News - 11.01.2009

Moins de pression fiscale, tout pour la relance

Vigilance accrue en ces temps de crise, avec une maitrise rigoureuse des équilibres globaux, soutien des entreprises fragilisées, relance économique, et confirmation de l’ancrage social du développement: telle est en bref la stratégie adoptée par le gouvernement tunisien à travers le budget de l’Etat pour l’année 2009 et du plan de redéploiement, comme souligné par M. Rachid Kechiche, ministre des Finances. Réduire l’encours de la dette publique sans plomber la croissance, gagner sur le service de la dette pour financer l’indispensable compensation, alléger la pression fiscale et œuvrer pour l’élargissement de la base des contribuables, poursuivre l’augmentation des salaires pour garantir l’évolution du pouvoir d’achat et soutenir la demande, comprimer, sans excès, les services des moyens (frais de gestion de l’administration) et, surtout, concentrer l’effort sur la création d’emplois, de valeur ajoutée et de croissance. Une véritable quadrature du cercle que doit accomplir la trilogie capital, travail et confiance, essence de toute économie.

Les questions qui se posent sont aussi variées que pressantes : les méga-projets seront-ils hypothéqués par la crise ? Le budget voté prévoit-il les crédits nécessaires pour honorer les engagements en infrastructures ? Le prix des produits de base sera-t-il augmenté ? Comment éviter la hausse des matériaux de construction, surtout le fer, et aider les importateurs qui en ont souffert ? Pourquoi le prix des carburants ne baissent pas ? A combien s’élève la fraude fiscale et comment poursuivre les récalcitrants? Lier la restitution de la TVA à un contrôle approfondi n’est-il pas dissuasif ? Pas de question taboue. Le débat est franc, contradictoire parfois, courtois toujours. Le ministre accepte d’être relancé et de préciser davantage sa réponse, prenant tout le temps nécessaire, pendant plus de 2 heures d’échanges fructueux.

En ré-ouvrant les comptes de la Nation à la presse et l’invitant à en débattre, le gouvernement accomplit un pas significatif pour réduire le déficit de communication publique, surtout en matière de finances, sujet certes peu facile à comprendre pour les non-initiés, et expliciter plus clairement ses choix et son action. L’opinion publique la plus large gagne en effet à prendre davantage conscience des enjeux et stratégies, pour pouvoir se prononcer et se mobiliser. Il faut le reconnaître que le ministre Kechiche, fort de son expérience d’enseignant à l’ENA, comme de sa longue pratique des débats parlementaires et des réunions populaires, parvient à bien clarifier les concepts, sans profusion de chiffres, alambiqués. A la transparence des indicateurs, et au souci de partager les vrais interrogations, même celles qui demeurent encore en cogitation, s’ajoute un parler vrai persuasif qui accroit, en outre, la force d’interpellation sur tant de questions vitales.

En introduction, le ministre a passé en revue les agrégats des 4 années précédentes, avant de rappeler les fondamentaux du budget 2009, les dispositions de la loi de finances et les mesures présidentielles, conjoncturelles et structurelles prises, une semaine avant la fin de l’année, le 23 décembre 2008. Synthèse, et non verbatim chronologique, riche en révélations.

Mega-projets : les données actuelles n’indiquent aucune remise en cause. S’il est vrai que l’ampleur de la crise internationale incite certains à reconsidérer leurs projets et reprogrammer leurs investissements en tirant leçon des risques engendrés par des investissements uniquement financiers et spéculatifs dans certains secteurs et zones n’offrant pas toutes les garanties, les promoteurs engagés en Tunisie apprécient le climat de sérieux dans le pays, la stabilité et les incitations à même de réunir les conditions de réussite. Les préparatifs avancent bien. Il ne faut pas oublier que les phases d’études exigent des délais nécessaires à l’approbation des masterplans et des plans détaillés ce à quoi s’emploient les différentes équipes et nos propres services techniques. Quant à nos engagements en termes d’infrastructures, nous avons pris en considération, lors de l’élaboration du budget de l’Etat pour l’année, les prévisions de réalisation et alloué les crédits appropriés, en se donnant la souplesse nécessaire pour pouvoir reclasser les priorités selon les exigences et dans la cohérence générale des équilibres. Nous avons tous intérêt à voir les chantiers accélérer leur rythme afin de subvenir aux impératifs de croissance et d’emploi.

