News - 06.06.2015

Préciser et accélérer le processus de réforme

Préciser et accélérer le processus de réforme

Le pays est en crise profonde. On a cru, après les élections, pouvoir s’atteler à la recherche de solutions efficaces. On s’aperçoit que celles-ci exigent des réformes profondes et des décisions qui doivent être courageuses et qui peuvent être «douloureuses».

On se contente depuis le début de l’année de le constater et de rejeter la même action sans proposer des mesures concrètes. Ces mesures doivent être graduelles, en commençant par les plus urgentes et en allant progressivement vers les plus profondes. Elles doivent marquer les directions dans lesquelles on doit s’engager.

Deux graves problèmes demeurent depuis l’Indépendance. Il s’agit du chômage et de l’emploi, d’une part, du déficit de nos finances extérieures et de l’endettement, d’autre part.

I / Le problème de l’emploi

En ce qui concerne le premier, les mesures suivantes peuvent être décidées :

1.Réduire substantiellement le chômage existant

Il est évalué entre 600 et 700.000 sans-emploi dont 250.000 diplômés. On peut, en demandant aux entreprises qui fonctionnent convenablement, d’en recruter un nombre significatif en fonction de leur importance et de leurs possibilités. Il appartient aux services de l’Etat de recenser ces entreprises et d’étudier les différentes catégories de demandeurs d’emploi suivant les diplômes, l’âge, la durée du chômage et de façon à pouvoir établir des priorités. Le nombre d’emplois demandés à ces entreprises doit être de 2 emplois pour un effectif de 10 à 20 employés et de 10 à 20 pour un effectif de 100 à 200 employés. Ces montants sont cités à titre d’illustration. Il appartient aux services concernés de les étudier de plus près. On peut encourager ces entreprises à procéder à ces recrutements en déduisant de l’impôt à payer le montant du salaire, déduction réduite du 1/5 durant les 5 premières années jusqu’à ce que ces recrutements deviennent « opérationnels ». J’ai exposé cette réforme à plusieurs reprises. Elle nécessite un soin particulier pour la mettre en place. Si rien n’est fait, on risque l’aggravation de la crise, de la colère et de l’agitation. Il est important que les services s’y mettent sérieusement.

2. Améliorer la création d’emplois

Mais il ne suffit pas de résorber le chômage actuel. Il y a lieu surtout d’améliorer notre capacité de création d’emplois pour éviter un chômage encore plus important durant les prochaines années.

La création annuelle d’emplois s’est améliorée au cours des précédentes décennies. Elle a été de 13.000 durant les années 1960, de 36.000 au cours des années 1970 et s’est établie depuis autour de 50 à 60.000 emplois contre une demande annuelle d’emplois de l’ordre de 70 à 80.000 par an. Ces demandes émanaient au départ à hauteur de plus de 60% des candidats analphabètes ou du niveau du primaire et seulement de 6% des diplômés de l’enseignement supérieur. Aujourd’hui, c’est l’inverse, la majorité des demandes concerne des candidats détenant des diplômes du secondaire et surtout du supérieur, l’Université dont les effectifs vont atteindre les 400.000, livrant sur le marché du travail plus de 60.000 demandeurs d’emplois qualifiés. La nature des emplois à créer doit évoluer en conséquence. Tel est le problème. Que peut-on faire?

3. Développer l’investissement en quantité et en qualité

Les investisseurs et les créateurs d’emplois ne sont pas légion et constituent une minorité qu’il y a lieu d’élargir, d’encourager et d’entourer de toute la considération et l’appui nécessaires. Les traiter comme des hommes d’argent rapaces et des fraudeurs est une faute lourde et irresponsable même si certains d’entre eux, comme cela existe dans toutes les catégories de la population, ont un comportement excessif et nuisible. L’acte d’investir et de créer des emplois doit être considéré avec beaucoup de respect et de considération. J’ai été chef d’entreprise, j’ai fondé deux grandes entreprises (la BIAT et le GAT), malgré les obstacles rencontrés, et je sais combien ce métier de création relève d’un don supérieur inspiré par la volonté divine. Je suis heureux lorsque je pense aux jeunes qui occupent les emplois créés leur évitant le chômage.

Il y a lieu donc d’encourager au maximum sans réticence et sans complexe l’investissement et la création d’emplois. Les dépenses d’investissement pour la création ou l’extension d’un projet créateur d’emplois devront être déduites totalement ou partiellement selon l’importance du projet et le nombre et la qualité des emplois créés du revenu imposable durant les cinq premières années, le temps que les nouveaux emplois deviennent créateurs de richesses : la déduction est réduite de 1/5 chaque année.

