News - 26.10.2018

Férid Ben Brahim - Sortie de la Tunisie sur le marché international des capitaux : Quelques vérités à rétablir

Sortie de la Tunisie sur le marché international des capitaux : quelques vérités à rétablir

La Banque Centrale de Tunisie est sortie, il y a quelques jours, sur les marchés internationaux de capitaux pour le compte de l’Etat tunisien en vue de lever un montant indicatif initial de 1 milliard d’euros. La Tunisie n’a finalement levé que 500 millions d’euros au taux de 6,75% sur une maturité de 5 ans. La décision, qui nous semble sage, de ne pas lever plus est due au coût sans doute excessif qu’il aurait fallu payer pour atteindre le milliard d’euros. La Tunisie envisagerait, selon les investisseurs, de revenir vers les marchés au début 2019 une fois réglés les problèmes de son classement par le parlement européen dans les pays susceptibles d’être exposées au blanchiment d’argent et au financement du terrorisme. Ce classement a malheureusement entrainé la désertion des investisseurs de grande qualité comme les grands fonds de pension et a amené une clientèle d’investisseurs plus spéculatifs. La sortie de la Tunisie en 2019 devrait être concomitante à celle du Maroc qui envisagerait également de lever 1 milliard d’euros.

Le taux de 6,75% est proche de celui constaté sur le marché secondaire de la dette tunisienne qui donnait un rendement de 6,68% sur l’émission de 2017 à échéance février 2024 (5 ans et 4 mois) depuis quelques jours déjà.

Il n’en est pas moins vrai que le taux de sortie de la Tunisie n’est pas favorable puisque des pays comme le Sénégal et l’Egypte, qui sont sortis en 2018, ont eu des taux nettement inférieurs pour des maturités plus longues. La Grèce, certes membre de l’UE mais au rating international identique au notre, a pu payer 300 points de base de moins que la Tunisie sur une maturité de 7 ans.

Le spread de taux entre le Maroc et la Tunisie sur le secondaire c’est à dire entre notre émission à échéance 17/2/2024 et l’émission à échéance 19/6/2024 du Maroc est de 491 points de base (6,68%-1,77%). Ceci est proprement discriminatoire pour la Tunisie et montre la cristallisation au travers de ce rendement de toutes les interrogations qui pèsent sur le pays (politiques, économiques, institutionnelles...).

Pays Échéance Montant levé
(millions euro)
libellé Prix de sortie en % Notation Moody's de sortie Devise Prix actuel du marché en % Rendement actuel du marché en % Close Date Notation Moody's actuelle
Maroc 19 Jun '24 1000 Government of Morocco 3.50% 98,34%   EUR 109,17% 1,77% 19 Jun '14 Ba1
Sénégal 13 Mar '28 1000 Government of Senegal 4.75% 100,00% Ba3 EUR 94,29% 5,54% 13 Mar '18 Ba3
Egypt 16 Apr '26 1000 Government of Egypt 4.75% 100,00% B3 EUR 95,08% 5,49% 16 Apr '18 B3
Grèce 15 Feb '25 3000 Government of Greece 3.38% 99,24% B3 EUR 96,99% 3,88% 15 Feb '18 B3
Tunisie 17 Feb '24 850 Central Bank of Tunisia 5.62% 99,30% Ba3 EUR 94,89% 6,68% 17 Feb '17 B2
Tunisie 24 Oct '23 500 Central Bank of Tunisia 5.75%   B2 EUR     24 Oct '18 B2

La concurrence étant féroce sur les marchés internationaux entre les divers arrangeurs, une émission de 500 millions d’euros ne devrait pas couter plus de 250.000 euros à la Tunisie.

Pour conclure, ne tirons pas sur notre propre camp pour dire que la sortie de la Tunisie est calamiteuse. Il ne pouvait en être autrement. La décision de ne lever que 500 millions d’euros est justifiée dans l’attente d’un meilleur sort pour la Tunisie sur les marchés internationaux.

Attelons-nous de régler rapidement le dossier du GAFI et d’accompagner le rebond de l’économie nationale tout en préparant le plus sereinement possible les échéances électorales. Dans le cas contraire, l’année 2019 sera une «annus horribilis» pour reprendre l’expression de la reine Elisabeth II.

Férid Ben Brahim
Directeur Général de l’AFC
Membre de la Société Française des Analystes Financiers


 

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1 Commentaire
Les Commentaires
le financier - 26-10-2018 16:29

cette analyse est juste si l on souhaite endetté son pays mais il y a d autre levier que la dette international qui aurait apporté ce milliards d euro et ceci sans aucun interet a payer . Il faudrait relire l histoire des crises et des solutions aux non endettement

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