Opinions - 05.06.2014

A la veille du Dialogue Economique: La Tunisie a grand besoin, aujourd'hui, du génie de Farhat Hached

Nul doute qu’à la fin de ce mois, nous attendons beaucoup du Congrès économique auquel a appelé le Gouvernement de Mahdi Jomâa. Ce Congrès sera déterminant pour l’avenir du pays du fait qu'il se tient à un moment où la Révolution tunisienne est à la croisée des chemins: continuer à dévier du but qu'elle s'est donné depuis les élections du 23 octobre 2011, ou prendre la voie d'un tournant sérieux et salutaire. Cette réunion  constituera alors, une "pause de réflexion" qui amènera  les partis politiques et les organisations de la Société civile à se remettre en cause, à écouter  la voix de la sagesse et de la raison. Il s’agit, aussi, de placer l’intérêt et l’avenir de la Tunisie au tout premier plan, de renoncer aux surenchères et autres manœuvres et se consacrer à l'appui au "Gouvernement des compétences ", issu du dialogue et du consensus national, et qui s'est attelé à la tâche, avec sérieux et discrétion, pour sauver l’économie nationale de la situation désastreuse qu'elle connaît. Tâche bien difficile qui ne peut être menée à bonne fin que dans la mesure où ce Gouvernement dispose de conditions favorables, et que son chef ait l’audace nécessaire pour mettre à exécution les dispositions de "la feuille de route". A condition, aussi et notamment, que tous les protagonistes politiques optent pour  la voie de la pondération et de la sagesse et acceptent les sacrifices justes et nécessaires sans lesquels il n’est point de salut.

Une approche partisane 

Les deux Gouvernements de la Troïka avaient cherché à garder le pouvoir afin de prendre le temps de placer leurs partisans aux postes-clés de l’Etat , et a aussi  prolongé la seconde période transitoire afin de mettre à exécution leur politique visant à changer le modèle de société moderniste et ouverte mise en place par l'Etat issu de l'indépendance ,n'eut été la très ferme opposition de la société civile, et surtout celle de l'UGTT. Pour ce faire, et ignorant la volonté des électeurs, ces gouvernements ont érigé l'Assemblée Constituante en Assemblée Législative, leur but étant de mettre au pas les institutions de l'Etat et leur fonctionnement .Bien plus, accéder aux revendications, pourtant excessives, de certaines catégories de la population, ne visait, pour ces mêmes gouvernements, qu'à gagner des partisans, et nullement dans un souci d'intérêt pour une économie déjà fragilisée et pour une paix sociale.

Un besoin de sagesse et d'audace 

La politique des Gouvernements de la Troika, a, par les charges additionnelles, qu’elle a faite supporter à l’économie, porté préjudice à la compétitivité des entreprises et les à conduites à réduire leurs projets d'investissement, pourtant si nécessaires au développement de l'économie et à l'ouverture de nouvelles perspectives.         

Le Gouvernement de Mahdi Jomâa a déjà montré qu’il n’était pas disposé à poursuivre pareille politique. Les partis politiques et les organisations nationales - et, en premier lieu, l’U.G.T.T -,  devraient en avoir conscience. De toute évidence, la politique des Gouvernements  de la Troika – en s'engageant dans la spirale de l'augmentation des salaires et de la hausse des prix – ont conduit notre économie au déficit. De nombreuses voix, venant d'éminents économistes tunisiens, se sont élevées contre une telle politique.

Malheureusement, ces voix n'ont trouvé aucun écho et n'ont retenu l'attention ni du Gouvernement, ni celle de l'opposition, ni même celle de l'UGTT, chacun œuvrant à réaliser son propre programme au service  d'intérêts étroits.

La jeunesse de la Révolution de nouveau marginalisée

Les forces politiques auraient du ne pas se laisser entraîner par ce choix du Gouvernement de la Troika réellement suicidaire pour le pays. Elles auraient pu, dés le déclenchement de la Révolution, inciter tous les citoyens disposant d'un revenu stable, à contribuer, selon les possibilités de chacun, à la création d'un Fonds de développement destiné à financer les projets d’infrastructure dans les régions marginalisées. Une telle initiative aurait constitué la meilleure expression de solidarité avec les jeunes en quête de liberté et d’emploi.

Mais voilà que ces jeunes – qui ont consenti de grands sacrifices pour la Révolution et ont fondé les plus grands espoirs sur les perspectives qu'elle pouvait leur ouvrir – se trouvent frustrés de leur victoire, désespérés, et, une fois encore, marginalisés au profit de la sollicitude manifestée à l'égard de ceux qui disposent d'un emploi et d'un revenu stable, et dont le souci majeur est d'améliorer leur situation et d'augmenter leurs salaires.

