Opinions - 14.10.2011

M. Mohamed Ennaceur : «ma plus grande satisfaction, l'accord sur l'amélioration des salaires»

S’il est encore prématuré de dresser un bilan équitable du gouvernement de transition, une première auto-évaluation par les ministres eux-mêmes est, sans doute, instructif. A la veille du scrutin du 23 octobre devant marquer, en principe, la fin de leur mission, nous les avons invités à nous livrer, faute d’un bilan exhaustif, du moins, leurs sentiments, sur ces mois passés au gouvernement. Pour structurer les réponses, quatre questions leur ont été posées :

1. Quelle est la mesure que vous avez prise et dont vous êtes le plus fier ?
2. Et celle que vous n’avez pas pu prendre et en êtes resté frustré ?
3. Y a-t-il une décision que vous regrettez ?
4. Quelles sont les principales réalisations de votre mandat?


Tous, ou presque, ont accepté d’y répondre, mais happés par le quotidien, devant en outre se rendre à l’étranger, et limités par les délais de bouclage du magazine, cinq parmi eux ont pu nous faire parvenir leurs réponses à temps. Il s’agit de MM.:
• Mohamed Ennaceur, ministre des Affaires sociales
• Taieb Baccouche, ministre de l’Education
• Lazhar Karoui Chebbi, ministre de la Justice
• Ahmed Adhoum, ministre des Domaines
de l’Etat et des Affaires foncières.
• Dr Slaheddine Sellami, ministre de la Santé Publique
Un panel réduit, mais assez significatif.

M. Mohamed Ennaceur, Ministre des Affaires sociales

Il avait été initialement pressenti pour devenir ministre de l’Intérieur, mais M. Mohamed Ennaceur a préféré reprendre les Affaires sociales. Pour la troisième fois.

Cette fois-ci, dans des circonstances historiques où il se sent encore plus utile. Sa mission ne s’est pas limitée à son département, s’élargissant au sein du gouvernement, à travers une implication active dans les diverses réunions interministérielles, du conseil des ministres et les concertations.
Au-delà du social qui lui coule dans les veines, M. Mohamed Ennaceur a toujours porté une vision d’avant-garde sur le modèle de société, le nouveau contrat social, les liens qui doivent unir les Tunisiens et aviver en eux le désir du vivre-ensemble. à quelques jours des élections, il fait pour Leaders, le bilan de son action à la tête du ministère des affaires sociales.

Quelle est la mesure que vous avez prise et dont vous êtes le plus fier ?

Incontestablement, celle d’avoir abouti, à travers l’impulsion du dialogue social, à un consensus entre les partenaires sociaux portant sur l’amélioration des salaires dans le monde du travail, à un moment particulièrement critique.Outre sa portée sociale et économique, un tel résultat me semble hautement symbolique de l’esprit de responsabilité qui anime les responsables syndicaux et patronaux, en même temps qu’il fait du dialogue la meilleure alternative pour résoudre les problèmes du pays.

Et celle que vous n’avez pas pu prendre et en êtes resté frustré ?

Faute de temps, nous n’avons pas pu concrétiser le projet de garantir un minimum de protection sociale généralisée à tous les citoyens, mais nous y travaillons beaucoup et nous espérons que ce projet se réalisera un jour.

Quelles sont les principales réalisations de votre mandat ?

Trois grands principes nous ont guidé dans notre action au sein du ministère des Affaires sociales : La lutte contre l’exclusion et la précarité, la recherche de la paix sociale à travers le dialogue et le consensus, la réorientation de la politique sociale afin qu’elle serve le citoyen et ne soit pas dévoyée vers d’autres objectifs.

• La lutte contre l’exclusion et la précarité : plusieurs mesures ont été prises dans ce sens telles que
:

- l’amélioration des conditions de vie, des salaires et la couverture sociale de plusieurs milliers de salariés : travailleurs des chantiers et ceux travaillant dans le cadre de la sous-traitance dans le secteur public ;

- la généralisation de l’aide sociale à toutes les familles nécessiteuses qui bénéficient désormais d’une allocation mensuelle et de cartes de soins gratuits en plus d’une aide exceptionnelle à l’occasion du mois de Ramadan, de l’Aïd et de la rentrée scolaire;

- la prise en charge de l’intégration des travailleurs tunisiens rentrés précipitamment de Libye.
Ces mesures qui s’ajoutent au magnifique effort fourni par la population et la société civile prouvent que la solidarité demeure une valeur ancrée dans notre culture qu’il s’agira de développer davantage pour resserrer notre unité nationale. Parallèlement à ces mesures, nous avons engagé un programme de lutte contre la pauvreté en facilitant l’accès des familles nécessiteuses à l’autonomie par l’exercice d’une activité génératrice de revenus. Ce faisant, ces familles recouvrent leur dignité et leur citoyenneté en apportant leur contribution à l’activité économique du pays. A cet effet, nous avons mis en place les mécanismes permettant l’accès au micro-crédit pour les projets individuels tout en mobilisant nos structures régionales et locales pour la réalisation de projets de développement communautaire avec la participation des bénéficiaires et des ONG de développement. Signalons à ce propos que nous organisons avec le bureau international du travail une conférence internationale, à Tunis, les 21 et 22 septembre prochain, sur le thème « Justice sociale et lutte contre l’exclusion dans un contexte de transition démocratique ».

