Opinions - 02.11.2015

Tunisie: Course contre la montre

Course contre la montre

Où est la Tunisie dans le nouveau monde en ré-architecture ? Comment est la Tunisie de l’intérieur ? Vue de New Delhi où les représentants de 55 pays, l’Inde et l’Afrique totalisant le tiers de la population mondiale viennent de sceller une alliance stratégique d’avenir, la Tunisie se dessine en quelques traits significatifs. Une feuille de jasmin, senteur d’une révolution soft, Carthage, en rappel de trois millénaires de croisement de civilisations, des barbus, qui se répartissent confusément entre contrebandiers et terroristes, et la Femme. Une femme incarnation de la parité et symbole d’une société civile agissante qui l’emporte sur les partis. Au total, un pays qui fait face à l’extrémisme et au terrorisme, installe sa démocratie et aspire à la croissance.

Ces traits de caractère autorisent légitimement la Tunisie, encore plus auréolée par le prix Nobel de la paix, à occuper une place de choix dans les nouvelles alliances qui se nouent dans la région. Les axes se précisent cependant, aux dépens du pays. Nos positions jadis avancées prennent du recul. Le Maghreb (UMA) est renvoyé aux calendes grecques. La Ligue des Etats arabes et ses promesses relèvent des chimères. L’Union africaine (UA) trime encore. Quant à l’Union européenne (UE), elle entend négocier, à des conditions pas toutes favorables, un nouvel Accord de libre-échange de coopération approfondie (Aleca).

Autour de nous, des acteurs clés globaux s’imposent. La Chine s’engage dans cette grande route devant relier l’Asie à l’Europe en axe central de commerce et de développement. Les Etats-Unis mettent en place un Trans-Pacifc Partenariat. Le Sommet Inde-Afrique jette les bases d’un marché totalisant 1 milliard 256 millions habitants en Inde et 800 millions en Afrique et d’un droit au chapitre au Conseil de sécurité. Imaginez la suite.

En zoomant sur la Tunisie et en la regardant de l’intérieur, on voit le pays engagé dans une course contre la montre, opposant deux protagonistes. D’un côté, des républicains, démocrates, modernistes qui, au prix de longues luttes, ont fait chuter la dictature, fait adopter une nouvelle constitution et élire de nouvelles autorités. Leur combat aujourd’hui est d’installer les nouvelles institutions constitutionnelles, de les mettre en fonction, d’ancrer la démocratie, de stabiliser le pays et de faire décoller l’économie. Chaque minute compte.

En face, les forces conjuguées du crime organisé, de la contrebande, du trafic de drogue et d’armes, de la malversation, de l’extrémisme et du terrorisme. Leur puissance se mesure à l’ampleur de leurs désastres : énorme, destructive, anéantissante. Pour avoir une idée approximative de leur puissance financière, il suffit d’additionner les bénéfices de leurs trafics. Au prix que coûtent le gramme de cannabis (on parle de plusieurs tonnes en transaction), un fusil, un camion ou un container infiltrés à partir des ports et frontières, on réalise les sommes faramineuses récoltées. Où va cet argent ? Son blanchiment prend différentes formes. A commencer par le foncier. Mais une partie, infime par rapport aux montants accumulés, mais suffisamment toxique, va au financement de l’anarchie, l’instabilité, la manipulation de l’opinion publique, la corruption de fonctionnaires, l’infiltration de partis et ONG, l’asservissement d’une presse de caniveau et autres virus inoculés dans le corps social et politique tunisien. Ces puissances du mal y jouent leur business, leur survie, leur immunité.

Ce qui se passe dans certains partis n’est que la manifestation en surface de cette dangereuse déstabilisation qu’entreprennent ces forces du mal avec obstination, agissant à travers des relais sous procuration. Leur objectif est d’attiser l’instabilité, de susciter le chaos, favorables à leurs sombres desseins et à leur pérennité. Leur stratégie est de placer leurs hommes partout dans l’appareil de l’Etat et les instances des partis, syndicats et ONG pour exercer leur influence, protéger leurs intérêts. Plus encore, préparant l’avenir, ces forces se positionnent d’ores et déjà dans les prochaines élections de 2019. Pour elles, la course a bel et bien commencé.

Qui finira par l’emporter ? La Constitution, la démocratie, l’essor économique ? Ou le chaos ? Les délais sont serrés, les enjeux cruciaux et les dangers inimaginables. Entretemps, le nouveau monde s’organise, se structure. La Tunisie est aux abonnés absents. Les retardataires ne peuvent espérer au mieux qu’un strapontin de simple observateur en fond de salle. Faut-il s’y résigner?

T.H.

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1 Commentaire
Les Commentaires
BENHAMED - 04-11-2015 10:26

merci pour votre analyse

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