demander que ces salafistes soient reconnus en tant que parti ?». Une autre dame abonde dans le même sens « Ghannouchi a dit que vous ne toucherez pas aux droits de la femme, est-ce que vous confirmez ? Réponse de Jebali : « M. Ghannouchi a exprimé exactement le point de vue de notre parti. Ennahdha est fille de ce peuple. Elle n’est pas venue de nulle part. Nous allons renforcer ces droits ». Applaudissements timides dans la salle. Elle attendait certainement davantage pour se rassurer.

Une réunion pour rien ? Certainement pas. Elle a permis au moins au parti majoritaire de prendre le mesure de la détresse des femmes tunisiennes aujourd'hui, mais aussi de leur combativité et de leur volonté de défendre mordicus leurs acquis. Même si les problèmes du tourisme nécessitent d'autres réunions, des idées pertinentes et surtout beaucoup d'investissements.

H. Behi

 





 


 

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12 Commentaires
Les Commentaires
Taieb ourari - 10-11-2011 21:31

Les maux du tourisme ne date pas du 14/01;les professionnels ont crié fort leur doléances,il importe aujourd'hui de les écouter.De par son poids dans le PIB,les rentrées de devise et l'emploi le tourisme doit être dopé.Loin de tout amalgame!

SUR - 10-11-2011 23:18

Je voyage énormément à travers le monde,dirigeant une firme internationale de Conseils, implantée dans 37 pays.J'ai séjourné dans un nombre considérable d’hôtels et j'ai pu apprécier certains, trouver à redire sur d'autres.Cependant, j'ai chaque fois mis en comparaison l’hôtellerie tunisienne avec ce que je constatais à travers le monde et là, j'ai dû faire un constat un peu amère. Le tourisme tunisien a des côtés positifs( gentillesse du personnel en général sympathique), spontanéité d'accueil, cadre naturel exceptionnel);par contre il y a de gros points d'amélioration qui sont nécessaires: la maladresse de ce personnel, due essentiellement à un manque évident de formation,le manque d'authenticité de certains employés qui ne pensent qu'aux pourboires car il sont tout simplement très mal payés, la qualité médiocre des cuisiniers et de la cuisine d’hôtels 5 étoiles(les meilleurs cuisiniers tunisiens travaillant pour la plupart à l'étranger car ils y sont incomparablement bien mieux rémunérés).Donc mon conseil est que nos hôteliers s'inspirent de Dubaï où l'on trouve une qualité exceptionnel d’hôtellerie et de restauration.Ce qu'il faut faire est simple: importer au début, comme Dubaï l'a fait, des dirigeants d’hôtels et du management intermédiaire de grande qualité en attendant de bien mieux former les Tunisiens aux meilleures pratiques, avoir encore plus un souci obsessionnel du détail et de la satisfaction du client,faire revenir au pays de grands Chefs en les rémunérant vraiment bien.Tout ceci demande du courage et de l'audace, mais ce sont des investissements qui paieront à terme, sinon la Tunisie restera une destination orientée principalement vers le tourisme de masse et à faible valeur ajoutée.

Aziz Fadhli - 11-11-2011 09:13

si el hédi .. tout dabort Mme Abderrahim n'est pas membre du bureau politique d'Ennahdha .. secondo, le tourisme est un secteur économique qu'on a pas choisi de cette façon, mais on l'accepte pour génerer de l'emploi et un revenu pour le pays et non pour imposer un mode de vie et/ou une nature de société ..

Ben taher - 11-11-2011 11:31

L'origine des insuffisance de l’hôtelerie tunisienne est en grande partie inhérente à la nature des hôtelier eux mêmes qui n'ont pas de véritable formation professionnelle spécifique. Ces personnes se sont trouvées, par opportunisme, à la tête de structures hôtelières parfois gigantesques uniquement du fait de leur proximité avec les anciens régimes politiques dont on connait actuellement leurs critères dans le choix des personnes à promouvoir. D'ailleurs la faiblesse de ces personnes continue à s’exhiber par leur luxe ostentatoire malgré la crise que vit le secteur touristique, crise que payent uniquement les employés du secteur hôteliers .

nocturne - 11-11-2011 12:34

Pour que vive le tourisme, l'économie tunisienne et faire connaitre le positif de ce pays, il est nécessaire de garder l'image de ce laïsisme modéré; et de réfléchir au devenir de toutes ces zones touristiques. 1°/ Réfléchir à un tourisme solidaire. 2°/ Revoir le potentiel économique de cette activité en incluant les désirs des demandeurs. 3°/ Accentuer l'image ; la propreté, les produits locaux et inclure la population dans la "vitrine" Tunisienne.

