News - 16.08.2015

Le RFR sera-t-il sauvé ?

Le RFR sera-t-il sauvé ?

Il était censé entrer en service fin 2014. A l’arrêt depuis la révolution, les chantiers du Réseau ferroviaire rapide de Tunis (RFR) s’est embourbé dans des problèmes inextricables. Avec ses cinq lignes totalisant 86 km devant desservir les banlieues populaires, jusqu’à Borj Cédria, Mhammedia, Gobâa, Mnihla, Essijoumi, Charguia, l’Aéroport et Ariana Nord, il sera d’un grand intérêt pour les passagers et permettra sans aucun doute de décongestionner la circulation urbaine. Coût initial de la première tranche: 1.150 MD

 

La société d’étude et de réalisation RFR a été constituée en 2007, les premiers contrats ont été signés en 2009-2010, la réalisation s’est figée au taux de 17%. Combien coûte ce retard? Pas moins de 100 MD par an, s’offusque le chef du gouvernement, Habib Essid, ahuri par ce gouffre. «Ce projet, affirme-t-il à Leaders, devrait bénéficier à des quartiers pour la plupart défavorisés et des populations qui endurent chaque jour les souffrances des transports publics. L’Etat leur a promis ce projet, mais le voilà incapable de le réaliser. C’est inacceptable».


Mais il n’y a pas que les passagers qui s’en trouvent pénalisés. Les entreprises contractantes sont sur le point de remettre les clefs, certaines frisant le dépôt de bilan. La logique de 2007, où l’Etat autoritaire pouvait tout décider, imposant les variantes de son choix, a changé. Les prix aussi. Sans parler de la libération des emprises et la résolution de certains problèmes fonciers. Bref, la quadrature
du cercle.

Le RFR

Le Réseau ferroviaire rapide (RFR) sera composé à terme (horizon 2021) de 5 lignes totalisant près de 85 km :

  • Ligne A : Tunis-Borj Cedria : ligne existante de 23,2 km mise en service en juin 2012
  • Ligne C : Tunis PV-Bir Kassa-Fouchana-Mhamdia (19,5 km)
  • Ligne D : Tunis-Manouba-Gobaa -Mnihla (19,2 km)
  • Ligne E : Tunis-Ezzouhour- Zahrouni- Essijoumi (12,9 km)
  • Ligne C+F : Tunis PV-Bourgel-Ariana Nord (10,5 km)

Première tranche

Une première tranche de 18.5 km d’un coût de 550 millions d’euros sera réalisée entre 2010 et 2017

  • Ligne D : Centre Ville-Gobaa : 12,2 km. Cette ligne emprunte l’emprise existante de la Sncft
  • Ligne E : Centre-ville-Bougatfa : 6,3 km

Cette première tranche (infrastructures et matériel roulant) est financée à raison de 40% sur le budget de l’Etat et 60%, soit 325 millions d’euros, sur des crédits extérieurs.

Tout débloquer

Face à cet échec généralisé, aux lourdes implications financières et sociales, Habib Essid ne pouvait rester de marbre. Le 11 juin dernier, il convoquait un Conseil ministériel restreint (CMR) pour trancher. Première décision: mise en place d’un comité de pilotage composé des ministres des Finances, Transport, Equipement, Domaines de l’Etat et Coopération internationale. Il a pour rôle d’assurer la coordination nécessaire et d’arbitrer, si nécessaire.


Deuxième décision : la validation de la variante choisie pour le Bardo qui a longtemps plombé le projet.
La délégation spéciale municipale s’est perdue en conjectures, n’arrivant pas à présenter des propositions appropriées quant au parcours à emprunter et au mode site propre ou autres, se contentant d’un rejet systématique. Refusant de délivrer un permis de démolition d’une ancienne bâtisse, appartenant d’ailleurs au domaine ferroviaire et servant d’annexe aux services de l’Assemblée des représentants du peuple, elle a contraint le chantier à l’arrêt.

Au mieux, elle esquisse une proposition dont le coût s’élève à 1.400 MD, soit plus que le double du projet tout entier dans sa première tranche. Troisième décision, la mobilisation d’un montant de 650 MD pour le financement du matériel roulant. La Sncft, en charge de l’exploitation du RFR après sa réalisation, procède actuellement au dépouillement des cinq offres reçues.

Le chef du gouvernement en chef de chantier

Lot par lot, le comité de pilotage planche chaque semaine au niveau des cinq ministres, dans la grande salle du Conseil des ministres à la Kasbah, pour débloquer les dossiers un à un. Les décisions sont prises séance tenante : les questions relatives aux bâtiments, matériel roulant, systèmes et plan de communication, déjà tranchées. Souvent, le chef du gouvernement pousse la porte pour s’enquérir de la bonne avancée. Mettant le casque sur la tête, il n’hésite pas à aller sur le terrain, pour inspecter le redémarrage encore timide des entreprises contractantes.
Le chef du gouvernement devient alors chef de chantier. «Pourquoi pas, tant que c’est nécessaire et utile», commente l’un de ses proches. Il faut dire que depuis sa nomination en tant que PDG du RFR, Moez Lidinallah Mokadem n’attendait que cette impulsion au sommet pour mettre le turbo. Juriste, énarque (cycle supérieur de l’ENA, et cycle long de l’ENA Paris), cet ancien chef de cabinet du ministre du Transport.

 

(Chiheb Ben Ahmed) a mis à profit son passage aux services de la Commission supérieure des marchés et au ministère de tutelle pour débloquer au maximum. «Ma priorité a été d’assainir les relations contractuelles avec tous les intervenants, dit-il à Leaders. Délais dépassés, formules de révision de marché inapplicables, emprises non libérées, et contrats arrivés à échéance : il aura fallu tout le concours précieux de la Commission supérieure des marchés pour nous sortir du pétrin. La diligence a été édifiante : un dossier soumis un Mercredi reçoit l’accord en un temps record, le lundi d’après.».

«C’est une chance que d’y être»

«Aujourd’hui, aucun lot n’est à l’arrêt, affirme Mokadem. Nous espérons atteindre le rythme de croisière d’ici la fin de l’année et essayons de rattraper au mieux le temps perdu. Pour être réaliste, le délai prévisible de mise en service serait avant la fin de 2018. Les deux premiers tronçons seront ceux des lignes centre-ville-Goubaa et centre-ville-Bougatfa. Le plan 2016 -2020 prendra en charge la deuxième tranche. Le coût initial de 3.2 MD calculé en 2009 serait revu à la hausse pour atteindre
5 MD».


Quand on demande à cet énarque de 38 ans, basketteur doué, pourquoi il a accepté de prendre en main un projet aussi complexe et compliqué et s’engager à le dénouer, il affirme humblement : «C’est une chance que d’y être. Lorsqu’on comprend bien le projet et tous ses impacts, on réalise son importance et on s’engage sans retenue en faveur de sa réalisation».

 

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