• Recherche de la paix sociale à travers le dialogue et le consensus :
Dès le début de la révolution, les revendications salariales se sont multipliées. Grâce au sens de la responsabilité dont ont fait preuve les partenaires sociaux, nous avons d’abord agi sur les bas salaires en augmentant substantiellement le SMIG et le SMAG. Ensuite, et après des efforts longs et pénibles, qui ont commencé au mois de février, nous avons abouti à un consensus portant augmentation des salaires pour une période d’une année, dans les secteurs public et privé.
Nous pouvons même affirmer aujourd’hui que grâce aux sacrifices des uns et des autres et au sens de l’intérêt général qui a prévalu, un apaisement est constaté de plus en plus dans le monde du travail.
Dans ce contexte, je me dois de rendre hommage aux inspecteurs du travail qui, grâce à leur professionnalisme et leur sens du devoir, ont contribué à rapprocher les points de vue divergents et à trouver les compromis salutaires. En outre, et afin de soutenir les entreprises, il a été décidé de supprimer les pénalités de retard de paiement dès lors que l’intégralité de leurs contributions a été payée à la CNSS ou à la suite d’un accord avec cette Caisse pour le rééchelonnement de la dette principale. J’ajouterais, enfin, que nous avons aujourd’hui besoin d’une politique des salaires rénovée qui s’appuie sur la prise en considération des gains de productivité. En outre, une enquête sur les salaires a été lancée par le ministère et menée par le centre d’études sociales qui en dépend en vue de constituer une base de référence sur l’évolution des salaires et fournir les données adéquates à toute réforme éventuelle dans ce domaine.

• La politique sociale au seul service du citoyen :

Avant la révolution, et pendant longtemps, la politique sociale a été instrumentalisée pour servir l’image du régime politique. L’une des premières décisions que j’ai prises était de rendre justice aux travailleurs sociaux en faisant confiance à leurs compétences pour soustraire l’action sociale à toute influence politique et pour l’orienter au seul service des citoyens. Ils l’ont fait avec sérieux et parfois à leur corps défendant.

D’autres décisions ont été prises en vue de donner à l’aide sociale le maximum de transparence. Je citerais comme exemples la décision d’afficher les listes des familles nécessiteuses bénéficiaires de l’aide de l’Etat et celle de faire participer les représentants de la Ligue tunisienne des droits de l’homme aux commissions régionales chargées de la sélection de ces familles. En outre, nous avons engagé une étude portant sur la réforme des structures et des programmes de l’Union tunisienne de solidarité sociale. Dans le même ordre d’idées, la mise du Fonds de solidarité nationale sous tutelle du ministère des Affaires sociales nous a permis de réorienter ses interventions en l’impliquant davantage dans le développement communautaire et en introduisant plus de cohérence entre ses actions et les choix fondamentaux de la politique sociale
Au niveau de la stratégie destinée aux Tunisiens résidant à l’étranger, nous avons discuté avec beaucoup de leurs représentants de leurs attentes et de leurs aspirations. Les décisions qui seront prises à ce niveau seront l’expression des choix démocratiques pris par la Tunisie nouvelle.

Lire aussi : Taieb Baccouche : Le difficile pari gagné à l’Education

 

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2 Commentaires
Les Commentaires
ayaket - 15-10-2011 14:10

Bravo Mr. Le Ministre; Mais il y a une catégorie de la population qui ont fait de notre Pays ce qu'il est aujourd'hui et dont personne n'en parle; Il s'agit des retraités qui ont travaillé durement pendant plus de 30 années dans le contexte difficile du secteur Privé et qui se trouvent en partie démunis de leurs anciennes couvertures sociales ( mutuelles, assurances...)ainsi que des augmentations de leurs pensions qui ne suivent pas le cout de la vie. Quand on oubli les ainés; C'est un mauvais signe..

hedia kouass - 17-10-2011 17:38

Merci mais il ya une autre catégorie de la population. c'est sont les travailleurs aux centres des handicapés mentaux et ont 20 ans d'anciennete et plus avec des salaires entre 200 d et 300 d . svp esseyer d'etudier nos situations le plus tot possible

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