News - 20.10.2013

Radios privées:Comment éviter l'anarchie ?

Leur nombre s’accroît au fil des mois, dans une totale anarchie. Sur des toits de maisons, ici et là dans la capitale et dans les régions, des antennes se hérissent et des stations radio commencent à émettre, sans la moindre autorisation...En attendant leur régularisation.

Au dernier recensement, elles sont 13 stations à se lancer sur les ondes, squattant les fréquences. Seules trois parmi elles avaient obtenu en 2011 l’accord de principe de l’INRIC (présidée par Kamel Laabidi) sous réserve de recueillir les autorisations techniques nécessaires.  La Banque Centrale n’a autorisé aucun transfert d’argent. Les services de douane ne mentionnent aucune importation légale de leurs équipements.

Le Centre d’études et de recherches des télécommunications (CERT) n’a validé ni le matériel de leurs studios ni leurs émetteurs. L’Agence nationale des fréquences (ANF) ne leur a pas affecté de fréquences. Et pourtant, elles existent et émettent. Si l’installation des studios n’est pas la plus difficile à faire, celle des émetteurs et la détection précise des fréquences disponibles sont l’œuvre de grands spécialistes qui ne courent pas les rues en Tunisie. Et pourtant, elles émettent. Quelles sont leurs sources de financement et quel est leur modèle économique? Le ministre des Technologies de l’information et de la Communication, Mongi Marzoug, ne veut pas y fourrer le nez. Les finances et le contenu, ce n’est pas de son ressort. Il ne veut considérer que l’aspect purement technique de la question, tout en s’intéressant cependant au rôle central que doit jouer l’Office national de la télédiffusion pour le développement de ce secteur.

«A la HAICA, les autorisations, à nous la technique»

La légalité, rappelle-t-il, relève des attributions de la Haute autorité indépendante de la communication audiovisuelle (HAICA), seule habilitée à octroyer les autorisations et à se prononcer sur le contenu en cas de nécessité. Mais la technique pour ce qui est des fréquences, des équipements et de la diffusion, c’est du ressort des organismes relevant de son département.

«Nous avons attendu avec impatience la naissance de la HAICA, dit-il à Leaders, pour mettre fin à cette situation. L’objectif est d’inviter les stations radio qui ne sont pas en conformité avec la réglementation à régulariser rapidement leur situation et clarifier la démarche pour celles qui comptent se lancer. La HAICA a lancé un avis dans ce sens fixant au 10 septembre dernier l’échéance pour le dépôt des demandes de régularisation et nous attendons donc ce qu’il en sera».

S’il laisse à la HAICA la responsabilité de l’autorisation, le ministre conserve son double rôle effectif : d’abord exercer son autorité en matière de certification des équipements (CERT), d’attribution des fréquences  (ANF) et de monopole de l’Etat en matière de radio et de télédiffusion, mais aussi consolider l’ONT. Cet office qui aligne plus de 40 centres de transmission dont 17 établis sur des montagnes et emploie plus de 600 personnes dont 47% de cadres, doit compter sur ses propres ressources pour fonctionner. Ses recettes proviennent essentiellement des frais de diffusion recueillis auprès des stations radio et des chaînes TV, publiques et ou privées.

Des moyens détournés

Malgré la performance de son infrastructure technologique, la qualité de ses services et la garantie d’une diffusion sans interruption, sauf exception, il fait face aujourd’hui à une rude concurrence. D’abord, celle de ces radios qui installent et utilisent leurs propres émetteurs en toute infraction vis-à-vis de la loi. Mais aussi de celle des chaînes TV, non autorisées jusque-là, qui recourent à des retransmissions par FTP à travers le réseau informatique des opérateurs de télécommunications, pour les émissions qui ne sont pas en direct. Quand il s’agit de retransmissions en direct, elles utilisent des stations mobiles en SNG souvent  installées sur des véhicules et pointant directement vers des satellites. Officiellement, seul l’ONT dispose de ces stations SNG qu’elle met en location, sachant que des autorisations provisoires peuvent être accordées à des chaînes TV étrangères qui envoient leurs équipes en reportage en Tunisie pour couvrir certains évènements. Mais depuis la révolution, deux phénomènes ont été observés en la matière. D’abord, les autorisations provisoires accordées se sont n n n
n n n  éternisées depuis maintenant bientôt trois ans. Mais aussi des stations ont été introduites, on ne sait comment, sans la moindre autorisation, ni le moindre contrôle technique de conformité et émettent en toute illégalité.

Préserver le modèle économique et créer une Media City

La charge financière n’obère pas uniquement l’ONT, mais aussi les stations radio et télé, y compris celles qui sont autorisées. Les tarifs pratiqués sont calculés sur la base des coûts effectifs qui sont bien élevés. En gros, il faut compter près de 100 000 DT par an de frais de diffusion. Si certaines radios peuvent se le permettre, la grande majorité ne peut l’honorer et le taux de recouvrement s’avère très bas. La modestie des ressources publicitaires escomptées devient problématique pour elles et nombre de stations tirent la langue, risquant de mettre la clé sous le paillasson.

L’aide de l’Etat s’est alors imposée sous forme de prise en charge par le budget public, à titre provisoire, sur une période de trois ans (2014-2016) d’une partie des coûts de diffusion. C’est ainsi qu’ils seront réduits de 65% en 2014, 45% en 2015 et 25% en 2016, la différence devant être réglée à l’ONT par l’Etat. Plus précisément, la base de calcul de la nouvelle grille tarifaire tiendra compte de la population couverte et du taux de concurrence des autres stations radio. Une station radio à Gafsa ne doit pas payer le même tarif que celle qui est à Tunis ou à Sousse. Aussi, une station couvrant le Grand Tunis où émettent d’autres radios n’aura pas à supporter seule le plein tarif, même aménagée, un partage équitable est nécessaire.  C’est tout un modèle économique à ne pas casser et qui doit soutenir le développement des médias, affirment à Leaders les spécialistes.

La Tunisie aurait dû disposer depuis des années d’une véritable Media City, abritant studios de radios et de télévisions et centres techniques de diffusion. Eparpiller aujourd’hui les efforts, laisser chacun agir à sa guise est non seulement coûteux mais ne profite guère au secteur. Pour l’histoire, première chaîne arabe par satellite, MBC devait émettre à partir de Tunis et toutes les études étaient finalisées, mais on a préféré la laisser filer. Etape par étape, il va falloir reprendre le dossier en main, en commençant par amener les radios et télés qui ne sont pas en conformité à régulariser leur situation, renforcer le dispositif technique et envisager sérieusement la création de cette Media City avec le concours du secteur privé.

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2 Commentaires
Les Commentaires
sihem - 20-10-2013 09:16

ON ne peut plus compter sur l'Etat dans une démocratie. que la création des instances concernées servent à quelques choses

Karim - 20-10-2013 11:20

L'anarchie est la règle dans ce pays alors pourquoi ce phénomène ne toucherait pas les fréquences radios. ? Combine a la passivité et l'incompétence de nos super dirigeants on a que le résultat chaotique qu'on observe ...

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