4. Revoir le système de financement de l’investissement

L’investissement ne peut se développer qu’avec l’institution d’un système de financement efficace. Sans crainte d’être brutal, on peut dire que la Tunisie a lamentablement échoué dans l’implantation permanente d’un tel système. On a tout essayé. Peine perdue. La tendance du «commerce» facile s’est bornée au court terme et au gain facile. La BDET(1) a été créée dans la tourmente après l’échec de la SNI. Elle a vécu, tant bien que mal, avec des prêts extérieurs subventionnés par l’Etat mais telle qu’elle, elle a rendu des services précieux et accompagné, durant les années 1970, l’émergence de tout le secteur des industries manufacturières (textile, cuir et chaussure, mécanique, etc.) devenu le principal créateur d’emplois. La Banque nationale de développement du tourisme (BNDT) a eu le même parcours. Les autorités ont été incapables de leur procurer des ressources longues leur permettant de durer et les deux ont été catastrophiquement fusionnées avec la STB qu’on essaie aujourd’hui de sauver aux frais du contribuable, alors que bien d’autres solutions sont possibles. De nouveau, le même processus de destruction frappera les quatre banques de développement importantes, ayant réuni ensemble 750 millions de dinars de capital et créées à la parité avec les principaux pays du Golfe (Arabie Saoudite, Koweït, Qatar, Emirats Arabes Unis) ; elles sont devenues des banques commerciales ne jouant qu’un rôle tout à fait secondaire. La gestion tunisienne de ces institutions a été totalement défaillante.  Il y a lieu, sans attendre,  de remédier à  cette  situation qui ne favorisera guère  l’investissement,  principal moyen de  création d’emplois,  besoin qui ira en  s’amplifiant vu la demande croissante et l’insuffisance persistante, et qui risque de le demeurer, de notre capacité de création d’emplois.

On a appelé les banques commerciales finançant principalement le fonctionnement et la gestion des entreprises et évitant autant que possible le développement des banques universelles, cette « universalité » ignorant curieusement le développement. Il est nécessaire de les inciter fortement à financer de façon significative, sinon prioritaire, l’investissement et le développement. Le capital de l’ensemble de ces banques n’est que de l’ordre de 2 milliards de dinars et leurs fonds propres de 5 milliards alors que les dépôts de leurs clients, leur principale ressource, est d’environ 45 milliards, le capital ne représentant  environ  que 4% des dépôts et les ressources propres environ 10%. Ce capital et ces ressources propres constituent des moyens de financer l’investissement pour les participations et les crédits à long terme. Ce capital et ces fonds propres doivent être augmentés à 5 milliards pour les premiers et 10 pour les seconds, soit 15 milliards représentant 33% des dépôts, le capital devant être augmenté par les actionnaires et les fonds propres par les bénéfices à réaliser dans les années à venir qui sont aujourd’hui substantiels (environ 400 millions de dinars par an) bénéfices qui doivent être accumulés et non distribués aux actionnaires qui ont largement bénéficié de cette distribution jusque-là : un geste de solidarité de leur part sera apprécié par l’opinion.

Ces propositions représentent un départ dans la voie de la réforme qui doit se poursuivre pour orienter la gestion de ces institutions dans l’intérêt général.

a) On peut penser qu’il serait plus sain et plus objectif de ne pas permettre aux clients bénéficiaires de crédit d’entrer au Conseil d’administration de la banque, devenant ainsi juges et parties et pouvant donner naissance à des abus.

b) La banque étant une institution d’intérêt général et utilisant une matière première (les dépôts) qui ne lui appartient pas, contrairement à une entreprise normale, est exposée à la gestion facile et égoïste. Il y a lieu donc de limiter la durée du poste d’administrateur à deux périodes pour éviter l’instinct «d’appropriation» et d’éviter la concentration du capital en limitant la participation de tout actionnaire à 10% du capital pour que la « jouissance» d’un groupe dominant ne se transforme en capacité de favoritisme ou d’exclusion ou d’arbitraire.

c) On peut imposer aux banques, comme on l’a fait par le passé, ce qui a permis de financer la nouvelle industrie d’utiliser une partie de leurs dépôts (20%) à des crédits moyen terme, sur 7 à 10 ans, pour financer les équipements des projets d’investissement, ce financement venant appuyer les prêts à long terme par les ressources propres des banques (capital, réserves et emprunts obligataires).

Le financement de l’investissement est important et il est exposé longuement étant donné les échecs subis dans ce domaine. Selon la Banque mondiale, le développement est absent dans le système financier tunisien.

