Opinions - 18.02.2013

Les surenchères idéologiques du front populaire face à Nida Tounes

Les enchères est une étape compromise de la faillite, la gauche de la gauche tunisienne avait promis la révolution, si elle n’avait jamais cessé de chauffer la marmite de la contestation sociale et réchauffer à froid les dogmes révolutionnaires marxistes, elle n’a jamais pu inventer une recette historiquement et spécifiquement tunisienne pour prendre le chemin de la victoire et participer au festin du pouvoir.

Le peuple s’est substitué à son avant-garde  pour exécuter l’acte révolutionnaire, par défaut.

Faute d’avoir l’ascendant sur l’évènement, impuissante de conquérir le pouvoir, l’élite de gauche se lance dans des surenchères idéologiques contre les « les libéraux » de Nida Tounes sans prendre le temps de réfléchir sur sa condition historique pour voir clair et faire des choix réalistes par des alliances tactiques et stratégiques.

La gauche se trompe d’ennemi dans la réalité historique de la Tunisie post-révolutionnaire

Pour faire simple, l’acte de naissance de la révolution tunisienne n’est pas clair et la lisibilité  l’acte du décès de l’ancien régime s’avère historiquement compliqué.

Le Bourguibisme a triomphé, sans que la république soit confirmée par une légitimité démocratique, depuis la fin des années soixante-dix, le parti unique avait été tenté par des liaisons dangereuses avec le mouvement à l’origine de la Nahdha, El Ittijah El Islami, pourtant, ennemis d’hier et de toujours de Bourguiba, pour les dresser contre les forces de gauche, essentiellement estudiantines avec des prolongements dans la petite bourgeoise majoritairement dans la fonction publique.

La république de Bourguiba vieillissant sombrait dans le régionalisme et l’exclusion pour finir entre les mains des voyous sous le règne de la corruption, les mille nuits et Layla.

La promesse Destourienne de fonder un Etat républicain reste à refaire dans une société que le despotisme et le parti unique ont paralysé le débat  démocratique, figeant la société dans une pré-modernité, laissant la porte ouverte aux forces du passé.

Faute d’un acte de naissance déterminant, la révolution  n’a pas résolu les contradictions, elle a seulement liquidé les conditions historiques du système existant.

La question de la fondation de la république reste entière, la gauche doit choisir ses alliances en fonction de cette mission historique.

La République est la condition préalable de la promesse sociale de la révolution

M. H. Hammami et ses alliés du front populaire armés par les outils de la dialectique de l'histoire et ses lois; lecteurs privilégiés de la tradition de la révolution française, ne peuvent ignorer que la gauche française a eu la maturité de comprendre, depuis le 19ème siècle, que si la révolution française était une promesse sociale, une promesse indéfinie d’égalité, les socialistes et les communistes sont restés solidaires des républicains, chaque fois que l'existence de la république était menacée, parce que la république est à leurs yeux la condition préalable du socialisme.

L’avènement d’une gauche politique face à la droite, par la rupture idéologique et sociale entre deux France républicaines, n'a pas mis en cause ni freiner, deux siècles après, le réflexe républicain pour que la gauche vote pour Chirac face à l'extrême droite de Le Pen.

La révolution qui selon Jaurès est « des origines d’une origine, le monde d’une autre naissance » sera terminée quand elle est sanctionnée par le consentement légal et démocratique des citoyens, elle devient une institution nationale  par la fondation de la République sur le suffrage populaire.

Pour réaliser cette tâche historique face au projet islamiste des  Emirats et  Khalifats, un front commun avec tous les patriotes qui veulent sauver et l'indépendance du pays et la démocratie et la république, doit être scellé.
Aucun gouvernement post révolutionnaire ne pourra s’engager dans une politique libérale antisocial :
L’argument tiré d’une possibilité d’une politique libérale de Nida Tounes favorisant le capital est un argument fantaisiste qui ne peut que se retourner contre son auteur :
Aucun gouvernement dans la Tunisie post révolutionnaire ne pourra gagner les élections avec un  programme libéral antisocial ou appliquer une politique qui ne donnera pas la priorité aux régions et classes sociales les plus démunis.

 En revanche, le jour ou la gauche gouvernera ,vu l'état économique actuel du pays, elle n’aura pas d’autres choix que de faire appel aux pays libéraux et capitalistes pour trouver des investisseurs étrangers et accepter les conditions des bailleurs de fonds pour pouvoir créer des emplois pour les milliers de chômeurs, le peuple n’a que faire de la pureté révolutionnaire de Hamma Hammami qui serait, selon, ses déclarations, souillée par une évebntuelle alliance avec B.C.E.

Le Front populaire n’a pas à se soucier du social, l'UGTT qui avait encadré le peuple dans sa révolution, est plus forte que jamais pour  protéger les intérêts de la « classe ouvrière » ou des « Zouaoula".

Le conflit historique actuel est une guerre contre l'obscurantisme facho, la société tunisienne se révèle encore à l'époque pré-libérale, les libéraux et la bourgeoisie ont encore un rôle à jouer pour instaurer un état civil et démocratique garantissant les libertés publiques et individuelles, historiquement, ils ont joué ce rôle dans toutes les autres nations, pourquoi pas en Tunisie et pour mémoire il convient de se rappeler le rôle joué par  le vieux Destour.

