News - 11.03.2019

Les quatre inadmissibles de Caïd Essebsi : L’appareil sécuritaire, le camp de Regueb, l’Etat d’urgence et la catastrophe des nourrissons décédés (Vidéo et Photos)

Les quatre inadmissibles de Caïd Essebsi : L’appareil sécuritaire, le camp de Regueb, l’Etat d’urgence et la catastrophe des nourrissons décédés

Visiblement très remonté contre quatre faits majeurs qu’il considère importants pour la sécurité nationale, le président Béji Caïd Essebsi s’en est publiquement ouvert prenant les Tunisiens à témoin. Ouvrant la réunion du Conseil de Sécurité nationale (CSN), il a vivement déploré les atermoiements de l’ARP à examiner le projet de loi sur l’Etat d’urgence, le manque de diligence dans l’enquête sur l’appareil sécuritaire secret, l’absence de suivi dans le traitement de l’affaire du ‘’camp d’enfants’’ de Regueb et le décès de nourrissons. Quatre dossiers clefs dont il fait personnellement son affaire et pour lesquels il exige une suite utile et dans les plus brefs délais. Outre les membres de droit du CSN, la nouvelle ministre de la Santé, par intérim, Sonia Ben Cheikh, et le ministre auprès du chef du gouvernement chargé des relations avec les institutions constitutionnelles, la société civile et les droits de l’homme, Mohamed Fadhel Mahfoudh, ont pris part à la réunion, et on saura pourquoi.

Le président de la République a révélé que ‘’ne voulant pas se mettre en violation de la constitution au sujet de l’Etat d’urgence, il a pris l’initiative d’en saisir par écrit «contrairement à mes habitudes», soulignera-t-il, le chef du Gouvernement et le président de l’ARP. Encore plus, il les a prévenus qu’il ne procèderait plus à l’avenir au prolongement de l’état d’urgence dont la date butoir arrivera à échéance le 4 avril prochain.

Evoquant la démission du ministre de la Santé, il a salué son acte, en homme imprégné du sens de l’Etat, et en a profité pour glisser : ‘’La continuité de l’Etat exige qu’il y ait ceux qui partent et ceux qui les relèvent. J’espère avoir été clair et je suis prêt à le répéter si nécessaire. Mais, je crois que c’est bien compris. Nous ne voulons pas que la Tunisie soit tributaire de personnes, quels qu’ils soient, chefs ou administrés.’’

En sept minutes, sur un ton ferme et décidé, comme l'a montré la vidéo mise en ligne par la Présidence, le président Caïd Essebsi a été très direct dans ses messages adressé au gouvernement et au parlement, ne se privant pas de lancer des fléchettes codées et répétant : « Si cela n’a pas été compris, nous devons le faire comprendre comme il se doit. » 

Verbatim, traduction non-officielle.

Béji Caïd Essebsi :

Je souhaite de prime abord rappeler que la réunion du Conseil de sécurité nationale a suscité des interrogations nouvelles ou renouvelées de la part de certains, qu’il s’agisse d’hommes politiques ou d’hommes du pouvoir. Cette réunion était programmée pour la semaine dernière. Mais à la demande de M. le chef du gouvernement qui avait des engagements que nous comprenons, nous l’avons reportée à aujourd’hui.

Youssef Chahed :

On nous a prévenus juste la veille, alors qu’on aurait dû en être avertis deux semaines à l’avance.

Béji Caïd Essebsi:

La question n’est pas là ! Nous pouvons même le faire un mois avant.

Il y a un problème dans la compréhension du rôle des institutions.

Le ministre de la Santé publique nous l’avions invité auparavant lorsqu’il s’agissait de la pénurie des médicaments. Il s’était présenté - et qu’il en soir remercié - et exposé la situation.

La continuité de l’Etat exige qu’il y ait ceux qui partent et ceux qui en assurent la relève 

Il y a une question inscrite à l’ordre du jour relative à l’Etat d’urgence. Et c’est pourquoi nous avons invité le bâtonnier (ndlr : Mohamed Fadhel Mahfoudh, ministre auprès du chef du gouvernement chargé des relations avec les institutions constitutionnelles, la société civile et les droits de l’homme).

Un fait nouveau qui vient de survenir : le décès de ces anges nouveaux-nés.

Nous œuvrons pour faciliter le fonctionnement des rouages de l’Etat, quelles que soient nos propres idées. Je ne cesse de le rappeler, je m’appelle Béji Caïd Essebsi et j’ai mes propres idées. Ceux qui me connaissent le savent. Maintenant, je suis président de la République. Je n’ai pas à faire prévaloir mes idées, mais ce qui renforce l’Etat et rassemble ses rouages.

La sécurité nationale ne se limite pas aux questions de sécurité (police) et de défense. C’est un concept global.

Le fait nouveau enregistré ces jours-ci ne relève pas du ressort du ministre de la Santé publique. Je me dois, à cet égard, de le saluer avec considération pour avoir démissionné. C’est un acte qui émane d’une personne animée du sens de l’Etat. Il n’assume pas personnellement une responsabilité directe (dans ce qui s’est passé). Mais, il a estimé qu’il est de son devoir, au titre de la responsabilité publique de remettre sa démission. Ce faisant, il aura contribué à créer un climat positif qui atténue la tension. Nous le saluons.

