Opinions - 24.03.2014

Quand on continue à vouloir réinventer la roue ou faut-il croire à l'amnésie des dirigeants

C’est la politique de la feuille blanche qui refait surface encore une fois, comme si le pays n’a plus d’histoire ou que «l’amnésie volontaire»  gagne les politiques. Nous gardons encore en mémoire les différentes péripéties ayant conduit à l’élaboration de la constitution de la Deuxième République et les débats et les tentatives de remise en cause des acquis du peuple tunisien qui l’ont accompagnés. La constitution de 1959 avait été jugée incompatible avec l’esprit de la révolution. Le résultat fut un document qui s’écarte de peu, dans l’esprit et dans la lettre, de celui de 59 avec cette différence,un exercice de plus de deux ans ayant épuisé le peuple et un budget hors pair supporté par les contribuables actuels et ceux des générations futures.

J’écoutais la Première responsable de l’UTICA déclarer lors de la tournée du Premier Ministre au Golfe, avec l’air et le sentiment de la chose découverte, que les hommes d’affaires de ces pays seraient prêts à contribuer au financement de projets tunisiens à la condition que notre pays présente  des  listes de projets étudiés  dont la rentabilité serait établie et avérée.

L’histoire se répète vingt ans plus tard. Cette réaction, nous l’avions relevée au milieu des années 90 et nous nous étions mis, alors, à dresser les listes de projets dont la Tunisie présentait un avantage comparatif ou mieux compétitif. Loin des politiques, nous avions procédé à un balayage de toutes les opportunités qui pouvaient constituer les forces d’élan pour l’attrait des I.D.E. des pays du Golfe. Pour la conduite de cette mission, nous nous sommes appuyés sur  la source principale et intarissable des banques de développement en ce qu’elles avaient développé des études poussées de projets bien identifiés et qu’elles se présentaient, par ailleurs, comme une courroie de transmission incontournable entre les hommes d’affaires des deux régions.

Aujourd’hui, force est de constater que les hommes aux commandes du pays veulent réinventer la roue et emprunter la stratégie de la feuille blanche avec l’handicap de l’absence du levier principal de l’investissement privé, la banque de développement qui fut sacrifiée pour des motifs peu convaincants. Je dirai simplement que presque tout a été inventé, découvert et essayé et qu’il suffit de revenir aux archives et aux hommes qui ont réalisé et vécu cette histoire pour faire les raccourcis et les économies de temps et d’argent qui s’imposent.

La Tunisie a toujours besoin des hommes et des femmes qui sont acquis à sa cause. L’âge, l’appartenance et encore moins l’alliance ne sont pas les critères universels du succès. On ne peut bâtir en méconnaissance de l’histoire. Le déni de l’œuvre du passé ou du prédécesseur ne fera pas de son auteur un héros. Il conduit à détruire le présent et les chances d’édifier l’avenir. Je constate, avec beaucoup d’amertume que cet exercice devient un «sport national». Il faut savoir que chacun porte en lui une part de son passé, de son présent et son futur en fera certainement un certain passé. Nous sommes tous soumis à cette loi sacro-sainte de l’évolution, et personne ne saura ni ne pourra y échapper. Tentons, donc, ensemble de tirer profit de l’expérience de nos ancêtres et de nos prédécesseurs, le respect sera général et le bénéfice ne sera que plus grand.

Abdelmajid Fredj

Tags : Constitution   Tunisie   utica  
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9 Commentaires
Les Commentaires
Amel - 25-03-2014 11:55

Le déni de l'autre et l'ingratitude pour se faire une place au soleil est le propre de l'opportunisme. Même si ça paie ce n'est pas pour longtemps.

Ancien banquier - 25-03-2014 15:13

Pour faire avancer l'investissement direct étranger, il faut beaucoup d'expérience dans les projets mais aussi dans les pays et les hommes. Les banques de développement avaient cette expérience. Pourquoi ne pas créer un entité qui regroupe le monde ayant vécu l'histoire mais aussi ceux qui ont de nouvelles idées, CE n'est une offense pour personne et le pays gagnera.