Les revendications excessives anéantissent les efforts de développement

Des responsables politiques continuent à être favorables à l'augmentation des salaires car, selon eux, elle vise à améliorer le pouvoir d'achat des travailleurs, à accroitre la production agricole et industrielle, à créer de l'emploi, à impulser la productivité, constituant de la sorte le meilleur stimulant au développement.

Toutefois, cette vision ne peut se vérifier dans le cas d'une économie dont les besoins sont, en majorité, couverts par l'importation. S'accrocher à cette vision et s'obstiner à l'appliquer à une économie fragile, souffrant d'une production et d'une productivité insuffisante et d'un manque d'investissement, mène inexorablement à l'inflation, à la chute de la valeur du dinar et au  déséquilibre de la balance commerciale. Cela conduit également à réduire les opportunités de l'emploi, à favoriser le recours à un surplus d'endettement. Poursuivre cette politique ne relève-t-il pas de l'obstination et du reniement des objectifs de la Révolution? Où réside l'urgence ? Est-ce au profit de ceux qui jouissent d'un emploi et d'un revenu permanent, ou, au contraire, au profit des  sans- emploi qui vivent dans le dénuement?

Dans ces circonstances, le discours politique, économique et social  doit, impérativement, changer. On doit dire aux citoyens toute la vérité sur l'état réel de notre économie, appeler les détenteurs de capitaux à investir, les salariés et les fonctionnaires à mettre fin à leurs revendications excessives, aux grèves et au sit - in.
En cette période difficile que nous vivons, il nous faut absolument faire preuve d'austérité, de sacrifice et nous mettre sérieusement au travail et sans plus tarder.

S'inspirer du génie de Farthat Hached 

Aujourd'hui la Tunisie a, plus que jamais, besoin d'une attitude audacieuse de la part des partis politiques, de la Société civile et des organisations nationales et, parmi lesquelles, notre puissante Centrale, l'Union Générale Tunisienne du Travail qui, grâce à son attitude ferme au cours des derniers mois, a contribué à éviter au pays les conséquences graves d'une crise politique, en imposant le dialogue et le consensus aux partis et aux partenaires politiques de la Société civile, ce qui a donné lieu à la constitution d’un " Gouvernement des compétences " pour gérer la seconde phase de la transition démocratique.

Certes, la situation est difficile, nous en sommes persuadés. Mais nous sommes aussi persuadés que l'UGTT compte, parmi ses cadres, des hommes et des femmes qui, dans les situations difficiles, sont capables de faire la distinction entre l'important et l'essentiel, entre le bon grain et l'ivraie, et de faire preuve de lucidité et d'une véritable vision d'avenir .

Rappelons –nous, le 18 janvier 1952, lorsque le combat pour l'indépendance a été déclenché contre le colonialisme, que les chefs du Néo-Destour ont été arrêtés ou déportés, à leur tête le Président Bourguiba, que le Grand Hached a choisi de mettre en sourdine les revendications sociales et syndicales, et, sans hésiter, à orienté l'UGTT vers "la bataille décisive, celle de la dignité et de la lutte contre le colonisateur . Hached fut, non seulement le syndicaliste, mais aussi le patriote exceptionnel, qui a placé la Tunisie et son indépendance au-dessus de toute considération.

Pour faire face aux difficultés économiques actuelles, nous avons, aujourd’hui, plus que jamais, besoin de nous inspirer du génie de Hached. Il faudrait reporter les revendications sociales à plus tard afin d’aider la Tunisie à sortir de la crise économique.

Le dialogue national économique devra œuvrer pour trouver les mesures adéquates et nécessaires permettant de faire sortir la Tunisie de la crise économique tout comme il a récemment permis de surmonter  la crise politique par l'adoption de la Constitution et la formation d'un "Gouvernement de compétences " 
Que l'intérêt national l'emporte sur l'intérêt partisan, et ce à la veille des prochaines élections législatives et présidentielles, afin que notre Tunisie puisse faire face aux défis qui l'attendent encore.                  

Me Abdessalem Kallel  
5 juin 2014
                                                                                     

 

Tags : Tro   Tunisie   UGTT  
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2 Commentaires
Les Commentaires
moncef moncef - 05-06-2014 17:40

Je suis d'accord sur tout ce qui a été dit ci-dessus, effectivement tout semble correct et c'est celà la vérité,pourvu que le prochain congrés rassemblera les gens Patriotiques et qui travaillent pour le bien de la Tunisie nouvelle.

Kh. Tlatli - 07-06-2014 08:21

Enfin si Abdessalem quelqu'un qui ose dire la vérité. nos hommes politiques ont peur de ce mettre les syndicats sur le dos et n'osent pas dire ce que vous venez de nous exposer. arrêtons les grèves à tout bout de champ, pour un certains temps, et commençons à penser à ceux par qui le révolution est venue : les chômeur et tous les déshérités de ce pays.

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