Opinions - 21.05.2014

Le principal et l'accessoire

La question des élections continue à susciter le débat; mais il ne se focalise que sur l'aspect tenant à la concomitance ou la séparation des élections législatives et de la présidentielle.

C'est certes un sujet important; mais son impact concerne moins le sort de la démocratie qu'on veut ériger en Tunisie que les chances des uns et des autres d'accéder au pouvoir.

Dans cette polémique, le grand absent demeure l'intérêt pour le peuple de l'organisation de pareilles élections nationales au scrutin retenu qui favorise les grandes formations politiques.

On ne conteste pas l'intérêt d'une telle remarque, mais on l'évacue par ce qui est présenté comme un argument massue : l'obligation du respect de la constitution stipulant l'organisation de ces élections avant la fin de l'année.

Et on ne prend même pas la peine de se demander un instant quel mal il y aurait à ce que cette disposition constitutionnelle relative la date butoir reste provisoirement lettre morte du moment que l'essentiel de la constitution l'est déjà, les droits et les libertés nouvellement consacrés n'étant pas encore entrés en vigueur. Or, quand le principal reste lettre morte, est-il scandaleux que l'accessoire le reste aussi ?

Il est vrai, on nous dit qu'il faudrait une assemblée législative pour s'y atteler; pourtant, l'actuelle tient à rester en place et à garder des compétences législatives. Alors, le bon sens et la logique ne voudraient-ils pas que de deux choses l'une : ou elle se saborde, sa mission étant terminée avec l'adoption de la constitution, ou elle se met immédiatement au travail pour mettre en œuvre les acquis de la constitution ?

Surtout que l'accord est acquis pour le maintien du gouvernement actuel en place. À quoi serviront alors des élections sinon à compliquer les choses et à vider l'opération électorale de tout son sens, les réduisant à une formalité, comme du temps de la dictature ?

Tout laisse à penser, d'ailleurs, que le désintérêt des Tunisiens est grand pour des élections qu'ils perçoivent comme relevant de la comédie. On le verra avec l'opération d'inscription sur les listes électorales qui sera probablement un fiasco retentissant, la période choisie venant corser en plus les choses.

Alors, y a-t-il au moins quelqu'un de sensé dans notre classe politique auquel le pouvoir n'a pas fait tourner la tête pour rappeler que la seule urgence aujourd'hui est de réconcilier le peuple avec la politique ? Or, il n'y a qu'une issue pour cela, le choix d'élections locales, d'un scrutin uninominal et de techniques de la démocratie participative. Tout cela est au reste prévu par la constitution, mais demeurant lettre morte.

Qu'un juste se lève donc parmi nos acteurs politiques majeurs appelant à la sortie du poker menteur actuel!  Qu'il ose faire taire ses ambitions partisanes et plaider la cause d'élections municipales et régionales dans l'intérêt de ce pays.

Politiquement, il agira en patriote; juridiquement et éthiquement, il aidera à retourner la situation guignolesque actuelle d'une démocratie voulue au rabais pour une chance véritable d'une démocratie plus sérieuse, donc participative, que mérite amplement ce peuple.  

Farhat Othman

 

Tags : d   dictature   Tunisie  
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