Monia - 25-03-2014 17:43

Je souscris aux deux derniers § de l'article. Nul n'est indispensable, mais on a toujours de plus petit que soi. Les oeuvres, les grands travaux sont réalisés grâce à la conjugaison et à la participation de tous, Ce que l'on observe aujourd'hui en l'absence d'autorités régionales, la tête de la pyramide s'entretient et converse uniquement avec les chefs politiques, et même l'ANC n'a aucun contact avec les citoyens.En octobre 2013, le taux de participation a été inférieur à 50%. Parmi ceux qui ont voté, le tiers n'a été concerné que par souci matériel. Au total, 1/3 de la population totale tunisienne uniquement a voté par conviction politique. En conséquence, les politiques ne représentent que ce tiers. Avec l'accumulation des déceptions, même cette frange s'est certainement contractée et pourrait ne plus représenter que le1/4. Continuer à diriger par référence à cette masse et ne dialoguer qu'avec leurs chefs me parait perdre de vue l'intérêt général de la Tunisie et des tunisiens.Il faut trouver le moyen d'élargir les débats et créer des cercles d'échanges pour que l'essentiel des avis et surtout les plus pertinents arrivent à percer, à monter et ainsi trouver l'écho.

SBS - 25-03-2014 19:07

Si je me réfère aux débats d'alors, les banques de développement ont été converties ( le mieux c'est d'employer le terme dissoutes) en banques commerciales car on pensait que le nombre de banques en Tunisie est élevé et que leur taille est petite. En fait, le nombre n'a touché que de deux banques, et le résultat, l'investissement souffre aujourd'hui de deus grands maux : la faiblesse des fonds propres et la rareté de projets identifiés et jugés viables et bancables. Sur un plan général, le fait d'attendre des mois pour bénéficier d'un financement d'exploitation ou d'investissement, nous conduit à affirmer que la banque est encore un MONOPOLE. Ceci exige la libéralisation de la licence d'établissement d'un banque et ceci doit continuer jusqu'au jour où c'est la banque qui doit courir derrière le client.

PATRIOTE - 26-03-2014 00:52

Ils sont plutôt pédants et prétencieux qu'amnésiques en ce qu'ils pensent qu'ils sont les seuls à détenir la vérité de la chose et n'ont besoin de personne pour suggérer des solutions. S'ils ont été qualifiés de ministres ultra-diplômés, ceci ne peut qu'attiser leur prétention ce qui crée en eux un complexa de supériorité qui les conduira vers leur échec personnel. J'espère me tromper et il est toujours temps de se ressaisir.

Mohamed Chebbi - 26-03-2014 03:14

Très bonne analyse monsieur !

SADIK - 27-03-2014 02:09

L'histoire, d'une façon générale, est remplie de succès mais aussi d'échec. En économie, le monde a évolué et évoluera toujours selon les expériences vécues, adaptées aux cas spécifiques des pays concernés. Faisons l'effort de synthèse du vécu et évitons les causes des déboires, nous arriverons à frayer notre propre chemin du succès. Ceci ne peut s'acquérir qu'à la vertu d'un dialogue apolitique. Cet échange de vues entre les tunisiens, dans tous les domaines, est malheureusement absent, il faut tout simplement l'instituer. De quelle manière. Les dirigeants sont les seuls initiateurs de cercles ou conseils ou tribunes de réflexion. Qu'ils fassent preuve de plus d'ouverture et de réceptivité et le bon peuple sera content et les frictions seront tout bonnement levées.

A.L. - 27-03-2014 16:50

Que voulez vous, il faut tout faire pour avoir une place au soleil, ceux qui sont au pouvoir l'ont bien compris. Mais la vie nous renseigne que rien n'est immuable ni éternel, seul le travail et la générosité du coeur demeurent. Que Dieu protège notre Patrie.

Citoyen - 29-03-2014 02:21

Pour son jeune âge et sa première mission officielle en compagnie d'un chef de gouvernement, il faut lui tolérer son engagement pour une sortie de crise et un effort d'attirer les investissements en Tunisie. Les propos doivent néanmoins être adressés aux autres responsables, ceux qui affichent bcp de suffisance alors qu'ils sont vides...d'expériences.

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