News - 22.09.2017

Participation tunisienne aux16° Championnats mondiaux d’athlétisme de Londres 2017 !!!

Participation tunisienne aux16° Championnats mondiaux d’athlétisme de  Londres 2017 !!!

Le 13 août dernier, le rideau est tombé sur les Jeux des 16°Championnats mondiaux d’athlétisme de Londres avec un immense bonheur pour les héros et une certaine amertume pour les malchanceux. Le monde entier, oubliant problèmes, difficultés, guerres et attentats, morts et blessés, a vécu, grâce au petit écran, près de deux semaines durant, le rassemblement de la jeunesse mondiale venue s’affronter, pacifiquement, dans des compétitions sportives lors de cet évènement international tant attendu et tant apprécié. Nous avons pu, de loin, assister et applaudir les champions qui se sont illustrés pour l’éternité, en améliorant certains records et en remportant la plus prestigieuse, la plus célèbre et la plus convoitée des médailles, celle de Champion du monde, celle de l’Or. Ces championnats n’étaient dominés que par les capacités physiques et intellectuelles de l’espèce humaine. Ces jeunes, oubliant leur origine et leur niveau social, étaient venus dans le but d’inscrire leurs noms sur les tablettes des diverses disciplines de l’athlétisme, ce sport qui s’exprime et se manifeste par le courage, par la volonté, par la patience, par la force physique, par la résistance, par l’audace, et par le don de soi à l’extrême. Et grâce à la magie de la télévision, nous avons vécu et admiré les performances des uns et des autres, celle de l’élite sportive mondiale, venue des quatre coins du monde et représentée par la jeunesse de près de deux cents pays appartenant aux sept continents et dont les moyens matériels, les coutumes et la culture sont différents ainsi que leurs potentialités et leurs techniques. Ne rassemblaient ces jeunes que l’esprit sportif, le goût du sport, l’envie de performances et le désir de remporter le maximum de médailles pour lever haut les couleurs de leur pays, faire retentir leur hymne national et le faire entendre à toute la planète et inscrire leurs noms au Panthéon universel du sport.

La Tunisie y a participé avec trois ou quatre athlètes qui ont été éliminés dès le premier tour. Comment expliquer ces résultats ?

Notre pays est de tradition sportive ancienne. Aussi, faut-il rappeler que, quelques années, seulement, après l’indépendance, nous étions un membre très actif au sein du Conseil International des Sports Militaires et avons même, dominé, les courses de fond des 5000 et 10000 mètres, durant de nombreuses années. De même, nous avons remporté notre première médaille olympique, d’argent pour les 10.000 mètres, lors des jeux olympiques de Tokyo, en 1964 et celle de l’or, d’abord à Tunis lors des Jeux Méditerranéens de Tunis, ensuite, celle de l’or olympique, à Mexico, en 1968 pour les 5000 mètres grâce à notre grand et inoubliable champion Mohamed Gammoudi. Nous avions eu, aussi, de grands noms dans le cross et Khammassi et Ayachi ont été parmi ces champions. Comment se fait-il que cette source a tari, ces dernières décennies ?

Le sport,et surtout l’individuel en particulier, qui est à notre portée puisque nous y avons réussi par le passé, est devenu, de nos jours, la diplomatie de l’élégance, de la finesse, de la puissance, de la grâce, de la beauté, de l’éclat, de la splendeur, de la perfection, de la distinction, de la séduction, de la somptuosité, de la grandeur et de la majesté. Comme ce sport est individuel et ne concerne qu’une seule personne, il ne peut être qu’à notre portée pour peu que nous ayons de la volonté, de la détermination et de l’audace pour y arriver. D’autre part, certaines disciplines de ce sport, relativement peu *techniques* sont *adaptables* à notre tempérament et à notre caractère. Parmi celles qui sont à notre portée, on peut citer toutes les courses de fond à partir de 1500 mètres, le saut en longueur, le triple saut, le lancer du poids, le javelot, le marteau, la marche, le marathon, etc….). Cependant, toute préparation de sportifs de haut niveau nécessite des cadres de très grande valeur, des moyens financiers et un contrôle rigoureux. Or, l’avantage d’un athlète et un seul peut nous ramener une médaille d’or (aux Jeux Olympiques ou aux Championnats du monde), cette même médaille d’or que ne peuvent espérer ramener les vingt-deux joueurs d’une équipe de football budgétivore et dont la préparation nous coûte les yeux de la tête pour des résultats très médiocres, tellement son niveau est sans commune mesure avec les équipes européennes et sud-américaines. Aussi, est-il concevable que les sports individuels qui peuvent nous donner tant de satisfactions et représenter dignement notre pays, en le faisant connaitre aux quatre coins du monde lors des joutes internationales, demeurent le parent pauvre du sport lorsqu’il s’agit de moyens financiers mis à la disposition des fédérations sportives ? N’est-il pas plus indiqué de diminuer les allocations fournies au football et augmenter celles attribuées à l’athlétisme. Le bon sens le conseille,  le recommande et même le préconise. 

