News - 04.05.2020

Mohamed Adel Chehida: Est-ce que toutes les morts ne se valent pas

Mohamed Adel Chehida: Est-ce que toutes les morts ne se valent pas

Enfant j’ai connu ma grand-mère maternelle Aicha hémiplégique non autonome. Elle résidait alternativement entre chez nous et chez ma tante. Elle était entourée de ses filles et ses petits-enfants et recevait les visites de ses frères et sœurs. Son mari Salem lui faisait des visites assez régulièrement en lui manifestant les manifestations de tendresse.

Un jour elle tombe dans le coma et après les visites du médecin, ses filles et ses frères et sœurs la transportent sur un matelas dans une Peugeot 404 dans sa chambre matrimoniale pour mourir comme elle l’a demandé de son vivant.

Mon grand-père, lui, vivait tout seul dans sa chambre au sein de la grande Dar Arbi avec ses frères et leurs familles, on lui apportait son déjeuner et son diner.

Quand  mon tour de lui apporter le couffin arrivait, je le trouvais ou bien avec ses amis devant l’épicerie de amm Hamadia à papoter ou jouer aux cartes et plus souvent chez lui à écouter la radio ou lire le Coran. Comme ma grand-mère, un jour le matin on le retrouve dans un coma diabétique duquel il ne s’est jamais réveillé. Il s’est éteint à l’âge de 74 ans entouré de ses deux filles et ses frères et sœur. Qu’ils reposent en paix.

Lors de mes études de médecine je me suis souvent posé la question : s'ils avaient vécu à nos jours auraient-ils bénéficié de l’avancement de la médecine ?

Oui certainement d’un point de vue médical, mais peut être seraient-ils aussi chez eux avec une aide soignante à domicile ou dans une maison de retraite avec 15 ans de gain de vie mais aussi avec peut être une absence complète d’autonomie et un peu de démence sénile.

Voici ce qui s’est passé en Italie au temps de coronavirus. Cette génération qui a bénéficié d’années de survie et d’un nouveau bien-être durant ces dernières cinquante ans, se trouve attaquée par un virus mortel.

Difficultés respiratoires, sensation de suffocation et tout le reste et notamment les souffrances psychologiques qu’ils partagent avec nous à travers leurs regards, je ne l’oublierai jamais!

Là j’arrive à la question essentielle de ma réflexion. Quel devrait être notre devoir nous médecins dans ces situations ? Beaucoup de questions me viennent à l’esprit.

Devrons nous agir comme on nous a formé et formater ? La vie est-elle une valeur suprême absolue ?

Sauver la vie à tout prix en respectant « tous les êtres humains sont égaux en droits et en dignité ». Dignité ? Dans ce cas serait-il mieux de leurs éviter la privation de ce qui fait sens et bonheur ? Devraient-ils supporter des manœuvres forcement déshumanisantes ? Ces casques gonflés avec d’oxygène et son bruit continu, insupportable, de se faire aider pour manger des soupes ou un yoghourt, quand ce n’est pas à travers une sonde qui passe par le nez et arrive à l’estomac ! Les priver des visites de la famille par peur de la contagion ? Et pour beaucoup sinon la majorité à partir d’un certain âge, de mourir seuls, sans faire les adieux, sans recevoir un religieux, enrobés dans un drap imbibé de désinfectant et inhumés d’une façon assez accélérée ?

Faut-il essayer de faire tout notre possible ? Certainement oui, mais s’il n’y a pas de signes d’amélioration ? Prendre la décision de ne pas s’acharner et faire en sorte qu’ils quittent ce monde, entourés de leurs bien aimés (bien sûr avec toutes les conditions de sécurité de non contagion).

Ou alors les condamner en ne faisant que le minimum pour pouvoir libérer les postes en réanimation pour les plus jeunes en cherchant de sauver le maximum d’années de vie ? Dans ce cas est-ce que toutes les morts ne se valent pas ?

Les médecins, à qui revient la dernière décision, doivent-il obéir à une sentence sociale ?

Il n’y a pas de bonne santé sans bonne économie : fallait-il éviter un confinement strict imposé par les chinois et copié par l’occident malgré la non-imposition de l’OMS de telles procédures?

Faut-il préserver l’économie et le bien être des générations futures car on risque de se retrouver avec une mortalité excessive dans tous les cas et justement de ces sujets âgés mais aussi des conséquences aussi graves de la chute dans les abysses de l’économie mondiale ?

Dr Mohamed Adel Chehida
 

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1 Commentaire
Les Commentaires
Maria Patrizia - 04-05-2020 11:32

Articolo bello , triste, nello stesso tempo, ma la speranza in ognuno di noi e in tutti noi del genere umano ci aiuti a riflettere di più su quel magnifico dono che è la vita....Merci'

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