«Diplomatie populaire», dites-vous !
 La  tenue à Tunis de la conférence du «Groupe des Amis de la Syrie» est à  porter au crédit de la diplomatie tunisienne, même si le choix de notre  capitale pour abriter la réunion ne doit pas uniquement à l’habileté de  notre diplomatie, même si la Russie et la Chine alliées du régime  syrien, ont boudé la réunion. Mais quand on a réussi à réunir un aussi  grand nombre de ministres des Affaires étrangères, dont les ténors de la  diplomatie mondiale, on n’a pas le droit de faire la fine bouche.
La  tenue à Tunis de la conférence du «Groupe des Amis de la Syrie» est à  porter au crédit de la diplomatie tunisienne, même si le choix de notre  capitale pour abriter la réunion ne doit pas uniquement à l’habileté de  notre diplomatie, même si la Russie et la Chine alliées du régime  syrien, ont boudé la réunion. Mais quand on a réussi à réunir un aussi  grand nombre de ministres des Affaires étrangères, dont les ténors de la  diplomatie mondiale, on n’a pas le droit de faire la fine bouche. 
  
  Il faut dire que la diplomatie tunisienne a une longue tradition  derrière elle. Et le rôle qu’elle a joué, surtout dans les années 60  sous l’impulsion de Bourguiba, mais grâce à des diplomates de grande  qualité comme Mongi Slim, compagnon de lutte de Bourguiba, disparu  prématurément en 1969, à l'âge de 61 ans, l’atteste amplement. Il est  grand temps, d'ailleurs, de rendre justice à ce grand militant, nommé au  lendemain de l'indépendance à la tête de la représentation tunisienne à  l'ONU, dont les jeunes générations ne  savent pas grand chose de lui sauf peut-être que l'une des principales  artères de la capitale porte son nom. On a peine à imaginer aujourd’hui le rôle qu’il a joué  dans les instances internationales pour le rayonnement du jeune Etat  tunisien et la défense des causes justes, notamment la révolution  algérienne à l’ONU, en tant que chef de file du groupe afro-asiatique. A  sa mort, le militant nationaliste algérien Mhamed Yazid, lui avait  rendu ce très bel hommage : «Mongi Slim nous a appris à épeler le mot indépendance».  Il a été le premier Africain à avoir présidé l’Assemblée générale des  Nations Unies et le conseiller très écouté du secrétaire général, le  Suédois Dag Hammarskjöeld. On lui doit également la création du Comité  de décolonisation de l’ONU qui a joué un rôle de premier plan dans la  liquidation du colonialisme dans le monde. Il aurait pu aspirer à mieux,  le secrétariat général des Nations Unies par exemple, alors que ce  poste était le monopole des pays scandinaves. Malheureusement, Bourguiba  a fini par prendre ombrage de sa popularité grandissante tant en  Tunisie qu’à l’étranger (comme ce fut le cas pour un autre illustre  tunisien, Ali Belhaouane, surnommé "Zaïm Echabab", décédé en 1958 dont  l'incarcération en 1938 par les autorités françaises a été à l'origine  des évènements du 9 avril et qui dut se contenter de la présidence  de la municipalité de Tunis ), et le rappela à Tunis pour lui confier  des postes subalternes, par rapport à ce qu’il pouvait prétendre,  jusqu’à sa mort. 
  
  Pendant de longues années, Mongi Slim avait incarné cette école  diplomatique tunisienne, une diplomatie tranquille, intelligente et au  final terriblement efficace qui a valu à notre pays des succès  diplomatiques éclatants, comme le vote historique de l’Assemblée  générale des Nations Unies le 25 août 1961, lors de la crise de Bizerte  (condamnation de la France par 66 voix contre 0 et 30 abstentions), à  une époque où les Grandes puissances étaient intouchables.  Une approche  qui est aussi tout le contraire de ce à quoi on assiste aujourd’hui  avec cette diplomatie maladroite, prétentieuse qui multiplie les  provocations gratuites au point d’indisposer nos meilleurs amis et surtout, bien au-dessus de nos moyens. La Tunisie n’a ni le poids  démographique ni le poids financier indispensables pour prétendre  refaire le monde. La diplomatie de Mongi Slim va comme un gant à la  Tunisie parce qu’elle correspond à ses moyens et répond à sa vocation de  pays catalyseur d’entente et de coopération entre les peuples.
Tout à leur souci de se démarquer de l'ancien régime, les nouveaux dirigeants veulent recentrer notre diplomatie. Ils s'y prennent avec le zèle des néophyteset la finesse d'un éléphant dans un magasin de porcelaine. Et puis, de grâce, arrêtons de jouer avec les mots et les concepts. On nous parle aujourd'hui de diplomatie populaire, comme si on avait inventé le fil à couper le beurre, pour masquer le manque de coordination entre les différents centres de pouvoir (présidence, gouvernemenrt et Ennahdha). J’ai eu beau interroger les morts et les vivants, relire mon Burdeau ou mon Duverger, je n’y ai trouvé aucune trace. Il y a UNE diplomatie qui doit ête mûrement réfléchie et définie, dans le cas de la Tunisie, par les trois présidents, exprimée par le président de la République et mise en oeuvre par le ministère des Affaires étrangères par le biais de ses diplomates.
H.B.