Opinions - 11.03.2014

Qui suis-je, où suis-je,

La société tunisienne, par moment, nous rappelle les sociétés les plus primitives dans ses réflexes et ses actions. J’écoutais il y a quelques temps un spécialiste de la psychologie collective, la psychologie des sociétés. Il affirme que ce qui se passe dans notre société est des plus naturels étant donné l’accumulation des inquiétudes, soucis et angoisses qu’elle traverse depuis plus que trois ans et qui touchent aussi bien la vie quotidienne que l’avenir médiat et immédiat. L’insécurité physique, sociale, professionnelle, politique en raison de cette guerre intestine que livrent les partis politiques pour la conquête du pouvoir, du fait de l’échec total de la gestion économique, du fait de l’aggravation du chômage,du fait aussi  de cette poussée déferlante du terrorisme  sont les facteurs aggravants de ces inquiétudes et angoisses.

Sous un autre aspect, du fait de la révolution, le peuple tunisien s’est réveillé en ayant-droit, où tout lui semble légitime, tout se transforme en droit oubliant du même coup ses obligation notamment qu’une révolution exige plus de travail, plus d’abnégation et de patience afin que le changement apporte les fruits escomptés par le peuple qui a brandi haut et fort les devises et slogans de la liberté, de la dignité et de la justice.

Au lieu d’une chance, la révolution s’est donc transformée  en une sanction et le peuple s’est découvert en entité revendiquant plutôt l’assistance que le travail, l’insolence plutôt que la liberté, l’exclusion plutôt que l’union, méprisant au passage les règles élémentaires de la vie en société.

Ce qui m’a tenté d’écrire ces quelques mots, c’est la dernière manifestation des agents de la STEG qui se sont montés contre les énergies renouvelables qui  risqueraient, à leurs yeux, de soustraire la STEG de son statut actuel d’entreprise publique subventionnée et assistée pour un autre statut plus noble, celui d’une entreprise plus viable et équilibrée qui épargnerait  à l’Etat, et partant aux contribuables, des milliards versés au titre de la compensation de l’énergie. Ces capitaux épargnés constitueraintpourtant la chance d’emploi pour une population de jeunes oubliés, de jeunes en panne sociale. Par un geste aussi insensé, à la limite honteux pour cette intelligence tunisienne, ils veulent perpétuer leur statut d’agents économiques qu’on pourrait qualifier d’agents léthargiques et oisifs. Où est passée, donc, cette intelligence particulière et aigue du tunisien qu’on loue dans tous les discours politiques et autres pour avoir mené une révolution douce, qualifiée de printemps.

La révolution ne s’arrête pas au fait d’avoir changé d’hommes politiques et de constitution. Elle part de ce point et son succès ne peut être jugée que par ses résultats, par la suppression de ses causes, par l’accomplissement d’un surcroît de travail et de productivité et non par la défense des privilèges et intérêts acquis et des  rentesconstituées . Dans ce tumulte, dans ce bouillonnement d’évènements, d’actions et réactions, un tunisien humble se demanderait qui il est, est-il ce  même tunisien sage et rationnel ou plutôt cet homme sans dessin dont la seule raison d’être est de vivre à la solde de ceux qui travaillent.

Sur un autre plan, et s’agissant de l’énergie renouvelable, voltaïque et solaire, l’Etat fait encore montre d’absent total. A l’analyse de cette question et des raisons de son balbutiement, l’on relève plusieurs entraves dont principalement:

i – le niveau de la subvention: il demeure très modeste et ne constitue pas l’incitateur suffisant pour imprimer à l’investissement dans l’énergie renouvelable l’élan escompté.

ii – la TVA. Paradoxalement, l’investissement dans ce secteur est soumis au prélèvement de la TVA au taux de 18%, taux supérieur à celui de la subvention accordée !

iii – Si la TVA est réglée au moment de l’investissement, donc au comptant, la subvention, quant à elle, est versée après un délai bien supérieur à un an infligeant ainsi à l’initiateur de l’investissement une charge financière de trésorerie assez lourde.

iv – Au niveau de ces deux facteurs, il est aisé de constater que la stratégie de l’Etat présente des distorsions qui ne sont pas de nature à appâter voire séduire les agents économiques pour l’investissement dans le secteur du voltaïque et solaire. A la limite et en l’absence d’intentions ferme de l’Etat de relever le niveau de la subvention, ou/et de supprimer la TVA, il serait plus judicieux que la subvention soit au moins égale  au taux de la TVA pour que les deux flux se compensent aussi bien en montant qu’en terme de délai.

v – L’investissement dans le voltaïque et le solaire est assez coûteux et exige, de ce fait, la mise en place  de financements  adéquats.  Ni le fournisseur d’équipements, encore moins l’investisseur ne disposent de surfaces financières propres pour engager de telles investissements. Aussi le défaut de ces financements constituera-t-il une entrave majeure à l’explosion de l’énergie renouvelable. Pourquoi notre système bancaire, la Banque Centrale en tête, ne s’avise-t-il pas pour ouvrir un guichet de financement eu faveur des utilisateurs dont le risque de non paiement est presque nul  du fait des facteurs suivants:

  • les calculs d’investissement dans ce secteur donnent généralement une charge de remboursement équivalente à celle que l’investisseur paye habituellement à la STEG. L’utilisateur ne subit aucun surcroît de charge et élimine ainsi le risque de non remboursement au motif  d’incapacité de paiement.
  • Le bénéficiaire du financement court le risque d’une rupture du contrat d’approvisionnement en énergie, lumière et autre, en cas de  non paiement.

