News - 02.09.2020

Comment Mechichi a largement emporté la confiance du Parlement (134 voix)

Comment Mechichi a largement emporté la confiance du Parlement (137 voix)

Belle leçon de démocratie, contre vents (carthaginois) et marées (de tous bords)! Parti avec très peu de chances, Hichem Mechichi a arraché haut la main l’aval de l’Assemblée des représentants du peuple, par 134 voix, soit 25 de plus sur les 109 requises. Sur un total de 201 votants (217 députés), seules 67 voix se sont exprimées contre, alors qu’aucune abstention n’a été marquée. Peu avant 2 heures du matin, ce mercredi 2 septembre, à l’issue de plus de 11 heures de débats quasi-continus, entretenus par une centaine d’interventions, variant entre virulence, préjugé favorables et mises en garde, Hichem Mechichi obtient finalement les clefs de la Kasbah dont il devient le 18ème locataire depuis l’indépendance.

A 46 ans, ce pur produit de l’école publique et de la haute administration, doit désamorcer avec courage et patience, une situation absolument explosive. Livré seul et sans ressources sur un champs de ruines économiques et sociales et de mines politiques, il ne devra sa survie et celle du pays qu'en forgeant un mode opératoire efficace à rendement immédiat.

 

Un super fan, de dernière minute, contre Kafka

Lui qui ne lui était pas favorable au départ, avant de l'adouber, Rached Ghannouchi, chef d’Ennahdha et président du parlement s’en délectera ouvertement, célébrant la victoire du Bardo. « C’est ici que s’exerce le pouvoir, déclarera-t-il à chaud, en subsistance. C’est le parlement, et lui seul, qui détient le droit de nommer ou pas un chef de gouvernement", martelèrera-t-il avec vigueur, enhardi par l'élection et le score obtenus. Le message est à peine voilé pour ceux qui à Carthage ont essayé d’imposer un candidat, puis dans un retournement spectaculaire et kafkaïen, de le faire tomber

Cueilli lui aussi à la sortie de la grande salle du Bardo où il venait d’obtenir l’investiture pour son gouvernement, Hichem Mechichi garde la tête froide et le succès modeste. Visiblement ravi de cette confiance âprement arrachée, se tourne déjà vers l’avenir, se voulant sincèrement rassembleur et résolument engagé vers l’action. Les interventions de nombreux députés lui ont donné, plus que les rapports qu'il recoit au ministère de l'Intérieur, le vrai pouls des Tunisiens.

L'équation de l'impossible

S’il a franchi l’ultime barrière, gagnant une première bataille, Hichem Mechichi ne fait que commencer son parcours de combattant. Très dure sera en effet son avancée indemne sur un chemin de tous les dangers. Au fil des jours, comme il en a déjà fait la preuve récemment, il est capable d’endosser l’habit de la charge et d'effectuer une montée en puissance, absolument urgente et nécessaire. Sans déroger à sa courtoisie, ni renoncer à ses convictions, il est en mesure de délimiter nettement son territoire constitutionnel, vis-à-vis de Carthage, comme du Bardo, d’installer son style de gouvernement, et par son efficacité et son indépendance, forcer le respect. Dans cette équation de l’impossible où s’enlise la Tunisie, tout reste possible. Même, si rien n’est acquis d’avance.

Ce qu’il faut retenir le plus de l'investiture de Mechichi

Cinq constats majeurs sont à considérer avec attention:

1 - Fin est mise à l’éphémère et controversé gouvernement Elyès Fakhfakh. Cette forte revendication, portée notamment par Qalb Tounès et Itilaf Al Karama, exclus de la coalition au pouvoir, a finalement obtenu gain de cause.

2 - Un nouveau gouvernement est en place. Le programme n'est certainement tracé au cordeau, l'équipe n'est pas la meilleure, mais, cette investitutre ferme la parenthèse préjudiciable de trois mois d’arrêt qui ont paralysé le pays, et amorce une reprise en main de grandes urgences.

3 - Un jeune quadra, indépendant, reconnu pour sa compétence et sa probité, est hissé aux commandes à la tête d’une équipe, sans doute pas entièrement au point, mais regroupant en son sein de bonnes pointures.

4 - Un coup de frein est nettement donné par les élus de la nation, aux acrobaties aventureuses de Carthage, marquant ainsi un juste rétablissement de l’ordre des attributions. Tanguée par des tiraillements internes qui avaient failli la disloquer (motions de condamnation de la France et de la destitution de Ghannouchi, etc.), l’Assemblée se redresse et reprend les commandes.

5 - Un retour en force, en tant qu’acteur majeur de la décision politique, de Rached Ghannouchi. Avec habilité, bravant attaques frontales sous le feu roulant et, au mieux, discourtoisie (absence du chef de l’État à la réception du 25 juillet au Bardo), il démine sans cesse le terrain et remet les pendules à l’heure. Resté seul sur la scène dans la même catégorie, après le décès de Béji Caïd Essebsi, il est aux fourneaux. Tant auprès des siens au sein d’Ennahdha, en pleine effervescence à quelques mois du congrès du mouvement, que ses partenaires politiques pas toujours faciles à gérer (Qalb Tounès, Al Karama…), la Kasbah dominée par l’imprévisible, têtu et revanchard Fakhfakh et son numéro 2, Abbou, et Carthage, complètement dans une autre logique des plus surprenantes, il s’emploie à démêler les fils d’une totale confusion.

Mystères

Hichem Mechichi, passe d’un serviteur peu connu de l’État à un enjeu national. Très peu de Tunisiens savent pourquoi le président de la République, Kais Saïed l’avait coopté auprès de lui en il y sept mois, en février dernier comme conseiller pour les affaires juridiques, puis « recommandé », trois semaines plus tard auprès d’Elyès Fakhfakh, au poste de ministre de l’Intérieur. Le mystère reste épais quant aux raisons effectives qui ont motivé la décision du chef de l’État de le charger, après la « démission » de Fakhfakh, de former un nouveau gouvernement. Le plus mystérieux encore, c’est la manœuvre de délestage entreprise contre lui depuis une semaine par Kais Saïed. En point d’orgue, une ultime convocation quasi inédite, lundi, à la veille du débat d’investiture, de chefs de quatre partis politiques…

De farouches adversaires, au départ, à la nomination de Mechichi à la Kasbah, et de partis fortement contraints de le laisser passer, de crainte de dissolution de l’Assemblée, l’attitude de Kais Saïed a complètement renversé la donne. En quelques heures seulement depuis lundi, tout un capital d’estime s’est rapidement développé en faveur de Mechichi, se transformant en soutien ouvertement exprimé par les 134 voix raflées. Les plus politiques des députés ne manqueront de souligner, lors de leurs interventions, juste pour marquer leur réserve de principe à consigner dans le « Journal officiel des Débats » qu’ils lui accordent leur voix, mais pas leur confiance. Le résultat est le même.

Au travail ! proclament tous.

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1 Commentaire
Les Commentaires
Wassim - 03-09-2020 11:26

Les memes qui ont vote pour lui, finiront par tout faire pour le faire tomber des qu il osera ne pas suivre leur consignes comme l a fait Fakfakh. Ils le feront tomber des qu il osera initier les reformes indispensables qui toucheraient au interets de lobbys qui financent leur partis. Le Karakouz n est qu a s est debut..

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