Opinions - 25.01.2019

Monji Ben Raies: Le futur c’est demain, imaginons-le aujourd’hui !

Monji Ben Raies: Le futur c’est demain, imaginons-le aujourd’hui !

L’Intelligence artificielle (IA), comme toutes nouveauté, suscite des craintes et des méfiances dans la population et dans la communauté scientifique, car tous les choix sont possibles de créer une IA au service de l’humanité. Dans cette optique, certaines peurs peuvent être injustifiées, telles que le chômage, la transformation des métiers, accompagnés d’un phénomène de destruction créatrice, qui serait signe de dynamisme économique et social et de confiance des utilisateurs (particuliers, entreprises, administrations, etc.). L’IA, pourrait mener à des bouleversements à intégrer socialement, sur la manière de vivre des Hommes, mais aussi sur leur devenir, comme auparavant, le langage, l’écriture, l’imprimerie, l’industrialisation, la médecine moderne et les ordinateurs.

L’IA pourrait être à la base de l’Économie circulaire ?

Des scénarios plausibles font aussi bien état de l’extinction de toute vie intelligente sur Terre, que de l’avènement d’un futur post-humain amélioré. Les risques autant que les avantages potentiels sont analysés dans le but ultime de développer des stratégies et des politiques pouvant permettre aux sociétés et aux individus de faire face au futur. Les questions éthiques, voire morales, deviennent un enjeu majeur, en même temps qu’elle fait émerger de nombreuses nouvelles interrogations. Plus largement se pose la question centrale de l’acceptabilité sociétale de l’IA, aussi bien pour les salariés d’une entreprise ou de la fonction publique, que pour les usagers et/ou les citoyens. Jusqu’où sommes-nous prêts à aller dans l’automatisation des tâches ou des services, sachant qu’il existe un phénomène d’apprentissage et d’acculturation ? (En sociologie, l'acculturation, ou transport d'idées, désigne un processus par lequel un individu apprend les modes de comportements, les modèles et les normes d'un groupe, de façon à être accepté dans ce groupe et à y participer sans conflit.). Les technologies sont parfois en avance sur les usages et il est devenu complexe de cerner comment les utilisateurs vont se les approprier. Pour faire évoluer le degré de confiance, des facteurs tels que le contexte juridique, politique ou économique peuvent jouer. Dans ces domaines, le confort moderne a modifié les attentes des citoyens-individus-populations-clients. Les valeurs traditionnelles, telles que le prix et la fidélité envers des idéologies, des politiques ou des produits, sont délaissées au profit d’expériences de service ciblées. Pas à pas, l’IA, modifiera radicalement nos modes de vie, nos allégeances et affinités et notre conscience. Les économistes n’ont évidemment pas attendu, sachant que l’IA pourrait certainement être à la base de l’Économie circulaire. L’économie circulaire, un nouveau modèle économique fondé sur l’augmentation de l’efficacité de l’utilisation des ressources (matières, énergies, eau, sols) déjà exploitées ou qui circulent sur les marchés. En cours de déploiement en Europe et en Asie, des industriels et distributeurs s’en inspirent pour transformer leurs modèles de management, processus de production et leurs pratiques transactionnelles. Toutefois, la transition vers ce modèle économique suppose des défis majeurs, comme la collaboration entre les acteurs socio-économiques, et souligne le rôle central des consommateurs, pour la réussite de la transformation digitale. Or, les définitions conceptuelles, les stratégies, les modes de déploiement et de gestion, les instruments de mise en oeuvre, demeurent encore primaires et doivent être précisés, et les limites doivent être identifiées et explorées par simulations par exemple. Il est tout d’abord nécessaire, de Comprendre les fondements et les principes du modèle d’économie circulaire ; Connaitre les principales stratégies de circularité (ex. économie collaborative et de fonctionnalité, reconditionnement et re usinage, etc.) et comprendre leur potentiel et enjeux ; Explorer plusieurs modes de déploiement des stratégies de circularité à différentes échelles (territoire, filière et circuit, ressource, organisation, produits) ; Identifier les acteurs concernés par la mise en oeuvre de l’économie circulaire, leurs besoins, freins et leviers spécifiques ; Connaitre les principales lois, outils et ressources disponibles pour faciliter son déploiement (ex. lois et règlements, éco-fiscalité, analyse de flux de matières, écoconception, logistique inversée) ; Réfléchir aux pistes d’enrichissement de ce nouveau modèle économique. Cette nouvelle manière d’organiser les moyens de production, avec la convergence des mondes numérique et virtuel, impose de nombreux défis. Du dernier baromètre de maturité numérique sur la digitalisation des entreprises du pays et qui tient compte de plusieurs axes : l’infrastructure, les organisations, les processus et les flux d’information, ainsi que la stratégie, Il résulte que globalement, notre secteur industriel est en très mauvaise position ; il est en complète stagnation et ne connaît aucune évolution positive sur quasiment l’ensemble de ces axes, en particulier en matière de stratégie de digitalisation. La maturité numérique et technologique de notre industrie ne se traduit par aucun développement de technologies avancées, telles que l’intégration de la simulation numérique, la réalité augmentée, l’intelligence artificielle et la blockchain (technologie de transmission et de stockage d’informations, sécurisée, transparente et qui fonctionne sans organe central de contrôle, un registre décentralisé qui contient des informations, des données, des transactions, regroupées en blocs). L’intégration de ces technologies en Tunisie est encore quasiment inexistante. De nouvelles technologies arrivent en effet sur le marché : la 5G pour la téléphonie mobile, l’évolution du câble sans le recours à la fibre, l’internet des objets, etc. Toutefois, les parties prenantes du secteur économique sont dans un round d’observation, se demandant ce que les seconds peuvent leur apporter, tandis que les autres veulent savoir quels avantages ils vont en retirer.

