Opinions - 13.01.2015

La liberté d'expression a-t-elle une limite ?

Encore une fois, je tiens à parler de l’étendue de la liberté d’expression  suite au lâche assassinat des caricaturistes de Charlie Hebdo, dans un acte de vengeance, perpétré par de jeunes français se revendiquant de la mouvance d’el Quaida, au Yemen.

Oui, Charlie Hebdo avait osé tourner en dérision le prophète Mohamed en n’hésitant pas à faire l’amalgame entre Islam et terrorisme.

Qui de nous oserait ,par plaisir, pour faire rire, et  d’un simple trait de plume,représenter le Prophète Mohamed et lui mettre sur la tête une bombe suggérant qu’il est à l’origine des actes terroristes faits en son nom et  donc au nom de l’Islam ?

Un musulman qui se respecte et s’attache à sa religion n’oserait pas le faire.Pourrait, par contre,  y oser, un agnostique, une personne d’une autre religion et ce par, ignorance, haine, plaisir ou intérêt mercantile  en vue de gonfler les recettes de son journal à la suite de ce  qu’on a coutume d’appeler un « buzz » dans le langage journalistique.

Le mal a été fait et plus d’un musulman en a été profondément affecté.

Lorsque des voix se sont élevées pour dénoncer cette atteinte criante au sacré, plus d’une voix s’est élevée pour réfuter ces protestations qui ont fusé à travers le monde musulman, parfois, il est vrai, avec certains excès,au motif qu’elles remettent en cause, selon eux, le principe sacro-saint de la liberté d’expression.

Charlie-Hebdo a été poursuivi en justice par les représentants de la communauté musulmane en France.
Le Président de la République, en exercice, s’est déplacé au tribunal pour soutenir le journal. Hier, dans sa déclaration, ce même Sarkozy, a continué sur sa lancée en parlant de guerre menée par des « obscurantistes » contre la « civilisation ».Obama lui  a parlé « d’atteinte à nos valeurs ».

De quelles valeurs parle-t-il si son pays a osé intervenir, par exemple, en Irak,  détruisant aveuglément des lieux historiques et portant atteinte à la santé des enfants irakiens ?Le Vietnam n’en parlons pas.

Tout le monde, aujourd’hui, s’est mobilisé, dans un même élan, sous l’étiquette  de « je suis Charlie ». Même, ici à Tunis, notre syndicat des journalistes se l’est approprié !

D’un autre point de vue, un Imam connu pour son extrémisme, n’a pas manqué dans son prêche de ce vendredi,  de soutenir les auteurs de ces lâches assassinats et d’inciter son auditoire à la violence.

Deux positions extrêmes aux conséquences graves.

Moi je dis que la liberté d’expression ne doit pas être absolue et donc sans limite. La défendre c’est défendre l’indéfendable.

Pour apaiser certaines craintes légitimes, il ne s’agit pas de légiférer et de poser noir sur  blanc des interdictions et de les imposer à la profession.

C’est aux journalistes français, parce que actuellement les plus concernés directement, et à nos journalistes tunisiens aussi, chacun de son côté, de se pencher sur ce grave problème de l’étendue de la liberté d’expression, et d’établir un code de déontologie qui respecte, au moins le sacré, s’ils ne veulent pas être, peut-être sans le vouloir, à l’origine de violences.

Je considère que l’une des vertus cardinales d’un journaliste est d’être un professionnel car un professionnel connaît ses limites et respecte son lecteur et son auditeur. Etre journaliste professionnel, c’est être responsable.
Il y a en Tunisie, des limitations à prévoir dans la charte telles que la diffusion de fausses informations ou l’atteinte à la dignité des personnes. Je ne veux citer, pour exemple, que l’usage du terme de « tartour » pour un Président de la République et d’autres qualificatifs. J’aurais aimé qu’on lui fasse des critiques sur son action présidentielle sans plus et être plus responsable.

Moi, je « ne suis pas Charlie ».Je ne suis Charlie que si Charlie respecte mes convictions religieuses profondes. Cela ne m’empêche pas de m’incliner sur les tombes des caricaturistes victimes de l’obscurantisme.

Cet obscurantisme n’est aucunement lié à un problème  de « civilisation » comme le prétend Sarkosy. La France n’a pas offert à tous ses enfants la même égalité des chances. Elle n’a pas veillé à contrôler ses mosquées et ses imams.Elle n’a pas coordonné ses efforts avec les pays nord africains, connus pour leur islam modéré, pour propager une culture islamique appropriée, dans les livres et sur les ondes.

La France et l’Occident qui disposent de moyens technologiques puissants pour intervenir sur Internet et certains satellites peuvent brouiller les émissions tendancieuses divulguant un islam obscurantiste. Ils  ne l’ont pas fait, toujours, au nom de cette « sacrosainte » liberté d’expression  absolue mais dont ils récoltent aujourd’hui les fruits amers.

Cet obscurantisme est à nos portes, en Libye. Que vont faire les politiques réunis demain, 11  janvier 2015, à Paris, pour prendre des mesures concrètes et endiguer ce phénoméne ?

Mokhtar el Khlifi


 

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