La continuité de l’Etat exige qu’il y ait ceux qui partent et ceux qui en assure la relève. J’espère avoir été clair et je suis prêt à le répéter si nécessaire. Mais, je crois que c’est bien compris.

Nous ne voulons pas que la Tunisie soit tributaire de personnes, quels qu’ils soient, chefs ou administrés. Nous ne cessons de rappeler que nous avons un Etat qui remonte à 3000 ans. Les hommes passent, les gouvernements passent, mais l’Etat demeure. C’est notre mission que de le préserver comme s’y étaient employés nos prédécesseurs.

Il y a quelques questions que j’aimerais évoquer.

Etat d’urgence, ne comptez plus sur moi, l’ARP doit se prononcer

Le projet de loi sur l’Etat d’urgence. Je suis de ceux qui avaient signalé à M. le chef du Gouvernement de la nécessité de mettre fin à la situation actuelle. C’est pour cela que nous avons élaboré un projet de loi qui a été examiné et adopté par le conseil des ministres et que le gouvernement a soumis à l’ARP, il y a de cela quatre mois. Nous sommes en train de décréter l’Etat d’urgence selon un vieux décret de 1978. La nouvelle constitution a indiqué que ses dispositions sont anticonstitutionnelles et qu’une loi organique appropriée est indispensable. 
Pour faciliter le travail du gouvernement, nous nous sommes trouvés dans l’obligation de continuer à agir selon les dispositions du décret en vigueur qui est pourtant anticonstitutionnel. J’ai dû y consentir pour ne pas faire obstacle à l’action du gouvernement et plutôt le faciliter. Mais, il paraît que cela n’a pas été compris.
Si cela n’a pas été compris, nous devons le faire comprendre comme il se doit.
J’ai mis en garde le gouvernement contre (la situation).
Des membres du gouvernement, les ministres de la Justice et de la Défense sont venus me voir et m’ont convaincu de la nécessité de continuer à m’appuyer sur les dispositions dudit décret en attendant l’adoption de la nouvelle loi organique.
Mais, à l’évidence, l’ARP s’est attardé dans l’examen du projet de loi. J’en ai alerté le chef du Gouvernement et le président de l’ARP que c’est pour la dernière que je procèderai à la prorogation de l’Etat d’urgence. Je l’ai déjà fait plusieurs fois, jusque-là, jusqu’à ce que cela devienne vidé de tout sens. 
La question est que ce projet de loi, est prêt, adopté par le gouvernement et transmis à l’ARP depuis quatre mois. Si l’ARP, pleinement souveraine en la matière, éprouve, pour des raisons qui la concerne, des difficultés à l’adopter, la question n’est plus de la responsabilité du président de la République, mais du ressort du chef du Gouvernement et de l’ARP. Et, c’est l’ARP qui y est habilitée à exercer son contrôle sur le gouvernement.
Contrairement à mes habitudes, j’en ai saisi par écrit le chef du Gouvernement, lui indiquant que je ne saurais me mettre en violation de la Constitution. J’ai également écrit au président de l’ARP pour lui dire que d’ici le 4 avril (2019, échéance du prolongement actuel de l’Etat d’urgence), il ne faut plus compter sur moi pour continuer à le faire.

Appareil sécuritaire clandestin : Nous devons prendre position

Une autre question qui, à mes yeux, relève de la sécurité nationale : l’appareil sécuritaire clandestin. Nous l’avions déjà évoquée au sein du CSN. Nous voyons tous les jours des prises de paroles dans les médias, avec mention de documents, et multiplications d’allégations. J’estime nécessaire de prendre position. Il ne s’agit pas de constituer une justice parallèle en charge de l’affaire en question. Mais, à voir la justice devenir la cible d’attaques et faire l’objet de remise en cause, nous risquons de nous retrouver dans une situation redoutable. Nous ne pouvons continuer à laisser se propager auprès de l’opinion publique un sentiment de problème (non-élucidé). Nous devons prendre position.

Le camp de Regueb : On ne peut pas dire, ça y est, c’est pardonné et clôturé

Il y a aussi ce qu’on appele le ‘’camp’’ de Regueb. Le sentiment général est que l’affaire a été close, même si le coupable a été condamné à un an de prison, mais pour d’autres raisons dans une autre affaire. Cette question est cœur-même des attributions du CSN. Ce qui s’est passé est inadmissible et on ne saurait accepter qu’il soit couver comme si de rien n’était. L’opinion publique est perplexe. Qu’est-ce qui a été fait : ils ont emmené les enfants dans un centre à Hammam-Lif puis les ont remis à leurs familles. C’est compréhensible, car jusqu’à quand peut-on les y garder. Mais, et après ? Rien ! Dieu seul le sait ! 
C’est inadmissible car c’est beaucoup plus grave. Lavage de cerveau, endoctrinement et nous savons dans quel état étaient ces enfants... On ne peut pas dire, ça y est c’est pardonné et clôturé. Je ne crois pas qu’il est dans l’intention du gouvernement - ou d’autres - de fermer le dossier. Mais, en politique, c’est la perception qui est importante. Les gens croient que c’est clos et ce n’est pas possible. Il faut aller jusqu’au bout.

Et ces anges nourrissons décédés

Il y aussi cette question de nourrissons décédés. On me dit que Mme la ministre de la Santé a tenu ce matin une conférence de presse et donné des explications...
(Fin de la vidéo diffusée par la Présidence de la République)
 

 

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