Il va sans dire, par ailleurs, que la carence est relevée au niveau du retard, inexpliqué, de mise en place d’un système incitatif d’achat des excédents d’énergie produite.

On ne peut arrêter les forces de l’évolution et du progrès. La Tunisie semble être parmi les tout premiers pays les plus illuminés de la planète. C’est un don du ciel dont il faut tout simplement en tirer avantage. La Tunisie pourrait par ailleurs se transformer en pourvoyeur d’équipements s’il investit adéquatement dans ce secteur et utilise ses capacités existantes en ressources humaines dont le marché tunisien abonde. Un pool d’entreprises privées en partenariat public peut inaugurer cette nouvelle ère de la deuxième République. Sur un autre plan, l’économie pour l’Etat pour l’équivalent de 1.5 milliard de dinars au titre de la subvention de l’énergie n’est qu’un aspect d’un calcul premier. La subvention est un résultat de deux flux, celui des revenus équivalents au paiement des consommateurs et celui des dépenses au titre des importations de cette même énergie, lesquelles sont réglées en devises acquises souvent par endettement. Les économies sont évidentes et l’emploi ne peut qu’être fort et intense.

Si cela se réalise, je saurai, alors, me reconnaître dans ce tunisien aspirant à plus de progrès économique et social, à plus de créativité et d’innovation, un citoyen épris de démocratie, de dignité et d’équité.Ces valeurs ne sont-elles pas celles portées par les jeunes lors de la révolution. Tentons ensemble d’aller de l’avant et de creuser plus finement ces niches porteuses de croissance et d’emplois.


 

Tags : Steg   Tunisie  
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5 Commentaires
Les Commentaires
Monia - 11-03-2014 19:54

Pour la première partie de cet article, il est vrai que les revendications ont crevé tous les plafonds. La raison à cela est que la révolution n' a pas eu de tête, de leader. Elle n'a as eu l'encadrement. Les partis politiques se sont alors livrés à des surenchères sociales pour drainer les voix électorales. Le résultat une société en désarroi et des finances publiques et privées en déconfiture. Le second volet qui traite des nouvelles énergies me parait d'un intérêt très pointu. Les ingénieurs tunisiens se comptent par milliers d'une part et les intentions d'aide à notre pays formulées par l'occident et les institutions internationales d'autre part sont de nature à créer des structures de production industrielle des composants de ces nouvelles énergies. Des enveloppes de dons sont certainement conçues pour ce genre d'investissement. Pourquoi on tarde à engager les processus à cet effet, je vous comprend quand vous ne savez plus qui vous êtes ni où vous vivez. La STEG doit bouger et les banques en parallèle pour donner le ton et montrer que le secteur est bien porteur.

ONS - 11-03-2014 23:03

Si ma mémoire est bonne, le taux de la subvention est supérieur à 18%. Il demeure néanmoins non encourageant à s'abonner aux énergies renouvelables. De toutes manières, l'imposition à la TVA est absurde et n'a pas sa raison d'être. A la limite le paiement d'un net est un moindre mal. Enfin encourager la mise en place de facilités bancaires à taux bas de paiement ne peut que relancer cette énergie propre.

SADIK - 11-03-2014 23:14

Vous n'êtes pas le seul à avoir perdu les attaches et est à la recherche d'un bon port. Malgré cela, vous cherchez une issue aux problèmes du pays. Que Dieu nous aide et qu'il fasse que ce pays sorte du tunnel.

CHKOON - 14-03-2014 14:50

Je me demande où va le pays. E n parcourant les médias, tout ce qui s'écrit, dans les différents thèmes, semble être sensé, applicable sans grands efforts, et pourtant, de l'autre côté,on a une structure d'administration ou elle est obtus, sclérosée ou elle est un super génie puisqu'on ne détecte aucun mouvement. Qu'on nous dise si ceux qui font l'effort de propositions sont réalistes ou plutôt théoriques et n'ont aucun rapport avec la réalité réalité tunisienne. Ceci pourra calmer les esprits comme le mien.

PATIENT - 18-03-2014 16:42

Les gouvernements issus de la révolution ont investi dans les salaires et les indemnités pour leurs sympathisants pour les conduire à leur soutien au prix d'endettements très lourds. Ils ont écarté les vrais investissements créateurs d('emploi pour les jeunes diplômés qui ont fait la révolution. Ce gouvernement, sous la menace encore plus forte de ceux qui possèdent un emploi et non des chômeurs a pris le même chemin que les précédents. Le voltaïque,le solaire et tout autre créneau seront oubliés. Ii ne faut pas s'étonner de cette démarche. c'est la voie qui vous garantit le pouvoir. je suis plus que déçu.

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