Lorsque nous nous comparons à certains pays de notre taille et qui, comme nous, ont participé aux derniers championnats du monde d’athlétisme de Londres, l’on ne peut que rester pantois et, en même temps, admiratif quand on analyse les résultats obtenus par des pays qui, il n’y a pas si longtemps, n’étaient pas plus forts que nous, dans tous les domaines. D’ailleurs, les résultats suivants, obtenus lors de ces 16° championnats d’athlétisme doivent nous interpeller, intéresser tous les cadres sportifs d’athlétisme, ainsi que les responsables de la fédération et surtout les responsables du secrétariat d’Etat aux sports qui doivent les avoir , en permanence, sur leur bureau, pour en faire des études critiques en vue d’en tirer  les enseignements qui s’imposent:

Pays Médailles d’Or Argent  Bronze Classement
Kenya 5 2 4
Ethiopie 2 3 0
Colombie 1 1 0 12°
Bahreïn 1 1 0 12°
Jamaïque 1 0 3 16°
Croatie 1 0 1 18°
Trinidad-Tobago 1 0 1 18°
Côte d’Ivoire 0 2 0 28°
Ouganda 0 1 0 32°
Maroc 0 1 0 32°
Syrie 0 0 1 38°
Malte 0 0 1 38°
Tanzanie 0 0 1 38°
Kazakhstan 0 0 1 38°

Il est certain que toute sélection nationale, soucieuse d’une bonne participation à pareils jeux, au niveau international, nécessite un entrainement de longue haleine, une préparation très sérieuse, une disponibilité des athlètes de plusieurs années sinon d’une décennie et un encadrement physique, technique, psychologique, et moral alliant compétence, expérience, moyens et valeurs morales certaines. De même, les responsables de la Fédération d’athlétisme en charge de la préparation de cette élite qui doit se mesurer aux champions du monde doivent, non seulement, avoir des connaissances approfondies des disciplines pratiquées mais encore imbus de la mission dont ils sont investis pour préparer des sportifs à défendre dignement les couleurs de leur pays. Cette mission concerne, en premier lieu, l’Etat qui fournit les moyens personnels et les soutiens matériels et qui doit fixer les objectifs à atteindre et la stratégie à appliquer tout en précisant la durée de chacune des phases de la préparation du futur champion. Il est essentiel que l’encadrement technique soit, non seulement, d’une compétence sûre, certaine, garantie et prouvée mais encore disposant d’une expérience reconnue et affirmée. De même, les responsables de la fédération doivent avoir les connaissances sportives minimales suffisantes leur permettant, à chaque instant, d’intervenir pour apprécier la progression des athlètes et d’évaluer, à chaque fois et périodiquement, les progrès réalisés, en vue d’atteindre les objectifs fixés. Un futur champion doit être pris en charge, suite à une prospection faite, dès l’école de base (entre 10 et 13 ans), par des spécialistes de la discipline concernée, c-à-det par exemple, des connaisseurs en saut en longueur pour un futur champion en cette discipline, des spécialistes en saut en hauteur pour un futur champion en saut en hauteur, des spécialistes en lancer de poids ou de javelot pour un futur champion en lancer de poids ou de javelot, etc….) durant de nombreuses années pour sa formation.Celui-ci doit être, remarquablement, encadré, que ce soit dans ses entrainements sportifs que dans ses études. Ceci nécessite l’affectation aux Ecoles de base de maitres ou de professeurs d’éducation physique en nombre suffisant particulièrement à l’intérieur du pays où la prospection peut être fructueuse. Ce sont eux qui doivent prospecter, d’une façon régulière, les jeunes, ces champions en herbe, ayant de bonnes dispositions sportives et une morphologie adaptée à telle ou telle  discipline sportive en vue de leur prise en charge pour des essais sérieux.