Le vieux Marx enseignait que l’ouvrier est dépouillé  d’une partie importante de ce qui lui revient de son travail par le capital ou le capitaliste qui ramasse la cagnotte de la plus-value, tout en précisant que cela ne se produit pas par la méchanceté d’un capitaliste, mais par le système capitaliste du marché, lui-même, qu’il faut changer par la révolution.

L’exploitation est une logique du système capitaliste qui se résout dans le cadre d’un concept, la dialectique des « modes de production » et des « formations sociales », opérant historiquement par les luttes devenues réalité effective dans la cadre d’un Etat libéral pour résoudre la contradiction du système capitaliste.
La force d’attraction du projet marxiste est d’avoir donné de l’espoir à « ceux d’en bas » pour jouer un rôle actif dans l’histoire, leur histoire, vers le progrès de la condition humaine.

Le génie de Karl Marx c’est que le progrès n’inclut pas une simple espérance, mais une certitude « scientifique » de la dialectique de l’histoire des modes de production, le capitalisme triomphant du féodalisme, rend le socialisme inévitable et réciproquement, c’est le socialisme qui résoudra les contradictions du capitalisme.
Or, s’engager dans la voie de la rupture avec Nida Tounes, dans la Tunisie d’aujourd’hui, contre ce que Monsieur H.Hammami  désigne comme la classe des libéraux capitalistes, sans tenir compte de la réalité du pays, de l’Etat tunisien, qui n’exprime que le chaos, une économie de malfrats et de mercenaires, envahit par une horde salafiste et des prédicateurs prédateurs wahhabites,  relève d’un irréalisme et d’une vision dogmatique du cours de notre histoire.

La gauche serait mieux inspiré de l’originalité de la révolution tunisienne, qui surgissant comme une « excroissance » sur les frontières du monde capitaliste néolibéral, l’acte Bouazizien se déploie comme une saisie du monde en dehors de toute conscience de soi d’une classe de prolétariat, au sens du matérialisme historique marxiste, une révolte par un mouvement de l’être singulier et contingent pour reprendre contrôle comme moteur réflexe de survie, la dialectique de la représentation et du sujet générique était grippé, le navire de la révolution tunisienne a heurté les  rochers des figures du passé.

Il faudra tout d’abord sauver le navire tunisien avec les libéraux avant qu’il soit englouti dans l’océan obscurantiste.

C’est le rôle d’une gauche visionnaire de faire le premier pas pour chercher l’alliance avec Nida Tounes

Il y a urgence, c’est à la gauche éclairée par une vision historique de tendre la main aux destouriens républicains, de faire le premier pas vers NIDA TOUNES et rassurer le capital national garant du tissu économique et social par les opportunités de débouchés qu’il crée pour l’emploi et la promotion du produit national.

Nida Tounes vient de confirmer un programme d’une république socialisante, son alliance qui vient d’être signée avec EL Massar et EL Joumhouri donnent des garanties suffisantes pour ouvrir les voies du  dialogue entre tous les républicains patriotes.

Le rapprochement, voir l’alliance sur un minimum républicain devient possible dans le cadre d’une réactivation de l’initiative de l’UGTT, qui donnera autorité et crédit aux engagements des uns et des autres envers le peuple de plus en plus impatient de voir naître cette unité pour mener son combat contre une dictature islamiste rampante et qui ne cache plus son visage.

Maître Mohamed Hafayedh
 

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3 Commentaires
Les Commentaires
Mohamed Chaalala - 18-02-2013 16:10

Maitre hafaydh a totalement raison en conseillant H. Hammami d`oublier son puritanisme révolutionnaire et de le substituer par ce qu`on appelle le realpolitique. Les républicains de Nida Tounes ne peuvent que converger avec la gauche dans leur choix de politique sociale. La situation prévalent dans le pays ne laisse aucun choix a toutes les forces vives de la nation que de s’unir face à l`obscurantisme, à la violence, et aux dogmes obsolètes.

Chedley Aouriri - 18-02-2013 22:59

Pauvre Nidaa!! Bien triste est le sort du "Destour" s'il se trouve sans la situation ou les marxistes communistes qu'il a ferocement harceles et combattus, sont maintenant son unique espoir de survie. Habib Bourguiba -Allah Yarhamou- doit remuer dans son tombeau!!

MASSINISSA - 19-02-2013 09:17

Cher Maître, vous savez pertinemment que Hamma n'est pas dogmatique et le problème n'est pas BCE mais M. Ahmed Chebbi qui est obnibulé pour jouer perso et contrer la gauche. C'est lui qui a détruit le PDP pour renforcer Ettakatol et ouvert la porte à Nahdha. Une partie de Jomhouri et de Nidaa Touness sont pour une stratégie de coordination éléctorale avec le Front Populaire, même Mohamed Kilani doit faire un pas historique et se réconcilier avec ses origines. Lors des obsèques de CHOKRI il y avait la bonne orientation il faut transformer l'essai républicain, El Massar est certainement le mieux placé pour arrondir les angles, oui la gauche alliée aux républicains de tous horizons peut damer aux extrémistes intégristes de Ittijah Islami mode wahabo salafiste.

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