Sept grands axes, afin d’aider et d’accompagner les PME tunisiennes dans leur structuration

L’écosystème de la Tunisie est constitué principalement de petites PME. La maturité numérique est dès lors moins grande que, par exemple, en Europe ou aux Etats Unis ou encore en Chine, où les entreprises sont de plus grande taille ou des multinationales et conglomérats. Actuellement dans le monde, une convergence vers des systèmes intelligents et interconnectés, permet le développement de nouveaux processus business à travers l'intégralité de la chaîne de valeurs: Recherches et Développement, production, logistique, marketing, ventes et services aux clients finaux. Celle-ci amène son lot de défis et la mise en place d’une culture et d’une stratégie de marketing digital pilotée par les données (Data-Driven). Or de nombreux départements au sein des entreprises tunisiennes travaillent encore en silos fermés. Il est donc primordial que les décisionnaires comprennent et saisissent, le plus vite possible, les opportunités liées à l’industrie digitalisée avec des dispositifs de marketing à la performance, afin d’en retirer un avantage concurrentiel et d’enrichir leurs offres clients pour les conquérir, les fidéliser et restaurer la confiance dans leurs produits (tunisiens). Le problème des données est effectivement important, mais Beaucoup d’entreprises, surtout parmi les plus petites, sous-estiment leur valeur. Il nous faut aujourd’hui adopter une vision plus systémique de l’organisation des données, de manière à pouvoir établir des connexions et croisements entre elles et générer ainsi de l’information supplémentaire, ce que peut facilement réaliser un pilotage par IA. Sept grands axes doivent être couverts, afin d’aider et d’accompagner les PME dans leur structuration. L’un de ces axes est le World Class Manufacturing : les sociétés doivent disposer d’équipements leur permettant de fabriquer leurs produits ou leurs services de manière efficiente. Cela signifie, non pas qu’elles doivent nécessairement disposer de machines dernier cri, mais bien, de mieux adapter ces équipements, compte tenu de ce que l’on veut développer. Il y a ensuite le Digital Factory, lié à l’importance de l’information numérique ; le Smart Factory, qui permet aux entreprises de travailler sur des infrastructures intelligentes ; le End to End Engineering, en vue d’orienter les entreprises vers un travail, non plus en séquence, mais en commun, afin d’être plus rapidement sur le marché ; l’Eco-production, dont l’objectif est de produire des biens et services consommant le moins d’énergie possible et qui soient recyclables de la même façon; la Network Production, visant à ce que les entreprises collaborent entre elles, pour être compétitives et faire face à la concurrence mondiale ensemble. Le dernier axe, sans doute le plus important, est le potentiel humain : quand on automatise une ligne de production, ce n’est pas pour supprimer de l’emploi, mais pour aider l’opérateur à effectuer un travail plus simple et moins pénible.

L’importance de la Formation de base et continue.

