News - 01.11.2018

Exclusif - Pourquoi la visite du chef du gouvernement italien Giuseppe Conte ce vendredi à Tunis est hautement politique... mais aussi économique

Exclusif - Pourquoi la visite du chef du gouvernement italien Giuseppe Conte ce vendredi à Tunis est hautement politique... mais aussi économique

En choisissant la Tunisie comme premier pays de la rive sud de la méditerranée qu’il visite, ce vendredi 2 novembre, depuis sa nomination en mai dernier à la tête du gouvernement italien, Giuseppe Conte, multiplie des messages forts. En point d’orgue, un entretien avec le président Béji Caïd Essebsi. Puis, déjeuner de travail avec le chef du gouvernement, Youssef Chahed, suivi d’une rencontre avec des dirigeants de principaux partis politiques. Avant de rentrer à Rome, il recevra une centaine de représentants des 900 entreprises italiennes implantées en Tunisie ainsi que de la communauté italienne. Chaque séquence porte son intérêt et sa symbolique. « L’ensemble sous le sceau d’excellence des relations bilatérales, de confiance en la Tunisie, de soutien à la démocratie et de renforcement de la coopération italienne en faveur du développement économique », commente à Leaders depuis Rome une source diplomatique italienne.

« C’est une visite hautement politique, ajoute la même source. Bien qu’il soit chef du gouvernement, Giuseppe Conte, n’est pas le chef de la majorité au pouvoir, comme il est souvent d’usage en Italie. Les élections de mars dernier avaient consacré le Mouvement 5 étoiles, conduit par Luigi Di Mayo, l’actuel, désormais ministre du Développement économique, du Travail et des Politiques sociales et Matteo Salvini, leader de la Ligue du Nord, et porté vice-président du Conseil des ministres et ministre de l’Intérieur. Homme de consensus, Giuseppe Conte a la redoutable tâche de jouer le médiateur entre ces deux locomotives, mais aussi le président de la République, Sergio Mattarella, mais aussi de rassurer l’Union européenne et autres partenaires. Très attaché à son statut politique, il s’y consacre pleinement. » Cet éclairage est utile pour bien situer le caractère de cette visite à Tunis.

Les enjeux de la Conférence de Palerme pour la Libye

« Le chef du gouvernement italien a tenu à porter lui-même au président Caïd Essebsi l’invitation de l’Italie à la Conférence de Palerme pour la Libye (et non sur la Libye) souligne notre source), qui se tiendra les 12 et 13 novembre courant. Elle intervient après celle sur la Libye, convoquée par le président Macron le 29 mai dernier à l’Elysée. Le président Caïd Essebsi s’était distingué à cette occasion par une vision très perspicaces quant aux conditions objectives préalablement requises pour une sortie de crise. Son discours, franc et direct, était marquant, c’est pourquoi sa présence à Palerme est vivement souhaitée. Cette conférence réunira d’abord des dirigeants de nombre de pays concernés, notamment la Chancelière allemande Angela Merkel, le président du gouvernement russe, Dmitri Medvedev, un représentant de haut niveau des Etats-Unis, et d’autres illustres personnalités. » 
Elle aura également le mérite de réunir autour de la même table les principaux protagonistes libyens, notamment Fayez Sarraj et Khalifa Haftar ainsi que des représentants des tribus les plus significatives. Ce tour de table est important, intervenant quelques jours seulement après la présentation que fera l’envoyé spécial de l’ONU en Libye, Ghassan Salamé, le 8 novembre courant devant le conseil de Sécurité des Nations Unies. Il faut s’attendre à ce que Salamé proposera un plan actualisé de sortie de crise, ponctuée par une représentation active et institutionnalisée des tribus. L’approbation de ce rapport par le conseil de Sécurité gagnera en poids, une fois endossé par la Conférence de Palerme. Dans cette dynamique diplomatique, la Tunisie, initiatrice avec l’Algérie et l’Egypte, d’une démarche tripartite, joue un rôle très actif, et très important dont les autres pays concernés entendent bénéficier.

La méditerranée, le terrorisme et la migration 

Outre ce volet libyen, central dans la visite qu’entreprend ce vendredi à Tunis, Giuseppe Conte, les entretiens politiques qu’il aura avec le président Caïd Essebsi porteront sur le rôle de la Tunisie dans l’espace méditerranéen, les relations avec l’Europe, la lutte contre le terrorisme et la question migratoire, avec notamment des mécanismes appropriés de gestion de ses flux. Sur ce dernier sujet, la visite effectuée par Matteo Salvini le 27 septembre dernier et ses entretiens avec le président Caïd Essebsi, avait marqué une avancée significative, appréciée tant à Tunis qu’à Rome. Elle faisait suite à la rencontre à Rome, le 20 juin dernier entre les chefs de diplomatie des deux pays, Khemaies Jhinaoui et Enzo Moavero Milanesi. De son côté, la ministre italienne de la Défense, Elisabetta Trenta, s’était rendue le 23 juillet dernier à Tunisi à l’invitation de son homologue Abdelkerim Zibidi et avait été reçue par le président Caïd Essebsi.

Conversion de la dette et de nouvelles lignes de crédit

Bien que les questions économiques et financières sont beaucoup plus du ressort du ministre Luigi Di Mayo, cette visite ne pouvait les omettre. La Tunisie avait bénéficié, lors de la visite d’Etat du président Caïd Essebsi à Rome, en février 2017, de la conversion d’une première tranche de 25 millions d’euros de sa dette publique, ce qui a profité à six projets déjà bien lancé, indique à Leaders une source tunisienne. Elle aspire, avec l’arrivée d’une nouvelle échéance, à obtenir une deuxième ligne d’un montant équivalent au premier, soit 25 millions d’euros. Aussi, une autre ligne, réservée au secteur agricole, dotée d 50 millions d’euros est en cours de discussion. Tout comme une participation significative de l’Italie au grand projet de développement d’El Mahdeth, au cœur du Sahara tunisien.
Tunis s’attend par ailleurs à l’annonce lors de cette visite de la conclusion d’un accord politique pour la réalisation du projet Elmed, pour les flux électriques entre les deux pays, qui a obtenu la confirmation d’une participation italienne à son financement. Il s’agit à présent, fort de cet accord politique d’aller ensemble à Bruxelles, solliciter une contribution de l’Union européenne en sa faveur.

Les piliers de la démocratie tunisienne

S’il a tenu à rencontrer les dirigeants des principaux partis politiques, Giuseppe Conte a voulu réitérer l’appui de son pays ‘’aux piliers de la démocratie’’ que sont les partis et à leur mission fondamentale lors de cette phase spécifique en Tunisie. Au-delà de toute considération, et des positions des uns et des autres, confie une source italienne, c’est un soutien de principe à un fonctionnement réussi nécessaire pour fonder solidement la démocratie dans le pays.

Et les piliers de l’économie

Aux représentants des 900 entreprises italiennes qu’il rencontrera, Giuseppe Conte lancera un appel réitéré à développer leurs opérations en Tunisie, et d’encouragement à renforcer leurs unités. A travers eux, il incitera les investisseurs italiens qui n’ont pas encore enjambé la méditerranée à s’implanter rapidement en Tunisie et bénéficier de ses potentialités et avantages. En un mot, son message sera, selon son entourage : ayez confiance en la Tunisie.  
Taoufik Habaieb
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