Partenaires - 27.02.2022

Pourquoi l'Asie du Sud-Est est-elle à la traîne dans la reprise économique mondiale?

Pourquoi l'Asie du Sud-Est est-elle à la traîne dans la reprise économique mondiale?

Au cours des dernières décennies, l'Asie du Sud-Est était synonyme de dynamisme économique, d'opportunités et de croissance. C'était notamment le cas des six plus grandes économies de l'Association des nations de l'Asie du Sud-Est (ANASE-6), à savoir l'Indonésie, la Thaïlande, Singapour, la Malaisie, le Viêt Nam et les Philippines. En effet, les économies de l'ANASE-6 ont affiché des performances supérieures à celles de la plupart des autres pays en termes de croissance du PIB et d'autres indicateurs d'activité jusqu'au début de 2020. Toutefois, cette situation, qui remonte à plusieurs décennies, a connu un changement notable avec le revirement engendré par la pandémie de la Covid-19. Après le choc occasionné par la propagation mondiale de la Covid-19, les pays de l'ANASE-6 sont devenus des traînards plutôt que des leaders en termes de performance économique à court terme.

Les économies avancées ont connu une reprise rapide après la pandémie. Cette année, soit environ deux ans après le pic du choc de la pandémie, lorsque les activités ont sombré dans une profonde récession, les États-Unis et la zone euro prévoient déjà d'atteindre ou de dépasser sensiblement la tendance de leur PIB avant la pandémie.En revanche, la plupart des économies de l'ANASE-6 sont toujours nettement moins performantes que durant la période précédant la pandémie. La seule exception notable est le Viêt Nam, qui a moins souffert de la pandémie grâce à des politiques efficaces visant à contenir la propagation du virus en 2020 ayant également bénéficié d'une forte demande mondiale en produits manufacturés. 

Estimations actuelles comparées aux estimations pré-pandémiques du PIB en 2022

(écarts en % par rapport à la tendance pré-pandémique en termes de PIB cumulé)

 

Sources: Haver, IMF, QNB analysis

Il convient de souligner que les écarts de croissance entre les pays de l'ANASE-6 et les économies avancées sont devenus négatifs en 2021 et devraient encore être nettement inférieurs aux normes historiques en 2022 par rapport à leurs prévisions de croissance en 2019 pour 2022, si la pandémie ne s'était pas déclarée.Les écarts ont chuté de 289 points de base (pb) au cours de la décennie précédant la pandémie à environ 98 pb prévus pour cette année, après avoir plongé dans une situation défavorable au cours de l'année écoulée. Cela signifie qu'en moyenne, en 2021, les pays de l'ANASE-6 ne croissent qu'environ 1 % plus vite que les économies avancées, au lieu des 2,89 % de sur-performance habituelle.Des écarts de croissance plus réduits indiquent un rattrapage ou une convergence de croissance plus lents vers les niveaux plus élevés de production économique, de productivité et de niveau de vie observés dans les économies avancées.

Écarts de croissance entre les pays de l'ANASE-6 et les économies avancées (écarts en points de base)

Sources: Haver, IMF, QNB analysis

À notre avis, trois facteurs expliquent les faibles performances récentes des pays de l'ANASE-6.

En premier lieu, les différences de taux de vaccination entre l'ANASE-6 et les économies avancées ont une incidence sur le rythme de la reprise. Les programmes de vaccination ont progressé de manière significative dans les économies avancées depuis le début de l'année 2021, tandis que le démarrage de la vaccination a été plus lent dans les pays de l'ANASE-6. De ce fait, les pays de l'ANASE-6 ont été plus vulnérables aux variantes plus infectieuses de la Covid-19, telle que le Delta.

Les propagations du virus et la nécessité d'y répondre ont nécessité plusieurs séries de mesures de distanciation sociale plus strictes dans les pays de l'ANASE-6, empêchant une reprise stable et engendrant un modèle d'activité «discontinu» peu propice. Omicron, bien qu'encore plus infectieux que Delta, n'a jusqu'à présent entraîné que de légères restrictions de mobilité au sein des pays de l'ANASE-6. 

Secundo, l'évolution actuelle des performances économiques relatives par rapport aux normes historiques entre les pays de l'ANASE-6 et les économies avancées est associée à une marge de manœuvre différente en matière de politique monétaire et budgétaire.Les pays de l'ANASE-6, et en particulier les pays à revenu moyen et faible, disposent d'une marge de manœuvre réduite pour relancer leurs économies en périodes de récession.Avec des institutions économiques plus faibles et des fonds propres moins importants, la plupart des pays de l'ANASE-6 ne disposaient pas des ressources nécessaires pour soutenir leurs ménages et leurs entreprises comme le faisaient les économies plus avancées.Si les autorités économiques ont protégé le bilan du secteur privé de la crise pandémique dans les économies avancées, il n'en a pas été de même dans les pays de l'ANASE-6.Par conséquent, un secteur privé plus touché dans les pays de l'ANASE-6 mettra plus de temps à retrouver les niveaux de consommation et d'investissement d'avant la pandémie que ses pairs des économies avancées. En d'autres termes, le secteur privé des économies avancées a été stimulé à la fois par les dépenses et l'épargne après la pandémie, en raison de l'importante manne des transferts  gouvernementaux et d'autres avantages politiques. A contrario, le secteur privé des pays de l'ANASE-6, confronté à des niveaux d'incertitude plus élevés et à un soutien politique moindre, a comprimé ses dépenses et, dans certains cas, a même puisé dans son épargne pour couvrir les pertes de revenus.  

