Opinions - 17.09.2011

Du « Provisoire au Transitoire »

Personne ne conteste le fait que le pays ne peut plus, après le 23 octobre, supporter un jour de plus de « Transitoire » ou de « Provisoire ». Il a besoin d’en finir avec l’incertitude que créé tout système non durable. Aucun gouvernement, aucune institution, aucune administration ne peut être efficace si elle n’a pas de perspectives durables.

La première urgence pour le pays est donc de mettre totalement fin à tout ce qui est provisoire et transitoire : pour que la démocratie puisse s’installer et que l’économie puisse redémarrer, pour que les problèmes essentiels puissent être traités.

Comment mettre fin au Provisoire et au Transitoire ?

On peut le faire en décidant que l’assemblée à élire le 23 octobre aura un mandat de 4 ans pour signifier à tous et au monde entier qu’il n’y a plus de provisoire, quel que soit sa durée.

Une fois élue, cette assemblée aura une triple mission. Elle sera en premier lieu chargée d’établir la nouvelle constitution. Elle y consacrera un temps raisonnable qu’on peut fixer à une année. Tout en travaillant sur la constitution, elle assumera une seconde mission législative : élaborer les lois et ratifier les décrets-lois. Ces deux fonctions, constitutionnelle et législative ne sont pas incompatibles et sont toutes les deux nécessaires. Enfin troisième mission, d’ordre politique, cette assemblée devra désigner un gouvernement responsable dont elle contrôlera le fonctionnement. Elle doit, pour compléter l’organisation des pouvoirs publics, désigner un Chef de l’Etat qui occupera cette fonction jusqu’à la promulgation de la constitution dont on devra alors appliquer les dispositions concernant la désignation du Chef de l’Etat. L’Assemblée élue le 23 octobre continuera sa mission et exercera les pouvoirs qui lui sont attribués par la nouvelle constitution. Ceci ne fait pas obstacle à la désignation ou l’élection d’une deuxième chambre si elle est adoptée par la constitution.

On évitera ainsi toute une cascade d’élections qui ne peut que renforcer l’agitation et nuire à la stabilisation du pays.

Dans ce schéma, on n’aura que l’élection du 23 octobre 2011 et éventuellement une élection présidentielle si elle est retenue par la constitution on « économise » une élection législative au bout d’une année qui ne changera rien à la situation. N’oublions pas aussi qu’au cours de cette même année, on aura probablement des élections municipales.

Il y a de quoi ébranler le pays.

L’adoption d’un régime parlementaire nous permettra de nous en tenir aux élections du 23 octobre 2011 et éventuellement à des élections municipales.

Ce schéma est donc de nature à nous permettre de supprimer le doute et l’incompréhension qui existe chez un grand nombre d’électeurs. Limiter les prochaines élections à l’établissement d’une nouvelle constitution n’intéressera pas la majorité du corps électoral mais concernera plus spécialement les « professionnels ». Si la nouvelle Assemblée est en même temps législative et politique devant constituer un gouvernement légitime, alors on aura certainement moins d’abstentions, le corps électoral dans son ensemble devenant plus concerné.

N’allons pas donc de « provisoire » en « transitoire ». Ne compliquons pas la tâche de l’électeur par une série d’élections. Plus la « feuille de route » est simple, plus l’électeur sera concerné et viendra voter. Cette feuille de route doit faire l’objet du consensus le plus large possible entre tous les partenaires concernés : gouvernement, partis politiques et organisations de la société civile. Ce consensus doit intervenir le plus tôt possible pour pouvoir faire l’objet des décisions réglementaires qui s’imposent.

Il y va de l’avenir du pays, de la démocratie et du sort de la révolution.

Mansour Moalla

 


 

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10 Commentaires
Les Commentaires
mohamed - 17-09-2011 18:29

Voila une proposition qui va dans le sens de la simplification de la vie de l'électeur. Espérons que d'autres, qui rompront avec les habituels appels aux complications, suivront.

hatem jemaa - 17-09-2011 19:30

Si on fixe comme préalable une durée de vie de 4 ans à la Constituante, effectivement il y a nécessité de lui confier les pouvoirs cnstitutionnel, législatif et executif. Cependant, est ce qu'on a besoin de 4 ans pour promulguer une constitution, qui seule oui seule peut doter les gouvernants des moyens de l'action? Pour ma part je pense que le délai peut être beaucoup plus court.D'ailleurs Mr Moalla le situe à un an ( c'est dèja beaucoup ) . A mon avis,6 mois suffisent amplement surtout si l'adoption de la nouvelle constitution se fera par referendum. De plus je ne comprend pas trés bien comment l'Assemblée Constituante va continuer à assumer ses missions pendant 3 ans en présence d'une constitution qui organise les pouvoirs et qui selon Mr Moalla aurait déja été adoptée? Je pense comme l'a si bien dit Si Mansour qu'il ne faut pas ajouter de la confusion et opter pour une voie simple et la plus rapide possible en instaurant la Constitutionnalité des actes et structures.