L’économie digitale suscite des interrogations, auxquelles notre pays n’avait pas eu à faire face jusqu’à présent dans les techniques d’apprentissage, que ce soit en formation initiale ou continue. Compte tenu de la rapidité de son évolution, toute technologie est très vite frappée d’obsolescence. En conséquence, il faut mettre en place, encore plus qu’avant, un système de suivi, qui améliore les compétences techniques et qui dote les individus de capacités d’apprentissage, de travail d’équipe et de prise d’initiative. Ces concepts de compétences-clés, dont on entend parler au niveau européen depuis 2006, doivent encore être développés dans nos entreprises, dans l’enseignement et chez les opérateurs de formations professionnelles. Actuellement, selon les statistiques, plus de 170 000 postes sont vacants rien que dans l’industrie technologique en Tunisie. Parallèlement, aucune des entreprises tunisiennes ne souscrit de formation, ni ne forme au numérique. Or, pour implémenter une transformation industrielle digitale, il est primordial d’impliquer le personnel dès le début du projet de transformation. En matière de formation, les responsabilités doivent être partagées entre les pouvoirs publics, les entreprises et les individus. Celles des pouvoirs publics se situent au niveau, des collectivités territoriales, national et des bassins d’emploi par région. Celles des entreprises varient selon leur type de métier, leur taille, leur structure organisationnelle, etc. Lorsque son segment d’activité est trop précis pour être pris en charge par les pouvoirs publics, l’entreprise se doit de mettre en place de nouvelles techniques pédagogiques, du coaching, de l’accompagnement. Au niveau des individus enfin, il est évident aujourd’hui que les gens devront apprendre toute leur vie, en raison de l’obsolescence accélérée des techniques et de leur constant renouvellement. L’obsolescence technique a évidemment un impact en matière d’emploi et de ressources humaines. Par exemple, les télécommunications ont connu une grosse vague de recrutement entre 1995 et 2000, lors du boom des réseaux mobiles à travers le monde. De manière générale, toute entreprise doit pouvoir suivre de telles vagues, en fonction des évolutions technologiques. Cependant, souvent, les sources se tarissent. En ce moment, la demande est très forte, par exemple, pour des ‘’data scientists’’, capables de gérer la collecte et le traitement de données, l’intelligence artificielle, les nouvelles normes en matière de sécurité et de confidentialité, etc. Le Data Scientist est Chargé de la gestion, de l’analyse et de l’exploitation des données massives au sein d’une entreprise ; ce métier est le résultat de l’évolution du Data Analyst à l’ère du Big Data. Il faut du personnel apte à gérer une complexité d’informations sans cesse croissante. Le défi du ‘’data scientist’’ est effectivement, d’être capable de mettre en place une gestion efficace des données, tant en matière de qualité que de quantité. Mais leur formation doit aussi être axée sur la compréhension des processus en entreprise. Par ailleurs, les techniciens industriels doivent aussi pouvoir acquérir des compétences en intelligences numériques. Compte tenu de l’extrême spécialisation nécessaire pour exercer cette profession, les opportunités d’embauche sont nombreuses et largement supérieures à la quantité de profils qualifiés. Il s’agit d’un poste à haute responsabilité, qui nécessite des prédispositions naturelles et une éducation de haut niveau. En complément des outils analytiques, il doit connaitre les méthodes de ‘’Machine Learning’’, comprendre leur fonctionnement, et savoir quelle méthode est la plus pertinente, selon la situation, pour la création de produits, dirigée par les données. Il est indispensable de savoir gérer des données non structurées, qu’elles soient de provenance des réseaux sociaux, ou encore des flux vidéo ou audio du web, et notamment de prendre en charge le développement d’un produit dirigé par les données ou le data logging, (enregistreur de données, dispositif automatique, voire intelligent et programmable, qui enregistre des valeurs de mesures individuelles et des séries de mesures sur une longue période, pouvant couvrir plusieurs mois. Les grandeurs en question, sont automatiquement mesurées, souvent numérisées et enregistrées sur un support. Elles peuvent aussi être transmises, par le biais d'une interface, à un afficheur, à un ordinateur muni d'un logiciel (pour visualisation et analyse), une imprimante, ou à un ordiphone intelligent. Ces données sont le principal challenge du Big Data, d’autant que plus de 40% des tâches effectuées par un ‘’Data Scientist’’ seront automatisées par intelligence artificielle, d’ici 2020.

