News - 08.03.2013

Jellal ben abdallah

Que Jellal Ben Abdallah m’autorise à écrire un ouvrage d’art à son propos - qui plus est financé sur ses propres deniers - alors que je suis médecin en étonnera certainement plus d’un ! Il s’agit là d’une des nombreuses décisions à contre-courant que l’artiste prendra au cours de sa carrière mais pour ma part, quoi de plus naturel que de porter un regard neuf sur le travail d’un peintre qui lui-même est artiste autodidacte !

L’art et la science sont ainsi deux disciplines qui se sont toujours voué une mutuelle admiration à travers les âges à l’image du Dr Gachet, médecin de Van Gogh et lui-même collectionneur et artiste-peintre. Inversement, que de peintres depuis Vinci jusqu’à Rembrandt ont représenté la leçon d’anatomie dont Ben Abdallah me rappelait il y a quelques semaines encore qu’elle figurait de son temps en bonne place au programme des Beaux-arts. Ecrire un livre en collaboration avec l’artiste, outre que cela authentifie de facto les œuvres qui y sont reproduites, permet ainsi de lever le voile sur la vie culturelle de l’après-guerre  peu connue du grand public et de transmettre par le pinceau un patrimoine artisanal voué à l’oubli. Mais cette dissection quasi chirurgicale que je livre de son œuvre me permet aussi — à ma grande surprise — de révéler à l’artiste les voies inconscientes que suit son processus créatif: Nul n’est prophète en son pays et Ben Abdallah, dont la peinture est pourtant appréciée pour sa pureté et la plasticité de ses formes, n’est resté dans l’imaginaire collectif tunisien que comme un parfait exécutant d’une technique ancestrale mise au service d’une certaine beauté surranée. La virtuosité plus que l’aventure. Le but avoué de cet ouvrage est donc de redéfinir le travail de l’artiste, non pas tant à travers son simple graphisme ni ses ornementations sophistiquées mais au moyen de forts éléments conceptuels : l’importance de ses influences européennes, son usage immodéré des contrastes qui justifie pleinement le titre de cet ouvrage et cette manière si personnelle de dissimuler plus que de révéler. La suggestion plus que l’affirmation.

Ce livre,  me dit-on,  pèse plus de cinq kilos, ce qui n’est pas étonnant pour une gestation de quatre ans : il y a là ce que nous appelons dans notre jargon médical un macrosome et dans cette césarienne, je suis entouré de chevronnés assistants : Firas Ben Khalifa à la photographie, Mouna Mestiri qui conçoit une maquette aérée et élégante et Hichem Ismaïl qui - fait rarissime- assiste personnellement dans son imprimerie à tous les tirages. Cet ouvrage est tout naturellement diffusé par Cérès pour perpétuer une collaboration vieille de plus de trente ans avec cette prestigieuse maison.  Pour imposant qu’il soit, cet ouvrage est loin de figurer un catalogue raisonné de l’œuvre de Ben Abdallah puisque nous avons calculé qu’il devait réunir quelque 10% seulement de sa production picturale. Voilà qui laisse le champ libre à qui voudra à nouveau se pencher sur l’œuvre de cet artiste prolifique. Puisse ce premier gros livre d’art tunisien dégager l’horizon d’une exploration du travail des autres grands peintres avec lesquels Ben Abdallah a formé la première génération de l’Ecole de Tunis et dont toute la Tunisie s’enorgueillit.

Amin Bouker

Vous aimez cet article ? partagez-le avec vos amis ! Abonnez-vous
commenter cet article
2 Commentaires
Les Commentaires
Maher Ben Ghachem - 08-03-2013 14:47

Gelel Ben Abdalah mérite un hommage national et je félicite ceux qui ont contribué a la rédaction de cet ouvrage,et en particulier mon confrère Aminé Bouker. Juste je voulais connaître le rôle de la BIAT,qui, a ma connaissance a financé l'édition de ce livre.Je précise que je n'ai rien contre la sponsorisation de la culture par les mécènes,mais il fallait le préciser.

Mourad Guellaty - 05-04-2013 18:13

J'ai beaucoup aimé l'ouvrage, d'un auteur qui maîtrise parfaitement son sujet. Je voudrais écrire deux mots sur Jellal, en faisant très attention, car nul plus que lui ne prête si peu d'attention aux louanges. Jellal, désolé d'insister, est un immense Peintre, une Icône de la société tunisienne et même au delà de la méditerranée. Il est d'une simplicité déconcertante, ce gouailleur, ce farceur, qui ponctue ses plaisanteries par un grand éclat de rire, bien à lui. Il est difficile de le faire parler de son œuvre et de ses chefs d'œuvre, qui le font par procuration. Il ne s'étend que rarement sur son parcours exceptionnel, sur ceux qu'il a inspirés, aidés, propulsés, et sur ses nombreuses amitiés, parmi lesquelles figurent, excusez du peu, Edgar Morin, Jean Daniel, et Corpora. Il poursuit son chemin avec une sorte d'indolence, et de détachement apparent, parce qu’il est au contraire curieux de tout et détaché de rien. Jellal est un amoureux de la beauté, des paysages, des couleurs et des femmes. Cet homme à femmes, est l'homme d'une femme, la plus belle de toute, la magnifique Latifa, que je salue avec admiration et affection. Comment écrire si court sur Jellal. Il ya tellement de choses qui le caractérisent: sa gentillesse, sa fidélité, ses facéties du grand jeune homme qu'il est resté. La simplicité définit le mieux Jellal, dans l’acception de Léonard de Vinci ("la simplicité est la sophistication suprême") ou dans celle de Beaudelaire ("la simplicité absolue est la meilleure manière de se distinguer"). Bravo à l’auteur et salut l’Artiste ! Mourad Guellaty

X

Fly-out sidebar

This is an optional, fully widgetized sidebar. Show your latest posts, comments, etc. As is the rest of the menu, the sidebar too is fully color customizable.