Mohamed - 18-09-2011 11:47

Effectivement multiplier les échéances électorales jumelles et identiques nuit à la marche du pays. J'ai été très étonné quand j'ai remarqué que dans l'esprit de certains, il faut faire une autre élection législative après celle de la constituante. J'ai toujours pensé que c'est la même assemblée qui sera élue et pour la constitution et pour la législation. C'est faisable cette avalanche d'électios, couplées aux présidentielles et municipales. Tout est faisable, mais le prix en sera élevé. En effet, particulièrement entre les deux échéances "législatives", le pays, et surtout les partis politiques, seront en éternelle campagne électorale, avec ce qui s'ensuit comme foisonnement de propositions électoralistes imaginaires et populistes, et le vrai travail législatif réaliste terre à terre sera forcèment délaissé. L'économie d'une échéance électorale ne peut que mettre fin à cet état de provisoire instable nuisible au pays et d'attente indécise de l'échéance définitive, économiser substantiellement sur les deniers publics, et permettre à l'assemblée de travailler sérieusement et non pas de distribuer à droite et à gauches des propositions populistes irréalisables faites uniquement pour gagner des voix. Mansour Moalla vous êtes une voix sage, mûre et réfléchie. Il y a juste une chose, je me demande encore aujourd'hui si on a fait le bon choix de privilégier l'élection d'une constituante à des élections classiques présidentielles et législatives. Cet état de pratiquement vide gouvernemental et cette confusion régnante (référendum, prérogatives, durée..) auront-ils des répercussions néfastes sur cette démocratie naissante? La théorie est importante, mais la pratique est déterminante. L'exemple de Ben Ali le prouve. Il a établi une dictature dans la légalité et avec les "ingrédients" démocratiques: partis d'opposition, assemblée nationale, élections périodiques, journaux d'opposition etc. Donc le régime, présidentiel ou parlementaire, ne garantit pas forcément la démocratie, les droits de l'homme, les libertés...Un premier ministre issu d'élections législatives peut virer à la dictature s'il en a l'intention et les moyens. Il lui suffit de falsifier éternellement les élections. C'est les pratiques qui comptent. Et seule la réelle et pleine liberté d'expression permet de contrôler ces pratiques. Les Américains ne se sont pas trompes en mettant au sommet de leur constitution la liberté d'expression, le fameux premier amendement. Ainsi, quelque soit le régime politique en question, il sera contrôlé réellement. Bien sûr, même si elle est primordiale, la liberté d'expression ne suffit pas à elle-seule à garantir la vraie démocratie. Mais je pense que celui qui veut restreindre la liberté d'expression, pour n'importe quel motif invoqué, est un futur dictateur en force. C'est un bien inégalable à protéger de toutes nos forces.

Mehdi - 19-09-2011 11:04

Assemblée constituante : Mansour Moalla se rallie exactement aux positions du CPR et de Moncef Marzouki. Excellente analyse

saki - 19-09-2011 20:09

s'il est tout à fait logique de fixer un délai pour la rédaction de la nouvelle constitution et la soumettre à referendum ( délai maxi de 12 mois mais de préférence 6 mois). , il est difficile de fixer un délai quelconque pour l'assemblée constituante .car cela va dépendre avant tout des nouveaux textes .dans la mesure où les nouveaux textes de la constitution ne remettent pas en cause la constituante , il est effectivement souhaitable qu'elle contunue à exercer .Cela éviterait evidemment de recourir à des élections à un parlement aussi proches . La solution serait qu'après la promulgation de la nouvelle constitution , on passe avec l'assemblée constituante aux élections municipales , régionales et la mise en place des institutions de l'état. Le jour où il faudra passer à l'election d'un parlement , la constituante organisera ses élections avec une commission indépendante et prendra congé le jour de l'installation du nouveau parlement . Il ne faudra pas fixer de délai pour cette période mais raisonnablement , une fois les institutions réclamées par la nouvelle constitution mises en place , le délai ne devrait pas dépasser les 3 ans .n plus il ne faut que le citoyen passe son temps à voter , il y a va de son temps , des deniers publics et du fonctionnement des institutions et le redémarrage de l'économie.