5. La réforme de l’éducation

Le financement des investissements et la création d’emplois concernent des êtres humains et des jeunes. Ces derniers doivent être formés à l’esprit d’initiative, à l’audace et à la volonté de créer et de créer principalement son propre emploi sans se résigner à attendre qu’on le lui «offre».

Il s’agit d’une profonde réforme longue à mettre en œuvre dans le détail. Mais c’est l’esprit et l’objet de la réforme qu’il faut définir dans l’immédiat. Le système éducatif décline fortement depuis 1980, donc depuis 35 ans. Abandons et expulsions constituent autant de déchets et alimentent le chômage. Il est devenu axé sur la matière à enseigner et non sur l’homme à former. Alors qu’on apprend toute la vie, on accable l’enfant de matières et on néglige la formation du caractère, l’éducation du cerveau, l’apprentissage de la création et de l’autodétermination et de l’autodéveloppement. Une passivité totale qui conduit à la médiocrité. Certains ont parlé de «fabrique de chômeurs», parlant de l’université.

La création de l’école de base a permis de réduire les «déchets» mais n’a pas évolué dans l’éducation de l’homme et la formation de son caractère comme l’a réalisé l’école de base en Finlande qui a été établie en même temps que la nôtre. Le cycle du secondaire n’a pas été touché par la réforme. Celle-ci consiste principalement à en faire un cycle de préparation à la vie et à l’exercice d’un emploi et ce, en organisant ce cycle en conséquence, en faisant participer l’entreprise et en jumelant la connaissance de l’économie et du travail avec le perfectionnement des connaissances générales. Cette liaison entre école, économie et travail dans ce cycle est primordiale comme l’ont réalisé les pays avancés dans ce domaine tels que le Japon, la Corée du Sud et la Finlande. A la sortie du cycle secondaire, le jeune de 19-20 ans doit commencer à savoir ce qu’il veut devenir, s’y préparer et le parfaire à l’Université.

L’Université doit être libérée au point de vue du recrutement aussi bien des étudiants que des enseignants, des programmes et de leur contenu. La création d’une émulation contrôlée est nécessaire. L’uniformisation est désastreuse, les êtres humains n’étant pas standardisés. Aux USA, il y a Havard et MIT et aussi de nombreuses autres universités de différents niveaux pour permettre à chacun de trouver «chaussure à son pied».

La réforme est urgente. Une étude de l’OCD (2)  a montré que 60% des étudiants tunisiens quittent leurs établissements sans avoir acquis les compétences de base alors que 90% les acquièrent dans les pays asiatiques dont Singapour, Hong Kong, Corée du Sud, Japon et Thaïlande et aussi dans d’autres pays en Europe : Finlande, Suisse, Pays-Bas.

L’étude indique que si en Tunisie 90% des élèves parviennent à acquérir les compétences de base, le pays pourrait multiplier son PIB par plus de 10 sur le long terme.

Les aménagements du système de l’éducation sont essentiels pour lui permettre d’apporter sa contribution au problème de l’emploi. Il faut les réaliser le plus tôt possible. Ceux concernant horaires, programmes et matières pourront suivre sans grand inconvénient.

II / Le problème du déficit des finances extérieures et de l’endettement

Réduire le déficit des échanges avec l’intérieur s’impose. Ce déficit existe depuis l’indépendance et ne fait que s’aggraver. En effet, l’exportation de biens, c’est-à-dire de marchandises, ne couvre que 70% environ de nos importations. Ce déficit commercial s’aggrave de plus en plus et a atteint environ 15 milliards de dinars l’année dernière, en 2014. Il doit être couvert : il l’est en partie grâce à l’excédent provenant des échanges de services alimentés principalement par les recettes touristiques et les transferts des Tunisiens résidant et travaillant à l’étranger.  Mais cet excédent n’est pas suffisant pour résorber totalement le déficit commercial. Il faut donc emprunter et s’endetter en devises pour couvrir ce déficit résiduel. Mais cela ne suffit pas car il faut rembourser le principal des dettes contractées durant les années antérieures, les intérêts l’ayant déjà été dans le cadre de la balance courante qui comprend les échanges de biens et de services.  Pour rembourser ce principal, nous sommes obligés de nous endetter aussi et c’est ainsi que la dette extérieure ne fait que s’aggraver, mettant en cause le crédit du pays vis-à-vis de nos partenaires. Parvenir à avoir un excédent des exportations de biens et services nous permettra de couvrir le déficit courant et le remboursement du principal de la dette est un objectif ambitieux mais nécessaire pour un pays souverain désireux de sauvegarder son indépendance.

Que faut-il faire devant une telle situation?

