Opinions - 07.09.2019

Riadh Zghal: Le paysage politique est trouble, pourtant il va falloir voter

Riadh Zghal: Le paysage politique est trouble, pourtant il va falloir voter

On nous parle de charte éthique, de programmes, de conventions entre partis se réclamant d’une même tendance… Autant d’initiatives qui reflètent une tentative d’identifier et de reconnaître ce qui est commun et ce qui servirait l’intérêt général mais sans aller jusqu’à constituer des listes communes de candidatures aux élections législatives. Alors comment garantir le respect des engagements une fois les signatures apposées dans un contexte marqué par la défiance vis-à-vis des politiques, des syndicats et autres institutions, par l’opportunisme, l’acharnement à sauvegarder des privilèges, l’avidité de pouvoir… et d’immunité (chez ceux qui auraient tant de choses à se reprocher)?

Au-delà de ces variables du contexte s’agit-il de culture? Un journaliste algérien Ramdane Hakem avait écrit il y a peu  dans  Algérie patriotique : «Notre éducation traditionnelle nous prédispose à refuser de voir la part de vérité qui existe chez notre contradicteur car elle met en cause le caractère absolu de la part de vérité que nous portons. Ce faisant, nous nous condamnons non seulement à la violence, mais aussi à ne pas nous enrichir de ce que l’autre, l’altérité, nous apporte.» Cette réflexion s’applique bien à des Tunisiens qui se sont révélés maîtres dans la violence verbale !

Revenons à notre question : comment garantir le respect des engagements une fois les signatures apposées ? Cela demande non seulement éthique mais aussi méthode, soumission collective à des contraintes et suivi. C’est un processus de gestion de la collaboration hautement démocratique au sens ou rien ne se décide par « un leader attitré » mais par le biais de la participation de tous à la  définition des priorités et des contraintes acceptées.

Définir le « commun » aboutit à la formulation des objectifs à atteindre. Reconnaître les contraintes contribue à définir la méthode et les plans d’action auxquels devraient se soumettre les différents partenaires. Tout cela amène à se départir un tant soit peu de son ego, à admettre ses insuffisances, à mettre à profit ses points forts pour l’action collaborative. Cela semble le plus difficile pour ceux qui convaincus de l’impossibilité de la collaboration entre partis, qui fixent les points faibles de l’autre et consciemment ou inconsciemment se cachent les leurs, qui préfèrent la combine pour gérer la concurrence plutôt que la collaboration, qui glorifient leur approche et leurs réalisations sans pouvoir convaincre leurs détracteurs ni générer la confiance du peuple...
Malheureusement le discours dominant des différents partis repousse davantage de citoyens qu’il n’en attire. C’est à travers la brèche des oppositions entre partis multiples que s’est glissé avec un certain succès le populisme. Ce populisme qui promet monde et merveilles, est fortement soutenu par le syndrome de la « koffa » chez une population pauvre dont la base ne cesse de s’élargir.  Aujourd’hui que le dépôt des candidatures aux élections législatives a été achevé sans qu’il y ait à l’horizon de réelles velléités de coopération entre partis, on ose espérer qu’après les élections la dynamique de l’ARP sera davantage concernée par les intérêts de la nation. 

Néanmoins, on avait souhaité un sursaut raisonnable de la classe politique qui se dit démocratique et moderniste à l’occasion du dépôt des candidatures aux élections présidentielles pour mettre fin à son éclatement. On avait espéré qu’elle s’unisse enfin autour d’un sens partagé de l’intérêt général de notre pays et la reconnaissance des voies qui mènent à une bonne gouvernance  permettant d’assurer un avenir meilleur pour les jeunes générations. Cet espoir a été vite déçu par le flot de candidatures tous azimuts. Une fois encore, les ambitions personnelles et une surestimation des capacités individuelles des candidats et ceux qu’ils représentent à gouverner ont primé sur la volonté d’élaborer ensemble une vision qui mène à la sortie de crise. A l’approche des élections le paysage politique baigne dans le flou, illisible pour le citoyen qui souhaite éviter de voter sous l’effet des impressions, des émotions factices, de la propagande mensongère, de la manipulation médiatique notamment celle dont les ficelles sont tirées par l’étranger.

Il est du devoir pour les candidats qui se déclarent nationalistes, démocratiques, soucieux de l’intérêt du plus grand nombre surtout des démunis, des jeunes désabusés, des femmes violentées et soumises, de donner une lisibilité au paysage politique. Ils doivent se rencontrer, débattre, penser sur le long terme, oublier leur ego et s’entendre sur une vision politique puis sur un candidat sinon sur un nombre réduit de candidats qui est/sont les plus aptes et les plus sincères dans leur volonté de servir le pays. Les autres doivent se désister en sa/leur faveur tant qu’il est temps. Suffit la dispersion fondée sur les intérêts personnels et la surestimation de ses propres capacités! Le pays est en danger! Ce qui peut le sauver c’est la collaboration et la synergie des efforts de ceux qui sont réellement disposés à le servir. Le pays a besoin de politiques crédibles, compétents, efficaces, porteurs de valeurs qui les guident dans la gouvernance des affaires publiques.

Riadh zghal

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