Touhami Garnaoui - 11-11-2011 13:09

Un point de détail d'abord. Jebali dit que Ennahdha est fille de ce peuple. Je le conteste. Elle a peut-être les pieds en Tunisie, mais la tête et les comptes bancaires viennent d'ailleurs. Ce qui suffirait à appeler le peuple civilisé tunisien à la résistance par tous les moyens pacifiques. Ce qui est plus grave, c'est que à l'occasion d'un mode démocratique, des élections, pour choisir, non pas des élus politiques du peuple, mais les membres d'une Assemblée constituante, forte de sa majorité relative, AU SEIN DE CETTE ASSEMBLEE, Ennahdha prétend avoir le droit de gouverner le pays. C'est une injure du bon sens et un parjure. Peut-être avec le consentement d'institutions, le Président de la République, le Chef du gouvernement, le président de la Haute instance, les partis, toutes constitutionnellement illégitimes, la Tunisie n'ayant pas de constitution, et les responsables de ces institutions, tous étrangers à la révolution. C'est pourquoi la Tunisie vit actuellement dans un état de totale anarchie, d'illégittimité, de cauchemar, dont les seuls bénéficiaires sont les ennemis du peuple tunisiens aussi bien à l'intérieur qu'à l'étranger qui trahissent chaque jour l'espoir de dix millions de tunisiens de vivre une vie digne et civilisée.

Mhamed Hassine Fantar - 11-11-2011 16:06

Cette réunion a été très utile. De telles confrontations éveillent et désabusent. Ce sont des échanges qui, malgré leur incohérence, conscientisent et dissuadent en cas de sournoiserie. Cela dit, le tourisme souffre d'une très vieille maladie aux causes multiples:incompétences en matière de gestion visible et là et que pourrait-on attendre de ceux qui pratiquent ce noble métier en maitriser les arcanes.Pour le tourisme, il y aura beaucoup à faire, s'il y a une vrai volonté de faire. Quel tourisme sans la connaissance du patrimoine national dans sa globalité: le matériel et le non matériel. Que peut-on en dire en quelques mots?!

BEN HASSINE -( Paris ) - 11-11-2011 20:27

Avant parler de futur lointain ,il convient pur le tourisme de retrouver ses parts de marché de 2010 . Or en France il semble que le le crédit sympathie de la Tunisie a été freiné net avec les élections Je vis en France depuis 42 ans j'écoute et j'observe autour de moi , rares les Français qui ne projetaient pas d'aller en Tunisie . Aujourd'hui la destination Tunisie n'intéresse plus le Français moyen il y a matière à s'inquiéter

lotfi - 12-11-2011 00:20

Il n'y a pas que les français qui hésitent à aller en Tunisie pour les vacances .Moi je suis tunisien et j'hésite à y emmener mes filles .Le gouvernement ne me fait pas peur mais les islamistes sont maintenant "lachés" et je n'ai pas confaince .C'est dommage je voulais meme acheter un appartement mais là franchement ....

chase edward - 12-11-2011 08:05

le vrai probleme des hotelier est connu depuis fort longtemps , il n'y a jamais eu un metier d'hotelier en TUNISIE les hotelier (en majorité) sont tous issue d'autress secteur d'activité souvent bien distant du secteur , et pour bénéficier de certains encouragement que l'état avait octroyé au secteur ( ils ont surgonflé les couts de contruction et de ravitaillement , pour s'offrir une mecedes SL 600 V12 pour cetains à plus de 450 000 DT alors que leur compte etait en rouge de trois millions et demi de dinars) et ce durant toute l'année resultat , on retrouve de nuitée au prix d'un mois de loyer pour on logement hors secteur hotelier et bien sure on ne pass plus devant la concurrence espagnole et marocaine bien que leurs pratiques ne different pas tellement de celles de tunisiens BREF LE MAL EST STRUCTUREL et les hotel sont des mort nes des le depart , SOLUTION se retourner contre les promoteurs hoteliers qui cachent leur fortune et reprendre la gestion des hotels et les donner aux nouveaux diplomés chomeurs qui sont capable de manger des pierres pour certains ( et les encadre et unifier leur efforts en termes de communications vers l'etranger et developper des substituts au marchés conventionnels ET CE D'URGENCE

Musulmane de France - 12-11-2011 11:01

Les touristes des pays occidentaux cherchent en premier lieu de l'exotisme, des beaux hôtels et un minimum de sécurité dans le pays qu'ils visitent. Ils ne veulent pas d'un pays qui observent absolument les mêmes idées occidentales, qui cherche a tout prix a leur rassembler. Au contraire, je crois que plus le pays visite s'éloigne de leur propre code plus il attire: c le fameux dépaysement. Cela revient a dire qu'il n'y a pas besoin de ressembler aux occidentaux pour qu'ils apprécient notre pays. Je suis sur que si l Iran ouvrait ses portes au tourisme ils iraient en masse.

jebbari clement - 12-11-2011 12:19

ATTENTION AUX REPONSES QUI N'EN SONT PAS!!! bien évidemment qu'à la question "allez vous respecter le droit des femmes " la réponse sera TOUJOURS oui ! c'est valable pour un parti démocrate comme pour toute dictature et état répressif . Le Pen affirme respecter les étrangers (et le pense peut être !!) la vrai question est donc : QUE SIGNIFIE CONCRETEMENT POUR VOUS les dropits de la femmes.

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