Coût de la compensation : la part dans le budget de l’état consacrée à la compensation est passée de 6.5 % en 2004 à 16 % en 2008. C’est ainsi que durant l’année écoulée, le montant consenti s’est élevé à 2036 MD, contre 1281 MD en 2007 (+59%). Les produits de base viennent en première position avec 1048 MD. La dernière actualisation effectuée cette semaine, sur la base des factures effectives, portent ce montant au chiffre de définitif de 1123 MD. A noter que 98% des produits bénéficiaires sont les pâtes, couscous, huiles végétales, etc. Le prix  mondial de la tonne de blé est monté de 190 $ à 894 $. Aussi, et par mesure de sécurité alimentaire, nos besoins sont déjà achetés pour couvrir les 9 premiers mois de l’année, ce qui n’autorise en termes de charges, aucune économie. Malgré tout ce poids budgétaire, aucune hausse des produits de base n’est envisagée. La compensation a été respectivement de 806 MD pour les carburants et 182 MD pour le transport. « Hamdoullah », cette lourde charge de la compensation a pu être assumée, grâce à l’économie réalisée sur le service de la dette dont la part des dépenses de l’Etat se réduit pour baisser de 34,4% en 2004 à 28.2% en 2006 et 21% en 2008. Les 13 points gagnés sont donc utilement réemployés.

Carburants : Flambant au taux d’enfer, le prix du baril a été hallucinant. Baissant à des niveaux très bas, il garde un goût amer, puisqu’il induit ralentissement économique et pénalise nos exportations, aussi modestes soient-elles. Nous avons retenu pour le budget de 2009, l’hypothèse d’un prix de 90$, au taux de 1D350 le $. Personne aujourd’hui ne peut prédire avec exactitude comment se comportera le prix du baril durant l’année 2009, sachant qu’une grande baisse ne saurait être positive que si elle n’est pas synonyme de fléchissement économique, sans graves conséquences. Certes nous sommes producteurs d’une partie de nos besoins en pétrole. Mais nous continuons à en importer (55% en essence et 75% en fuel). Aussi, il faudrait distinguer dans l’évaluation des incidences, la balance commerciale où figurent toutes les exportations, y compris celles effectuées par les compagnies internationales opérant en Tunisie et celle des paiements. Les analystes estiment que le prix moyen du baril se situerait cette année autour de 70$. Notre effort de compensation des carburants sera encore indispensable. Porté actuellement à 806 MD (contre 203 MD en 2004 et 450 MD en 2007), nous espérons pouvoir le contenir pour le réduire à 650 MD. Des aménagements spécifiques ont été consentis en faveur de certaines activités, comme récemment pour la pêche et nous garderons la question sous grande vigilance. A la pompe, ni hausses vertigineuses, quitte à procéder à quelques baisses, les prix en Tunisie demeurent parmi les plus bas dans les pays de référence.

Restitution de la TVA :
S’agissant de deniers publics, les vérifications sont légitimement de rigueur. Mais dans la célérité. Une première avance de 35% et un délai raccourci à 7 jours pour certaines catégories (sociétés exportatrices). Un indice révélateur : la valeur des montants restitués est passée de 65 MD en 2005 à plus de 200 MD en 2008.

Fraude fiscale : Indiquer un taux précis, consisterait à reconnaître l’identification exacte des fraudeurs et des montants soustraits. Ce qui est pris en considération, c’est plutôt le taux de dépôt de déclarations, qui peut paraître bas. Mais, le nombre, à lui seul, ne donne pas un véritable indice de l’ensemble de la contribution fiscale. Quelques centaines d’entreprises procurent plus de 60% des contributions. Et puis, certaines activités, de par la non maitrise de leurs chiffres d’affaires, ne favorisent pas une déclaration effective. La démarche consiste à éviter tout arbitraire à l’égard du citoyen, mais aussi contre les recettes de l’Etat, sachant que les profits d’aujourd’hui feront les investissements de demain et nous souhaitons qu’ils aillent à la création d’emplois. Dans chaque cas, nous procédons aux vérifications sur la base de preuves et non de présomptions et nous offrons toutes les conditions de recours. Notre crédo est clair : moins de pression fiscale, plus de contributeurs, dans la souplesse, la compréhension et l’esprit citoyen et solidaire.

Plan de relance :
Un suivi attentif de l’évolution de la crise a été déclenché dès le mois d’août 2008 et une série de mesures judicieuses ont été prises depuis lors, notamment, le 23 décembre 2008. Conçues à un double niveau conjoncturel et structurel, elles s’emploient d’une part, à soutenir les entreprises pouvant être exposées aux répercussions internationales et d’autre part, à relancer l’activité économique et encourager les secteurs de relai ce qui témoigne d’un signal fort donné aux opérateurs économique. La grande spécificité de cet effort, c’est qu’il repose entièrement sur un coût budgétaire et non financier.

