News - 11.07.2017

Pourquoi cette lecture pénalisante du régime «Exportateur» ?

Pourquoi cette lecture pénalisante du régime « Exportateur » ?

La commission des finances au sein de l’ARP, a expressément retenu dans son rapport du 23/01/2017 page 76, le principe du « Droit acquis » en supprimant du projet de la loi sur les avantages fiscaux, l’article 15 qui prévoyait un abandon brutal du régime « Exportateur »notamment pour ceux qui n’ont pas encore consommé la période de 10 ans qui leur a été accordée par l’article 20 de la loi 2012-27 portant loi de finances pour la gestion 2013. 

احكام انتقالية
الفصل: 15
لا يمكن للمداخيل والأرباح المتأتية من العمليات التي لا تستجيب لمفهوم التصدير على معنى التشريع الجبائي الجاري به العمل ابتداء من غرّة جانفي 2017 مواصلة الانتفاع بالامتيازات الجبائية المخولة لها لذلك.

Cette suppression de l’article 15 vient confirmer la volonté du législateur de tenir l’engagement de l’Etat à faire bénéficier les entrepreneurs de ce qui leur a été promis en 2013, à savoir une exonération des bénéfices provenant de l’exportation pendant les 10 premières années de leurs activités.D’ailleurs, c’est ainsi que l’article 19 de la loi 2017-8 a été voté en prévoyant :

Art. 19 –

1) Les entreprises en activité à la date d’entrée en vigueur de la présente loi et qui ont bénéficié d’avantages fiscaux au titre des revenus ou des bénéfices provenant de l’exploitation conformément aux dispositions du code de l’impôt sur le revenu des personnes physiques et de l’impôt sur les sociétés en vigueur au 31 mars 2017, dont la période de déduction n’a pas expiré, continuent à bénéficier de la déduction totale ou partielle de leurs revenus ou bénéfices jusqu’à l’expiration de la période qui leur est impartie conformément à la législation en vigueur avant l’entrée en vigueur de la présente loi.

Cet engagement du législateur et par conséquent de l’Etat Tunisien, est une garantie pour tout investisseur ayant fait le choix de se lancer dans un modèle exportateur en comptant notamment sur un avantage fiscal très attractif en l’occurrence la déduction totale des revenus et bénéfices provenant de l’exportation.

Toutefois, il appert de la lecture du ministère des finances des dispositions transitoires de la loi 2017-8 portant refonte du dispositif des avantages fiscaux (article 19),mais surtout du projet de la note commune qui paraitra prochainement sur ce sujet, que ce « Droit acquis » ne le sera plus !

Une position qui risque de décrédibiliser l’Etat Tunisien à l’encontre de la volonté du législateur lui-même.

En effet, la direction des études et de la législation fiscales (DGELF) semble s’orienter vers une lecture très restrictive de la transition du régime exportateur en optant pour une rupture totale et infondée avec le régime exportateurdont les 10 premières années d’activité n’ont pas été consommées.

S’appuyant dans son raisonnement sur le fait que l’exportation indirecte a été redéfinie et sur le fait que l’article 19 a cité uniquement les société qui faisaient de l’export tout en étant régie par le code de l’IRPP et de l’IS (Pas celles régies par le code d’incitation aux investissements), la direction des études et de la législation fiscales (DGELF), vise à imposer les exportateurs dont la période de 10 ans n’a pas expiré si leurs exportations ne répondent plus à la nouvelle définition d’export de la loi 2017-8. Une nouvelle définition que certains exportateursaurait dû voir venir quand il avait bâti leurs «Business model» sans un coût d’impôt et que d’autres aurait dû se douter de son changement quand ils avaient choisi de s’implanter en Tunisie pour un tel avantage!

Quand la loi 2012-27 portant loi de finances pour la gestion 2013 est venue instaurer un régime définitif pour l’exportation après tant d’années de flottement et d’hésitation (loi 2006-80, loi 2007-70, loi 2009-71, loi 2010-58, décret-loi 2011-56), tous ceux qui voulait bâtir leurs « business model » sur l’exportation totale ou partielle ont été soulagés vu la visibilité manquante qu’ils ont pu trouver dans la promesse de l’exposé des motifs de l’article 20 de  cette loi . Sauf que cette promesse semble être éphémère puisqu’à mi-chemin on tourne le dos à ces mêmes entrepreneurs et on les prend en otage de leurs investissements en les imposantà 25% alors qu’ils sont censé être défiscalisés jusqu’à l’expiration de la période de 10 ans qui leur a été initialement accordée.

«Un Etat qui se respecte est un Etat qui tient ses engagements». 

L’article 19 des dispositions transitoires de la loi 2017-8 ne doit pas être interprété d’une manière restrictive. Il gagne à être en harmonie avec la volonté du législateur Tunisien et des dispositions des articles 532 et 541 du code des obligations et des contrats qui prévoient

Art 532 En appliquant la loi, on ne doit lui donner d'autre sens que celui qui résulte de ses expressions, d'après leur ordre grammatical, leur signification usuelle, et l'intention du législateur.

الفصل 532 نص القانون لا يحتمل إلا المعنى الذي تقتضيه عبارته بحسب وضع اللغة وعرف الاستعمال ومراد واضع القانون

Art 541 L'interprétation peut, en cas de nécessité, modérer la rigueur de la loi ; elle ne doit jamais l'aggraver.

الفصل 541 إذا أحوجت الضرورة لتأويل القانون جاز التيسير في شدته ولا يكون التأويل داعيا لزيادة التضييق أبدا

Si le législateur a confirmé le principe du « Droit acquis » en votant pour le maintien des avantages initialement accordés aux entrepreneurs pour lesquels la période n’a pas encore expiré, pourquoi alors cette lecture restrictive et pénalisante du régime exportateur ?

Mohamed Derbel
Partner- BDO Tunisie
Expert-Comptable



 

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