Notre grand problème est que nous ne sommes pas, suffisamment, patients pour donner, du temps au temps, et faire une préparation basée sur des données scientifiques qui tienne compte de toutes les phases et de la progression de l’athlète selon les prévisions méthodiques et rationnelles. Chaque président de fédération, soucieux de présenter un bilan positif durant son mandat, qui est normalement de cinq ans, est toujours pressé d’avoir les meilleurs résultats dans le minimum de délais, ce qui n’est, nullement, concevable. La plupart de nos présidents de fédération, de n’importe quelle discipline, agissent, malheureusement, de la sorte pour avoir les meilleures chances de réélection. Cette mentalité, doit, impérativement, évoluer même s’ils sont tenus par des obligations de résultats et rendre des comptes, à la fin de leur mandat, même s’il n’y a pas eu, de participation, à des championnats mondiaux ou olympiques. C’est de cette manière que notre sport  progressera.  

La réussite de notre grand champion Mohamed Gammoudi n’était pas fortuite. Elle a nécessité une longue préparation, une discipline stricte et ferme, une volonté de fer de la part du sportif lui-même, la détermination de l’Etat qui n’a pas lésiné sur les dépenses de participation aux divers critériums internationaux, un régime alimentaire spécial, et beaucoup de sacrifice et de patience. Le ministère de la Défense Nationale est mieux placé pour donner la recette de la réussite de cette * Etoile Filante* qui  a  fasciné et comblé la Tunisie, le Maghreb et tout le monde arabe et a émerveillé le monde. Mais comment a été découvert Gammoudi ? Tout simplement s’étant présenté pour accomplir son service militaire, il a participé, comme tous les jeunes de son âge, au cross régional qui est organisé en vue d’une présélection destinée à former l’équipe nationale militaire de cross. La suite, tout le monde la connait. D’ailleurs, ces cross régionaux étaient des évènements sportifs qui animaient les régions et pareilles activités étaient l’occasion de réjouissances,  de  divertissements et de distractions pour tout le gouvernorat.

Ce qui est regrettable, c’est qu’aucune importance ou considération n’est donnée à l’athlétisme, pourtant l’activité sportive la plus riche en disciplines et qui peut nous permettre de nous coller, assez rapidement, aux grandes nations sportives. Ceci nécessite une volonté politique certaine. Malheureusement, les disciplines sportives n’ont pas le vent en poupe parce que nos responsables politiques ne sont, pour la plupart, intéressés que par la Politique et rien d’autre. Et pourtant, celles-ci représentent la diplomatie intelligente et la diplomatie positive pour un pays.           

Aussi, pouvons–nous former de grands champions si nous n’avons pas de grands entraineurs et des formateurs compétents ? La question se pose sérieusement et nous devons soit demander à certains pays amis de nous détacher des cadres formateurs (Cuba pour la boxe, la Jamaïque pour les cross courts, le Kenya pour les cross longs, les Pays d’Europe Centrale pour la gymnastique, etc…..) ou envoyer des stagiaires dans ces pays pour approfondir leurs connaissances, mieux se former et connaitre les ficelles du métier.

Quand je revois le classement de certains pays qui ont participé aux Championnats mondiaux d’Athlétisme de Londres, et je compare ceux qui n’ont pas les mêmes dimensions, les mêmes moyens, la même population que notre pays et dont les sportifs ont remporté quelques médailles, quelque elles soient, je les félicite très sincèrement. En même temps, je suis d’autant plus dépité et affligé pour mon pays qui mérite mieux et plus pour peu que les responsables prennent, d’ores et déjà,  leur mission à bras le corps, fixent les objectifs à atteindre, les priorités à réaliser et tracent une stratégie. La responsabilité des politiques est totalement engagée car, outre le fait que c’est le politique, le ministre de la jeunesse et des sports, qui est le premier responsable de ce domaine comme dans n’importe quel autre domaine et s’agissant de la grandeur, du prestige et de la réputation de la Tunisie, ce sont aussi MM. les Président de la République, le Chef du Gouvernement et même le Président de l’ARP qui sont, aussi, concernés par tout ce qui touche aux sports,  cette activité ô combien importante pour la promotion et le prestige de notre pays.

