Opinions - 30.11.2015

La Tunisie de toujours face à la folie meurtrière de Daech

La Tunisie de toujours

Lâche, ignoble, barbare : l’attentat perpétré contre la Sécurité présidentielle confirme la sauvagerie de ses auteurs. Ciblant un corps d’élite, vaillant gardien des institutions de la République et de ses symboles, au coeur de la capitale, à quelques mètres du ministère de l’Intérieur, ils ont voulu accentuer d’un cran l’effroi et l’affliction jetés au Bardo, puis à Sousse. Le deuil est immense. Les Tunisiens en sont inconsolables. Même s’ils ne sont plus les seuls à subir cette hargne meurtrière, maintenant qu’ils livrent le même combat que la France, la Belgique et tant d’autres pays contre ce diabolique Etat Islamique.

Croire que les 14 mesures décidées au Conseil supérieur de la sécurité nationale sont suffisantes serait illusoire. Aussi importantes et urgentes qu’elles soient, elles ne sauraient opposer, avec toute l’ampleur et l’efficacité nécessaires, la riposte escomptée, endiguer les flots et éradiquer le fléau. A chaque attaque depuis au moins celle du Chaambi en juillet 2014, des décisions sont prises, déclarant « la guerre au terrorisme », détaillant les actions qui seront entreprises, promettant de réelles réussites. Elles ont toutes montré leurs limites. Si elles ont contribué à limiter les dégâts, elles n’ont pu remplir leur contrat. Triste réalité : le mal est profond, le danger immense. A l’évidence, notre riposte manque de vigueur, de moyens, de cohérence, de leadership, et pour tout dire de stratégie.  Autant de préalables impérativement de mise.

Le nouveau contexte sans cesse plus aggravé impose au moins trois exigences majeures. La Tunisie a besoin d’un chef de guerre, d’une philosophie de guerre et de moyens de guerre.

  • Un chef de guerre ne devrait pas être dans l’architecture actuelle des pouvoirs, à l’instar du président de la République – tout chef suprême des armées qu’il est-,  du président du gouvernement, chef de l’exécutif en titre et fonction, ou du président de l’Assemblée des représentants du peuple, auréolé de sa légitimité constitutionnelle à la tête du pouvoir législatif. Au sommet de l’Etat, tous trois sont aux commandes, mais pas à l’exécution stratégique et opérationnelle et à la coordination indispensable. Désigné vice-Premier ministre ou ministre d’Etat, celui qui sera proclamé chef de guerre doit disposer des attributions et pouvoirs nécessaires pour exercer ses fonctions, sans devoir subir le moindre blocage, la moindre réticence, le moindre atermoiement. La guerre a besoin d’un chef qui commande tous les fronts, au-delà des cloisonnements entre ministères, corps et structures.
  • Une philosophie de guerre qui se nourrit d’une lecture attentive des facteurs de radicalisation de la jeunesse et d’une analyse approfondie des modes opératoires de Daech. Sans ce fondement analytique quotidiennement mis à jour, permettant  une conceptualisation sans cesse affinée, aucune stratégie ne saurait être payante, et aucun plan d’action opérationnel. L’approche doit être globale, large dans son spectre, profonde dans ses objectifs, efficiente dans ses résultats. Un seul maillon de la chaîne rompu, une seule brèche laissée ouverte, et tout sera perdu. Telle une grande équation mathématique à résoudre, une suite logicielle informatique à faire fonctionner, rater une virgule, c’est tout compromettre. La guerre doit être totale.
  • Des moyens de guerre sont en définitive les déterminants de la victoire. De la diplomatie aux armements, des finances aux équipements, des ressources humaines à toute la logistique : les besoins sont multiples et tous prioritaires. Nous devons réunir les moyens, mobiliser les ressources. Le patriotisme des Tunisiens, la mobilisation de la société civile et le sens de l’union nationale constitueront l’appoint nécessaire.

C’est à ce prix et à ce prix seulement que la Tunisie pourra prémunir sa jeunesse contre l’aveuglement, sauver ses enfants égarés, couper l’herbe sous les pieds des takfiristes jihadistes, assécher leurs sources de financement, faire taire leur propagande et avorter leurs sinistres desseins. C’est à ce prix que la Tunisie vaincra Daech, triomphera de cette guerre et donnera au monde une nouvelle leçon de lucidité, de perspicacité, de courage, d’unité, et de réussite. C’est à ce prix aussi que notre pays redeviendra la Tunisie éternelle, celle que les générations successives ont, depuis plus de 3 000 ans, toujours chérie et qui le leur rend bien.

Taoufik Habaieb

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1 Commentaire
Les Commentaires
Salah Hamdi - 01-12-2015 10:45

Bravo cher si Taoufik . Un concentré très profond , bien ciblé , un diagnostic réaliste précis et une thérapeutique politico - militaire ferme et efficace . Une véritable contribution positive au traitement de la crise que traverse notre chère Patrie . Vous m'avez coupé l'herbe sous les pieds ! Amicalement . A bientot .

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