Les crédits alloués sont substantiels, avec 150 MD pour le soutien. La relance bénéficiera en direct de 350 MD, mais en fait, également, de pas moins de 3700 MD sur les 3900 MD prévus dans le titre 2, à travers l’intensification des investissements publics et le lancement de grands travaux, générateurs de commandes et d’emplois pour le secteur privé. Les délais de paiement pour les marchés publics sont raccourcis, l’augmentation de capital de la BFPME et de la Cotunace, s’inscrivent dans cette stratégie de relance, tout comme la prise en charge par l’Etat de  50% du coût d’assurance dû au titre des contrats d’assurance des exportations des entreprises exportatrices, deux points du taux d’intérêt des crédits résultant des opérations de rééchelonnement au profit des entreprises exportatrices ayant subi un retard dans le recouvrement de leur droit provenant de l’export ou un ralentissement de leur activité et encouragement des institutions de crédit à soutenir ces entreprises, la réduction du taux de risques de change afin d’inciter les entreprises à se servir des lignes de financement extérieures et notamment celles relatives à la restructuration financière et à l’économie d’énergie. A cela s’ajoute la mise à la disposition de la Société tunisienne de garantie d’une ligne de garantie de 25 MD au titre de préfinancement des exportations et mobilisation des créances nées sur l’étranger, l’élargissement du Famex 2 en réservant un crédit de 10 MD en vue d’inclure 200 nouvelles entreprises au cours de l’année 2009 qui s’ajouteront aux 800 entreprises qui en bénéficient actuellement, en attendant le démarrage du Famex 3 et l’allocation d’un crédit de 8 MD pour le règlement des dossiers en suspens, dans le cadre du Fonds de promotion des exportations au titre des années 2007 et 2008.

Cotunace : L’augmentation du capital est votée. Et il est envisageable de recourir à la sélection d’un partenaire stratégique à même de contribuer à son développement.

BFPME :
En doublant son capital pour le porter à 100 MD, c’est, grâce au coefficient multiplicateur, 300 MD de financements complémentaires qu’elle sera ainsi en mesure de mobiliser. Un impact direct sur les PME et la création d’emplois.

Nouvelles introductions en Bourse :
les efforts redoubleront. D’ores et déjà, la société des Ciments de Bizerte et la Société Nationale de Distribution du Pétrole (SND) sont bien avancées.

Salaires : les salaires des agents de l’Etat (80% des dépenses ordinaires) ont atteint 5866 MD en 2008 (+10%). L’augmentation salariale qui sera servie totaliser 14,3% durant les 3 prochaines années, à un rythme annuel de 4,7%, sans compter les avancements. Cette augmentation régulière, traduit la vocation sociale et contribue sans nul doute à la préservation du pouvoir d’achat et la stimulation de la demande intérieure.

Moyens des services (véhicules, carburants, etc.) : ils ont été comprimés à 661 MD, n’augmentant que de 4% seulement.

Recrutements dans le secteur public : le nombre de nouveaux emplois budgétisés pour l’année 2009 pourraient atteindre 16 000 emplois.

Deux grands indicateurs majeurs pour le budget 2009 : sur un total de 17 206 MD, les dépenses de compensation s’élèvent à 2592 MD et celles de développement sont portées à 3900 MD.

 

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1 Commentaire
Les Commentaires
Bensassi - 14-01-2009 12:34

Ce résumé de la situation economique de notre pays a la veille d'une crise qui va frapper nos principaux partenaires est trés eloquant quant aux mesures annoncées pour relever les defis engendrés par la conjoncture mondiale. J'ai cependant une question dont je souhaitrais bien une reponse et une explication:pourquoi notre economie réalise-elle une croissance economique de 5% depuis l'independance en continue(ou presque)quelque soit le modele economique adopté,et quelle que soit la conjoncture mondiale? Par ailleurs comment expliquer que les salaires augmentent sans qu'il y est augmentation du pouvoir d'achat pour la classe moyenne? il y a certainement un malentendu sur le taux de l'inflation annoncé dans l'article;ce taux s'il se référe à ce qu'on appelle communément le couffin de la ménagére il ne refléte poit l'inflation pour la classe moyenne auquel cas le pouvoir d'achat de cette derniére est tiré vers le bas et au bout de quelques années la Tunisie risque de perdre le principal acquis de sa politique de développement a savoir cette classe moyenne. Sans etre economiste je crois que c'est la politique inverse c'est a dire augmenter les salaires sur la base d'un taux d'inflation qui concerne les revenus moyens qui peourrait a la fois tirer les bas salaires vers le haut et consolider le pouvoir d'achat des revenus moyens afin de relancer la consommation interieure surtout en cette période de crise internationale;on pourrait aussi diminuer certains impots et taxes pour consolider le pouvoir d'achat .A titre d'exemple on ne comprends pas pourquoi on augmente la redevance l'ERTT avec l'augmentation de la facture de la STEG?

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