1. Un budget devises annuel et une projection pluriannuelle.

D’abord mettre de l’ordre et de la rationalité dans ce domaine. On doit, à cet effet, établir un budget devises de la nation à l’exemple du budget dinars du pays, c’est-à-dire une prévision préétablie de nos importations et de nos exportations de biens et services avec chaque pays et globalement pour pouvoir opérer des choix et parvenir, fût-ce progressivement, à un équilibre entre les deux catégories et ne pas aggraver l’endettement. On peut l’établir durant la période 2016-2020 dans le cadre du prochain plan, qu’il est urgent de confectionner.

2. Reconsidérer les rapports d’échanges avec l’extérieur

Pour pouvoir le faire, des décisions importantes sont à prendre. Dans le cadre de l’état actuel de nos rapports avec nos principaux partenaires, surtout européens, il est difficile d’y parvenir puisqu’on vit actuellement sous le régime de la liberté totale des échanges avec l’Europe. Cette liberté devait s’accompagner d’un renforcement considérable de l’aide extérieure européenne et d’investissements européens importants dans les différents domaines économiques de manière à rapprocher un tant soit peu en 12 ans, durée de l’accord, le niveau de développement de la Tunisie et lui permettre de résister à la concurrence avec les pays ayant atteint un stade beaucoup plus élevé depuis déjà longtemps. Ce système n’a pas fonctionné. L’aide extérieure n’a pas changé de volume. L’investissement extérieur non plus du fait de la corruption du régime Ben Ali et du désordre consécutif à la gestion de la Révolution par la Troïka.

Or inconscience ou ignorance, certains réclament une plus large liberté par l’ouverture du marché vis-à-vis de l’extérieur sans trop se préoccuper du sort du pays. Dans la vie d’un pays, il arrive qu’on doive faire face à des situations difficiles. C’est le cas aujourd’hui. Il faut, comme mesure de sauvegarde prévue dans ce genre d’accord, prévoir une suspension des mécanismes actuels et instaurer un contrôle de nos affaires pour un meilleur équilibre entre les prestations et permettre à nos industries de redémarrer, l’importation libre fonctionnant comme un obstacle majeur dans ce domaine qui ne profite qu’au secteur commercial. On préfère aujourd’hui importer des portes au lieu de les fabriquer et avoir affaire au fisc, au syndicat et à la grève. Un exemple parmi tant d’autres.

3. Encourager le développement des exportations

Il ne suffit pas en effet de limiter et de contrôler les importations, il y a lieu en même temps d’encourager l’exportation et les exportateurs comme pour l’emploi et les investisseurs.

On s’est aperçu de l’insuffisance de nos exportations depuis le début des années 1970. On vivait sur un marché intérieur fortement protégé, ce qui ne favorisait guère l’existence de prix compétitifs permettant l’extension de l’accès aux marchés extérieurs. Il a fallu réduire la protection du marché intérieur par la limitation des autorisations et des contingentements. Il fallait en outre favoriser l’exportation et ce fut la loi d’avril 1972 dont l’objectif est de multiplier les entreprises achetant ou fabriquant des produits tunisiens et les exporter.

On a distingué entre les entreprises ou des services et produisant uniquement pour l’exportation et qui appartiennent à des personnes physiques ou morales de nationalité étrangère. Pour les inciter à investir en Tunisie, on a voulu leur éviter les complications et les retards qui peuvent en résulter et rendre difficile l’exportation qui est un marché plus rigoureux sur la qualité et les délais. Et on les a, à cet effet, libérés du fisc et du contrôle des changes à l’importation. Ils avaient l’obligation d’acheter en devises en Tunisie les produits et les services eau, électricité, transport, logement, main-d’œuvre, etc. nécessaires à la fabrication de leurs produits. Ils n’avaient pas le droit de vendre sur le marché intérieur pour ne pas concurrencer les produits tunisiens. La loi concerne également les entreprises partiellement exportatrices et appartenant à des Tunisiens seuls ou associés à des étrangers et résidant en Tunisie. Les revenus provenant de l’exportation sont exonérés de l’impôt et les recettes en devises de l’exportation doivent être rapatriées en Tunisie.

Cette loi dure depuis plus de quarante ans et elle contribue largement à réduire le déficit de la balance courante qui, autrement, aurait été beaucoup plus important et aurait nécessité un endettement beaucoup plus élevé. C’est ce qui explique que malgré les critiques, parfois démagogiques, qui lui ont été adressées, elle fonctionne toujours. Les plus zélés de ces critiques, dont bizarrement la Banque mondiale, ont voulu taxer  les entreprises exportatrices, ce qui est une façon de les inciter à quitter le pays, ne pouvant s’accommoder des perturbations que leur aurait causé l’introduction du fisc dans le circuit de l’exportation.

