News - 01.09.2016

Baptême du feu (nourri) de Youssef Chahed : Récit d’une nuit folle à Kasserine (photos)

Baptême feu nourri de Youssef Chahed : récit d’une nuit folle à Kasserine

Pas une seule seconde de répit. Le feu nourri des terroristes a été déclenché au mont Samama, près de Kasserine, lundi matin, au moment-même où Youssef Chahed, debout sur le podium de Dar Dhiafa s’apprêtait à recevoir le témoin de son prédécesseur Habib Essid. Discrètement, son chef de protocole lui glisse une feuille de papier pliée.

Son regard se fige un instant, mais il ne laisse rien n’apparaître. Du fond de la salle, des journalistes interpellent Essid et Chahed. Le tout nouveau chef du gouvernement démarre son mandat sur les chapeaux de roues. 

La joie sera de courte durée

Premiers moments, premières grandes épreuves : Chahed est sévèrement jugé sur sa gestion de crise. Il ira certes, le soir-même dans les salles d’opérations de l’Armée, de la Police et de la Garde nationale, mais c’était insuffisant pour les Tunisiens. La situation ne fera que se compliquer davantage, mercredi matin. Convoqués le matin au palais de Carthage pour le premier conseil des ministres, les membres du gouvernement congratulaient leur chef de la réussite des contre-opérations menées à Kasserine, faisant notamment deux morts parmi les terroristes. Leur joie sera de très courte durée. Une catastrophe s’invite subitement avec le carnage causé par un camion poids lourds aux freins lâchés faisant sur la place du Souk de Khmouda, 16 morts et 85 blessés.

Ne pas court-circuiter les ministres

Le visage blême, Youssef Chahed qui en informe de suite le chef de l’Etat, encaisse le coup dans sa chair. Les premières instructions sont données pour organiser les secours et évacuations médicales. Cette fois, il doit se rendre immédiatement sur les lieux du drame, dans le gouvernorat de Kasserine. Un hélicoptère de l’armée de l’air a été commandé pour un vol initialement prévu à 15H. Finalement, Chahed décide d’envoyer en précurseurs trois membres du gouvernement, directement concernés, et de rester encore quelques heures à Tunis pour réunir le maximum d’éléments, avant d’aller à Kasserine. La ministre de la Santé, Sémia Merai avait ordonné l’envoi d’ambulances supplémentaires et le déploiement des moyens d’appui nécessaires, mais elle doit faire le déplacement. Anis Ghedira, ministre des Transports diligente une enquête sur les circonstances techniques de l’accident et doit la suivre en direct. Farhat Horcahni, ministre de la Défense ira inspecter les forces armées et les féliciter. 

Le Gouverneur reprend sa note

A la Kasbah, la cellule de crise est réunie. Youssef Chahed, le téléphone collé à l’oreille plonge dans la lecture des notes sur les revendications de la population locale de Kasserine, les décisions prises en leur faveur, les projets programmés et l’état d’avancement de leur réalisation, mais aussi les blocages à lever. La dernière note établie par le gouverneur de la région remonte à il y a près de six mois, datée de mars dernier. Le chef du gouvernement demande une mise à jour. Les ministres dépêchés sur le terrain rendent compte. La nuit avance. Un autre hélicoptère est commandé pour 2 heures du matin. Chahed doit faire un aller-retour rapide pour être jeudi à 9 heures du matin au palais de Carthage où était déjà programmée depuis lundi, la première réunion du conseil national de sécurité. 
Peu après trois heures du matin, l’hélicoptère décolle d’El Aouina. La nuit ne laisse rien apercevoir du paysage, mais Chahed demande à survoler les lieux du drame.

Aux aurores

Arrivé à Kasserine, il se rendra à l’hôpital, auprès des forces sécuritaires de la Police et de la Garde nationale, ainsi que l’Armée. Le jour commence à se lever. Aux aurores, la visite se poursuit au pas de charge. Chahed essaye de comprendre et de rassurer en prenant la précaution de ne rien promettre qui ne puisse être tenu. La population locale est encore sous le choc. Le drame est profond. Le malheur se lit dans tous les regards, l’indignation aussi. L’attente du réconfort et de la compassion du gouvernement est grande. Les gens ont l’impression d’être abandonnés à leur sort. On ne fait que venir les voir après coup, comme pour se déculpabiliser. Ils ne voient rien venir de concret. Les gouvernements se succèdent, les promesses se multiplient, le nombre de leurs martyrs aussi.
Chahed essaye de consacrer plus de temps à la population endeuillée, meurtrie. Il obtient de Carthage que la réunion soit décalée d’une heure. Puis finit par reprendre l’avion. L’hélicoptère survolera Khmouda. Les traces du drame sont encore-là. 
 
Première nuit blanche. La rage au ventre, le chef du gouvernement affronte stoïquement son baptême du feu. Cela ne fait que commencer. Il prendra lui aussi sa part dans cette implacable lutte contre le terrorisme et la gestion des crises. 
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