En matière d’emploi, à l’horizon 2020, l’OIT projette une pénurie d’employables dans le domaine des nouvelles technologies intelligentes comme dans les T.I.C. Il est donc crucial de bien préparer nos étudiants et nos universités à cette réalité, tout en mettant aussi l’accent sur la formation continue des actifs en entreprise. Une autre piste à mieux exploiter est le renforcement des partenariats entre les secteurs, public et privé, en matière de formation-métiers. Enfin, en matière d’intelligence artificielle, la vision des ‘’majors’’ du domaine (comme Microsoft ou Google et Facebook), est de rendre celle-ci accessible à tous. Les entreprises doivent investir dans ce domaine, afin de continuer à innover et simplifier l’accès aux technologies de l’’’Intelligent Edge computing’’. Par ailleurs, notons que les entreprises recherchent des candidats parmi ceux qui ont suivi des études par envie, et non par peur de ne pas trouver de travail, car ils constituent d'excellents profils, n’étant pas formatés socialement et capables de faire face à la disruption sociétale qui s’annonce. Par conséquent, pour elles, les diplômes prestigieux et les parcours lisses constitueraient des inconvénients et freins, parce que souvent signes de profils réfractaires à la flexibilité et au changement (défaillance du ‘’Savoir-être’’). L’industrie digitale intelligente s’accompagne donc de créations d’emplois, ce qui est une bonne nouvelle en ces temps de crise économico-sociale. Toutefois, il ne faut pas oublier que des emplois vont également disparaître ou muter. Un opérateur machine, par exemple, ne peut plus, aujourd’hui, se contenter d’appuyer sur un bouton, sans savoir ce qui se passe après. Il devient pilote d’une ligne de production, avec une responsabilité sur la qualité du produit et/ou du service à fournir. C’est un défi énorme en matière de formation. En effet, ce qu’il faut dans l’industrie digitale, ce sont beaucoup plus de cerveaux et moins de bras. Cela nécessite un changement de culture des institutions de formations, entreprises et personnes impliquées dans les industries, notamment manufacturières.

Accompagner la mise en place de l’Industrie numérique intelligente

Pour accompagner la mise en place de l’Industrie numérique intelligente, il est nécessaire de regrouper les PME d’un secteur, de les conscientiser sur leur intérêt de se transformer et de collaborer dans l’environnement international dominé par la mondialisation. La dynamique en cours repose sur la création de démonstrateurs de deux types. Le premier est une chaîne de production intégrée : il s’agit de sensibiliser les entreprises, face à un outil regroupant les grands éléments de l’automatisation, de la robotisation et de la couche numérique intelligente. Mais cet outil intégré est encore à venir, même si certains de ses éléments existent, mais de façon dispersée et trop parcellaire. Le second type correspond à des réflexions en profondeur sur les processus, les produits et l’articulation des différents intervenants dans l’entreprise. Ce projet ne peut fonctionner que si l’ensemble des acteurs sont autour de la même table, en temps réel. La Tunisie compte aujourd’hui des petites entreprises qui ont parfois pu expérimenter des solutions vraiment innovantes, dans certains domaines et qui essayent de s’imposer à l’international. Aussi l’idée est-elle de modéliser et de porter leurs solutions dans un démonstrateur digital intégré.

L’industrie digitale, qui repose notamment sur les technologies de l'Internet des objets, ou IoT (Internet of Things) et /ou l’IA, permet aux entreprises d’optimiser leurs opérations et ainsi de réduire leurs coûts de production et de consommation énergétique, mais aussi de développer de  nouvelles offres clients en enrichissant leurs offres de produits. On estime que d’ici à 2025, au niveau mondial, 70 milliards d’appareils, objets et systèmes informatiques supplémentaires seront connectés. L'Internet des objets, est un scénario socio-économique, dans lequel les objets, les animaux et les personnes, se voient attribuer des identifiants uniques, ainsi que la capacité de transférer des données sur un réseau, sans nécessiter d’interaction humain-à-humain ou humain-à-machine. Au niveau des infrastructures, tout cela se traduit par la gestion de flux d’une masse de données, une demande de puissance de calcul très élevée et de stockage quasiment illimitée. Ceci n’est aujourd’hui possible que via le cloud, un outil très flexible et ne nécessitant aucun investissement à l’entrée.

Intérêt du développement d’une industrie numérique intelligente technologiquement assistée?