Et pourtant, l’Europe comme les Etats Unis ne se privent guère de favoriser de plusieurs façons l’exportation de leurs produits et services. Cette loi est non seulement à garder mais elle pourrait être améliorée en exonérant les entreprises partiellement exportatrices de l’impôt, proportionnellement à la partie de leur chiffre d’affaires exporté. On peut aussi, comme pour l’emploi, déduire de l’impôt payé totalement ou partiellement le montant investi dans l’exportation sur une période de trois à cinq ans suivant son importance.

Bref, devant l’ampleur du problème de l’emploi et celui du déficit extérieur, on devrait pouvoir accorder aux entreprises qui créent des emplois ou exportent des produits et services toutes sortes d’avantages possibles sans avoir jamais à le regretter, leur action étant de nature à améliorer le sort des jeunes à la recherche d’un emploi qui sont de plus en plus nombreux ou à mieux protéger le pays d’un déficit de plus en plus important et d’un endettement de plus en plus excessif.

Cette perspective et cette vision sont de nature à faire reprendre confiance dans l’avenir du pays et à s’engager dans l’effort national pour reprendre le chemin vers le développement, la croissance et le progrès.

III / Conclusion : la réforme de l’Etat et la sécurité du pays

Les réformes et les décisions que l’on vient d’exposer ne peuvent intervenir efficacement que si la sécurité du pays est rétablie et que la sérénité domine l’activité nationale et la vie sociale. Cette sécurité est aujourd’hui compromise par l’affrontement politique, le désordre, la revendication et l’agitation, l’insécurité et le terrorisme. La population est à peine consciente du danger qui menace le pays, intérieurement et de l’extérieur. On revendique comme si de rien n’était, on veut consommer et on exige des prix stables, on ne se tue pas au travail, on exige tous les droits et on répugne à remplir ses devoirs. L’autorité de l’Etat est mise en cause. Le recours à la menace et au non-respect de la loi devient une seconde habitude. Aucune réforme n’est possible et ne peut aboutir dans un tel environnement. Les autorités responsables doivent mettre fin à une telle situation. Autrement, l’alliance entre les partis au pouvoir devient un facteur de faiblesse à force de concessions réciproques.

Une telle coalition devrait normalement:

 

1. Faire face au terrorisme, des progrès ont été accomplis mais le terrorisme est encore trop présent. Le mont Chaambi et les massifs avoisinants doivent être occupés. Quelques milliers de jeunes doivent être recrutés, entraînés et habiter les lieux munis des moyens nécessaires pour chasser l’occupant. On a entendu un responsable du pays voisin parler de reconnaître «l’émirat» du Chaambi. L’Etat doit mettre fin à cette provocation permanente et y mettre les moyens en réduisant, s’il le faut, d’autres dépenses.

2. Il faut aussi mettre fin à la vague incessante de grèves et d’arrêts de travail. L’UGTT et l’UTICA, qui ont collaboré pour mettre fin à un pouvoir illégal et néfaste, doivent avoir à cœur de dominer leurs intérêts catégoriels pour de nouveau sauver la situation en collaboration avec les autres forces vives du pays représentées par une société civile de plus en plus efficace.

3. Enfin, l’Etat doit retrouver ses forces et son autorité. Pour ce faire, il faut qu’il s’allège de toutes les activités de gestion et les transfère à la société civile, initialement inexistante, pour le faire après l’Indépendance. Il doit se concentrer sur ses activités souveraines, sur son rôle d’arbitre et d’ordonnateur de la vie politique économique et sociale par l’établissement des politiques générales à suivre dans tous ces domaines. L’Etat, par ailleurs, doit se déconcentrer et se décentraliser et associer les populations et les régions comme j’ai eu l’occasion de l’exposer dans le dernier numéro de Leaders.

Ainsi rénové, l’Etat pourra retrouver son efficacité, exercer ses prérogatives, prendre les décisions nécessaires et procéder aux réformes qui s’imposent.

Les autorités doivent avancer dans ce sens sans trop d’hésitation en commençant par les décisions les plus urgentes. Faute de quoi, on ne pourra plus contrôler la situation et on laissera le pays aller à la dérive, ce qui représentera un lamentable échec, échec qu’il faut absolument éviter. L’opinion publique, rassurée par la vigueur de l’action, ne manquera pas de soutenir l’effort entrepris et de l’appuyer fortement. Gardons espoir et observons.

M.M.

(1) Banque de développement économique de Tunisie
(2) Organisation de coopération et de développement économique de l’Europe.

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