Cependant, ce qui est regrettable, c’est le sentiment de désintérêt de l’élite et des nombreux responsables sur l’utilité du sport en général et tout particulièrement l’athlétisme et le peu d’importance accordé à pareils évènements mondiaux qui sont suivis, grâce à la magie de la télévision, par des milliards de téléspectateurs, aux quatre coins du monde. Aussi, ayons moins de foot et plus de sports individuels et nous y gagnerons à tous les coups.

Ce qui est plus inquiétant, angoissant, effrayant et alarmant, c’est cette absence totale d’ambition pour notre pays non seulement dans le domaine du sport mais encore dans bien d’autres secteurs et cela me chagrine car, notre immortel poète AboulkacemEchchabi a, depuis les années trente du siècle dernier, et dans son fameux poème* la Volonté de vivre*,  tenu à chatouiller nos sensations en disant dans l’un de ses vers* Et si quelqu’un ne veut pas escalader les montagnes……il passera, sa vie durant, au milieu des trous* et dans un autre ver *Et il a été annoncé dans l’univers  que l’ambition est la flamme de la vie et l’âme de la réussite*. D’autre part, dans ce même poème, il a consacré six vers où dans chacun d’eux, il parla de *l’ambition*. Que nos concitoyens apprennent ces quelques vers, ils pourront les stimuler davantage.

Aussi, pour peu qu’on ait un tant soit peu de patriotisme, d’amour et de respect pour ce pays, comment peut-on rester insensible, lors des cérémonies de remise de médailles aux champions, lorsque les couleurs sont lancées au septième ciel et que l’hymne national du vainqueur numéro un retentit aux quatre coins du monde, comment peut-on rester insensible ? Oui, rester insensible à ce sentiment de fierté, de grandeur, d’admiration, d’orgueil et de superbe que ressentent les millions de concitoyens du champion pour ne pas agir et réagir en vue de participer, de là où nous sommes, à ce sursaut nationaliste pour mettre la pression sur tous les responsables, de loin ou de près, quant à la bonne et sérieuse préparation de nos jeunes champions en herbe pour qu’ils arrivent à rééditer ces moments grandioses et historiques que nous avons vécus, à Tunis, à Alger et à Casablanca, lorsque le grand champion Mohamed Gammoudi remporta la médaille d’or aux Jeux Olympiques de Mexico, en 1968, il y a un demi-siècle ?

D’ailleurs, personne ne s’est inquiété quant à l’élimination immédiate, dès le premier tour, de nos athlètes. Et ni médias, ni associations de la société civile, ni responsables politiques n’ont en parlé. Tout le monde semble être content de ces résultats, l’essentiel étant d’y participer !!! Pauvres de nous !!! La Tunisie mérite mieux et plus que cela !!! 
En espérant que bonne note est prise pour l’avenir immédiat, en vue de donner à ces grands événements sportifs l’importance qu’ils méritent :

  • pour que la préparation à ces joutes ne s’arrête jamais et qu’elle concerne tout le monde, du Président au citoyen en passant par les écoles, les lycées, les maitres et professeurs de sports,
  • pour que les responsables des fédérations et les Directeurs au Secrétariat d’Etat aux sports, et au Ministère des Sports et les Directeurs régionaux des Sports soient motivés ;
  • pour que les organismes sportifs et surtout les associations de la société civile soient toujours mobilisés en vue de mettre la pression sur tous les responsables pour des résultats dignes de la Tunisie Eternelle.

Que Dieu veille et protège la Tunisie Eternelle, l’héritière de Carthage.

Boubaker ben kraiem
Ancien Sous-Chef d’Etat-Major de l’Armée de Terre,
Ancien Gouverneur. 

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