L’industrie des « temps modernes » de Charlie Chaplin telle qu’elle a existé est complètement révolue. Le modèle de fabrication de biens s’est tourné vers l’industrie de pointe, de précision, l’industrie dite 4.0, où le produit est personnalisé et réalisé quasiment à la demande du client, dans une chaîne de fabrication automatisée où les robots – et bientôt les imprimantes 3D remplaceront les ouvriers non qualifiés. Jusqu’à présent, la Tunisie n’a pas su saisir ce virage économique primordial. La chute de notre potentiel industriel est à analyser à l’aune de la diminution des effectifs apprenants dans l’enseignement technologique universitaire et la formation professionnelle. Les gouvernements successifs ont toujours fixé des objectifs quantitatifs d’obtention de diplômes, au détriment de la qualité ou du niveau des formations. Ces objectifs éducatifs ont nuit lourdement aux filières technologiques. Il s’ensuit des inadéquations importantes entre les besoins du milieu industriel et les compétences disponibles sur le marché du travail. Les jeunes ont des aspirations nouvelles : une employabilité rapide, une mobilité professionnelle facile, des projets de vie équilibrés et une prépondérance pour le travail en équipe. Ces aspirations peuvent toutes être contentées par les métiers technologiques et industriels. Revaloriser et rehausser l’image de l’enseignement technologique est une condition impérative au redressement de notre économie, qui a un besoin impérieux de moderniser son industrie et son outil productif. La promotion de l’excellence, des valeurs du compagnonnage, et des valeurs de l’industrie, sont des préalables à la transformation de cette image. Un enseignement technologique d’excellence suppose l’organisation de l’ensemble de la filière, avec un rôle moteur et innovant pour les écoles d’ingénieur et de management du fait de leur positionnement au coeur des technologies de pointe et de l’évolution des organisations, des compétences et des métiers, mais aussi de leur agilité qu’elles doivent mettre au service d’ensemble de l’enseignement réellement professionnel. Réussir la modernisation de notre économie, et notre entrée dans le monde du digital intelligent, est une affaire collective sociétale, qui nécessite une prise de conscience nationale et doit être portée par tous, des unités productives aux structures d’enseignement en passant par la société civile et celle politique et le citoyen. Cela commence par une véritable collaboration des différents opérateurs et parties prenantes : centres de recherche, centres de compétences, clusters, intercommunales, centres d'entreprise et d'innovation, organisations nationales, etc. Il en va de même dans la formation continue, où il faut décloisonner les acteurs. Le challenge des techniques d’intelligences artificielles, qui évoluent très vite, force réellement toutes les parties prenantes d’un secteur, à fédérer leurs moyens et à ne plus agir seulement au niveau d’une localité ou d’une région, mais, au minimum, au niveau d’un État, voire en s’ouvrant à des acteurs périphériques et internationaux.

Pour réussir une transformation économique 4.0, par l’innovation technologique, quatre points sont essentiels. Le leadership, qui doit adopter et porter une culture du changement, de la prise de risque, de la remise en question, de la réévaluation du business model, de la réinvention, etc. Les entreprises, doivent adopter une culture axée sur les données (traitement, capitalisation, gestion, décision, commercialisation) et élaborer leur stratégie par rapport à celles-ci (« data driven strategy »), car c’est finalement à partir de ces données, qu’une entreprise pourra développer sa stratégie différenciatrice et concurrentielle. Ensuite, elles doivent réfléchir en termes d’écosystème socio-économique ; chaque société devient une « software company », ce qui va lui permettre d’établir de nouveaux partenariats diversifiés, précédemment inimaginables, notamment grâce à l’environnement numérique et le cloud. Enfin, il faut avoir la volonté d’avancer vite, sans tergiverser, et de tester et lancer des projets de façon pratique et agile, en continu. Souvent, des entreprises qui annoncent vouloir se numériser ne le font pas, car soit le leadership ne suit pas, soit elles ont été trop gourmandes et ont établi des plans ambitieux, mais irréaliste. Le projet doit être transparent, géré étape par étape, et tout le personnel de l’entreprise doit être en mesure de pouvoir le suivre.

Monji Ben Raies
Universitaire, Juriste, Enseignant et chercheur en droit public et sciences politiques,
Université de Tunis El Manar, Faculté de Droit et des Sciences politiques de Tunis.

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