News - 01.09.2018

Pourquoi la Chine s'intéresse à la Tunisie et à l'Afrique

La Chine est nous...à travers l'histoire

Nous sommes le vendredi 10 janvier 1964. Depuis 10 heures du matin, Bourguiba s’entretient, pour la deuxième fois, à la Kasbah avec son hôte chinois arrivé la veille pour une visite officielle de deux jours. C’est la première visite depuis la libération de la Chine et la proclamataion de sa république (1949) et l’indépendance de la Tunisie (1956). L’importance des entretiens, tant élargis aux délégations des deux pays qu’en tête-à-tête, sera historique. Ils seront couronnés par l’établissement des relations diplomatiques.

Depuis lors, c’est-à-dire 54 ans après, des flux d’échanges et de coopération ont été déclenchés, mais sont restés encore timides, loin des attentes, et en deçà des potentialités réciproques. Aujourd’hui, la Chine, comme la Tunisie, n’est plus ce qu’elle était à l’époque. A des différences compréhensibles, les transformations, ici et là, sont significatives: très profondes et porteuses de grandes opportunités.

Une superpuissance…

Acteur global majeur, la Chine s’impose désormais en superpuissance mondiale. Premier exportateur mondial, sa puissance économique en croissance continue s’adosse à une poussée générale, financière, militaire et technologique. Rien que durant les dernières années, elle a largement façonné la redistribution des cartes géopolitiques. Avec une stratégie cohérente et des moyens appropriés, cet immense pays (9,6 millions de km2), fort de plus de 1,39 milliard d’habitants, se lance dans des projets planétaires ambitieux, incarnés notamment par l’initiative Ceinture et Route (la Route de la Soie), la conquête de l’espace (en y envoyant désormais des robots) et des développements exceptionnels en intelligence artificielle, partout déployée. Le bras de fer commercial qui l’oppose à d’autres puissances, notamment les Etats-Unis, qui lui ont imposé des restrictions douanières, et la mise en demeure notifiée aux anciennes puissances coloniales pour ôter définitivement leur mainmise, sont fermement démontrés.

… Déterminée à jouer un rôle-clé en Afrique

Dans cette stratégie d’avenir, la Chine s’intéresse particulièrement à l’Afrique, gisement de richesses énergétiques et minérales et marché prometteur. Premier partenaire commercial du continent noir (avec 200 milliards de dollars d’échanges en 2017, contre 12 milliards seulement en 2010 et 10.000 entreprises qui y sont actives), elle entend surtout sécuriser son approvisionnement en pétrole et matières premières (cuivre, etc.) indispensables à son économie, une priorité absolue. La Chine a également bien pris en compte qu’à l’horizon 2100, c’est-à-dire dans près de 80 ans, un terrien sur trois sera africain. Cet intérêt n’est pas uniquement économique, mais stratégique. Déjà, elle prête son concours aux missions de maintien de la paix de l’ONU dans nombre de pays : Mali, Soudan du Sud et République démocratique du Congo. Et elle a installé à Djibouti sa première base militaire à l’étranger depuis la guerre de Corée. Membre fondateur des Bric (Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud), la Chine déploie une stratégie bien ordonnée qui ne manque pas cependant de bousculer ses compétiteurs.Pour la talonner, ces derniers lui imposent le devoir de ne pas soutenir les dictatures, de bannir toute malversation et de favoriser l’instauration de la démocratie et le respect des droits.

Autant la Chine a besoin de l’Afrique, autant l’Afrique a besoin de la Chine. Ce qui importe le plus aujourd’hui, c’est de construire de nouveaux partenariats, fondés non plus sur des alliances idéologiques, comme jadis, mais des intérêts politiques et surtout économiques communs. La tenue, les 3 et 4 septembre à Pékin au niveau des chefs d’Etat et de gouvernement, du Sommet du forum de coopération sino-africain constituera un événement majeur, consacrant avec plus de moyens sa nouvelle orientation déterminée.

Un partenariat d’une nouvelle génération

La Tunisie, conviée à y prendre part, participera à un niveau très élevé. C’est pour nous l’occasion de nous inscrire de plain-pied dans cette démarche et de jouer encore plus activement notre rôle dans le continent. Outre les intérêts bilatéraux, il s’agit d’ancrer profondément la Tunisie, son économie particulièrement, dans ce nouveau contexte. Importer mieux et exporter plus, constituer un hub régional Europe-Méditerranée-Afrique, et s’ouvrir mutuellement les marchés respectifs constituent autant d’opportunités précieuses qu’il faut savoir saisir. La valorisation de nos matières premières, l’accès aux technologies de pointe et la réalisation en commun de projets dans d’autres pays contribueront sensiblement à la création de la valeur, indispensable à la croissance de notre économie et à l’expansion de nos entreprises.

Un nouveau partenariat tuniso-chinois élargi à l’Asie, comme à l’Afrique, est à concevoir et mettre en œuvre. Nous devons nous y mettre activement en y impliquant le plus et mieux possible le secteur privé dans les deux pays.

Ce dossier spécial ‘’La Chine et nous’’ se veut ainsi l’amorce d’une démarche gagnante à déclencher. Sans prétendre être exhaustif, il permet aux lecteurs d’y trouver des éléments utiles et incitatifs ainsi que de bonnes pistes d’avenir.

Taoufik Habaieb

Leaders consacre dans son numéro de Septembre 2018, en kiosques, un dossier spécial ‘’La Tunisie et Nous’’.

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