HAZGUI - 19-09-2011 20:46

Pas d'accord avec cette analyse. Une constituante qui ratifie une constitution, validée par referundum, 6 mois ou un an après son élection, n'a plus droit de rester détentrice des 3 pouvoirs pendant 3 ans , car la nouvelle constitution est seule qui dictera le modèle ou le système politique à venir. Après le referundum de la constitution nous mettrons en place nos institutions telles que prévues par cette dernière. Donc Monsieur Moalla on n'est plus du temps de Bourguiba ou on nous faisait avaler n'importe quelle couleuvre.

L'Observateur nouveau - 20-09-2011 15:47

L'exposé de M. Moalla est clair et limpide, soutenu par une logique économique et un souci de l'intérêt supérieur de la Patrie qui ne surprennent pas chez cet homme. Cela surprend d'autant moins qu'il rejoint en tous points le discours d'un autre grand homme doublé d'un grand patriote, le Dr Merzouki.

SELIM - 20-09-2011 16:19

Cette assemblée est une constituante, elle écrit une nouvelle constitution et elle s'en va. Elle ne doit pas écrire une constitution alors qu'elle sait qu'elle va être la première chambre de cette nouvelle république. Il y a aura alors un conflit d'intérêt évident qui ne saurait être toléré. Alors une nouvelle élection, et les inconvénients que ca entraine, vaut mieux qu'une assemblée qui s'installe trop dans la durée alors qu'elle est venue seulement pour une mission précise. Un exemple de conflit d'intérêt : le parti ou la coalition majoritaire de cette assemblée aura tendance à favoriser un régime d'assemblée, au détriment d'un régime présidentiel ou mixte, et ce pour consolider encore plus et durablement son autorité sur le pays. Inadmissible ! et dangereux car le régime qui sied plus à notre pays aujourd'hui est un régime présidentiel avec une indépendance (et non séparation qui est illusoire) des 3 pouvoirs. Donc la proposition de M. Moalla, avec le respect qu'on lui doit, ne tient pas du tout debout. A rejeter absolument !

Sami Boussoffara - 20-09-2011 19:06

Autant, je suis d’accord avec M. MOALLA sur les risques liés à la probable « cascade d’élections » qui s’annonce autant j’aimerais dire mon désaccord sur ce qui semble un être un deuxième raccourci, un nouveau court-circuitage de la volonté populaire tendant à imposer un modèle institutionnel particulier, à savoir le régime parlementaire. Le peuple tunisien s’est déjà plié à la volonté d’une minorité qui a pu et su commercialiser l’idée de la constituante alors que rien n’indique que cela était la volonté de la majorité. Qui dit d’ailleurs que le peuple n’était pas prêt à accepter une nouvelle mouture de la constitution de 1959 ? Qui dit que le peuple voulait une deuxième république ? Rien n’est moins sûr. Mais voilà, le projet de la constituante est devenu un fait, et certains continuent sur leur lancée en s’arrogeant le droit de dire la volonté du peuple. Ce dernier serait pour le régime parlementaire. Il faut dire qu’après avoir copié la deuxième république française, il nous fallait introduire quelques attributs du système britannique !! La Tunisie ferait ainsi un saut de plusieurs décennies dans la…tête de ceux qui ont promu ces options constitutionnelles. Or, toutes ces questions sont loin d’être tranchées car elles ne sont pas forcément adaptées. Et si le peuple tunisien était pour le régime présidentiel ? Pour terminer, je souhaiterais soulever une dernière question de forme : je ne comprends pas que certains hommes politiques, y compris parmi les plus brillants, s’obstinent à employer ce terme brumeux et tristement célèbre de « feuille de route ». Trouvons autre chose, conceptualisons. C’est aussi cela la politique.

nejib - 20-09-2011 21:31

Enfin, une analyse qui réconcilie la politique avec l'économie et la rationalité. Bravo si mansour moalla. Vous prouvez que vous placez l'intérêt supérieur du pays au dessus de tout calcul politique mesquin et à courte vue. A ceux qui ont épousé le raisonnement inverse je leur dis : Wait and see.

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