Tertio, le ralentissement en Chine est un vent contraire particulièrement fort pour les pays de l'ANASE-6, en raison de leurs relations commerciales et financières directes et indirectes. La croissance chinoise a un effet multiplicateur important, qui se répercute souvent au niveau mondial et dans les pays de l'ANASE-6. C'est notamment le cas des fabricants exportateurs de la « Factory Asia», tels que la Thaïlande, la Malaisie et le Vietnam, et des producteurs de produits de base, comme l'Indonésie, la Malaisie et les Philippines. Ainsi, le ralentissement actuel de la croissance en Chine, précipité par un important durcissement des politiques monétaires, fiscales et réglementaires, a indirectement affecté les performances économiques des pays de l'ANASE-6.La croissance du PIB chinois a chuté de plus de 18 % en glissement annuel (g/a) à son plus haut niveau au premier trimestre 2021 à 4 % au quatrième trimestre. Cette situation représente une toile de fond très négative pour la croissance dans les pays de l'ANASE-6.
En somme, un démarrage plus lent de la vaccination massive, une politique moins stimulante avec moins de dépenses, une diminution des investissements et de l'épargne ainsi qu'un ralentissement de la Chine expliquent la période actuelle de sous-performance des pays de l'ANASE-6. Toutefois, nous estimons que ce phénomène sera de courte durée. Les causes des écarts de performance observés au cours des derniers trimestres commencent déjà à s'estomper. Les programmes de vaccination se sont intensifiés dans les pays émergents d'Asie, les économies avancées ont commencé à resserrer leurs politiques et la Chine a annoncé qu'elle était prête à relancer lentement son économie. De ce fait, les performances relatives devraient commencer à converger vers les normes historiques en 2023 et 2024.       

Avertissement: Les informations contenues dans cette publication ("Informations") ont été préparées par la Qatar National Bank (Q.P.S.C.) ("QNB"), ce qui inclut ses succursales et ses sociétés affiliées. Les informations sont considérées comme fiables et ont été obtenues à partir de sources réputées fiables ; toutefois, QNB ne donne aucune garantie, représentation ou assurance de quelque nature que ce soit, expresse ou implicite, quant à l'exactitude, l'exhaustivité ou la fiabilité des informations et ne peut être tenue responsable de quelque manière que ce soit (y compris en cas de négligence) de toute erreur ou omission dans les informations. QNB rejette expressément toute garantie de qualité marchande ou d'adéquation à un usage particulier en ce qui concerne les informations. Tous les hyperliens vers des sites Web de tiers sont fournis uniquement pour la commodité du lecteur et QNB ne cautionne pas le contenu de ces sites Web, n'en est pas responsable et n'offre au lecteur aucune confiance quant à l'exactitude ou aux contrôles de sécurité de ces sites Web. QNB n'agit pas en tant que conseiller financier, consultant ou fiduciaire en ce qui concerne l'information et ne fournit pas de conseils en matière d'investissement, de droit, de fiscalité ou de comptabilité. Les Informations présentées sont de nature générale : elles ne constituent pas un conseil, une offre, une promotion, une sollicitation ou une recommandation concernant les informations ou les produits présentés dans cette publication. Cette publication est fournie uniquement sur la base d'une évaluation indépendante de l'information par le destinataire, à ses seuls risques et responsabilités. Elle ne doit pas être utilisée pour prendre une décision d'investissement. QNB recommande au destinataire d'obtenir des conseils en matière d'investissement, de droit, de fiscalité ou de comptabilité auprès de conseillers professionnels indépendants avant de prendre toute décision d'investissement. Toutes les opinions exprimées dans cette publication sont celles de l'auteur à la date de publication. Elles ne reflètent pas nécessairement les opinions de QNB qui se réserve le droit de modifier toute information à tout moment et sans préavis. QNB, ses administrateurs, ses dirigeants, ses employés, ses représentants ou ses agents n'assument aucune responsabilité pour les pertes, les blessures, les dommages ou les dépenses qui peuvent résulter ou être liés de quelque façon que ce soit à la confiance accordée par toute personne à l'information. La publication est distribuée à titre complémentaire et ne peut être distribuée, modifiée, publiée, réaffichée, réutilisée, vendue, transmise ou reproduite en tout ou en partie sans l'autorisation de QNB. A la connaissance de QNB, les Informations n'ont pas été examinées par la Banque centrale du Qatar, l'Autorité des marchés financiers du Qatar ou toute autre autorité gouvernementale, quasi-gouvernementale, réglementaire ou consultative, que ce soit au Qatar ou en dehors, et aucune approbation n'a été sollicitée ou reçue par QNB concernant les Informations.