News - 12.05.2020

Je suis endetté, donc je suis

Je suis endetté, donc je suis

Qu’ont les humains en commun à part leur patrimoine génétique ? Leurs dettes.

Le montant de la dette mondiale avoisine les 230.000 milliards d’euros. Soit près de 32.000 euros par terrien.

Ce chiffre comprend les dettes contractées par les Etats, les entreprises et les particuliers.

Mais que signifie une dette ? C’est ce que doit- rendre-une personne (débiteur), à une autre personne (créancier).

Ce concept est valable pour les dettes financières mais aussi morales (gratitude, redevabilité).

Les sumériens (actuel Irak) à l’antiquité déjà, six mille ans avant l’ère commune (AEC), avaient développé la dette vis-à-vis de leurs paysans. Lesquels s’endettaient au prix de leur liberté et de celles de leurs enfants pour travailler leur terre. La servitude était le seul moyen de s’acquitter du remboursement de leur dû.  Les rois sumériens disposaient du droit d’amnistie pour annuler les dettes pour garantir la pérennité d’un tel système.

Le concept n’a pris aucune ride depuis. On ne prête qu’à ceux qui ont une servitude potentielle à céder.

Toute l’économie est basée sur la croissance : vendre/acheter. Toujours plus. Payé/être payé en papier. Un papier imprimé à volonté par les banques centrales sans aucune contrepartie ou garantie d’échange en or. Sans cette « économie » nous ne serions donc pas et la vie ne vaudrait rien. Même un philosophe comme André Conte Sponville s’y met pour nous dire à quel point cette économie précède notre vie ou notre « bonheur ». 

Il est plus naturel qu’un banquier nous assène des perles du genre: « Un cycliste est un désastre pour l’économie. Il ne s’endette pas pour acheter une voiture, ne contracte pas d’assurance, ne paie pas de carburant, de parking, de réparations, ne fait pas d’accidents mortels, n’est pas obèse … »

Et qu’on comprenne une fois pour toutes qu’un cycliste ou un piéton ne participent en aucune façon à l’économie et de ce fait, sont des parasites.

Le citoyen modèle est un consommateur qui ne pense pas, qui s’empiffre de produits industriels jusqu’à la maladie et l’overdose créatrices d’emplois et de richesses. Qui vend son temps de vie pour quelques billets et s’endette pour acheter, encore et toujours, en vain auprès de ses propres créanciers.

Il faudra qu’il fume, qu’il boive, qu’il tue sur la route, chez lui un maximum pour générer de la richesse auprès des états leveurs d’impôts et des lobbys meurtriers.

Le tabac tue certes mais il est en vente libre et plus de 80% de son prix tombe dans les caisses des états qui en assurent la distribution. L’addiction et la maladie institutionnalisées.

Le sucre rend obèse ? Mangez-en encore plus.  Le sel tue ? Il faut en mettre plus dans tous les produits, y compris dans les bonbons. Deux en un. Notre cynisme est illimité.

Le citoyen modèle livrera sa progéniture au marché du vaccin, de l’éducation mortifère et abêtissante, du réseau social lieu par excellence de l’insignifiance, et au formatage mondial de la croissance à tout prix pour agrandir le parc à idiots, dociles. Qui accumulera la dette en achetant comme ses parents le font.

Les états font de même. Ils émettent des obligations. Ils empruntent à d’autres états, aux banques ou à leurs propres concitoyens. Pour financer des guerres, ou leurs dettes pharaoniques. Leur servitude n’à rien à envier à celle des humains qu’ils sont censés gouverner. Ils accumulent de la dette sur la dette. Les vénitiens déjà à l’époque avaient mis toutes leurs dettes en un immense tas appelé cyniquement (El monte) qui a abouti au rachat de la cité par quelques familles.

Si les états ne remboursent pas leurs mensualités, ils doivent concéder une servitude proportionnelle à leur dette. En général leur souveraineté et celle de leurs peuples déjà asservis.

Et si par malheur, ils arrivent à la rembourser ils sont montrés du doigt comme étant de mauvais joueurs et l’embargo pointe alors le bout de son nez.
Ainsi la dette fait tourner le monde. Mais mal. Très mal. Et nous demeurons, silencieux. Acheteurs de produits inutiles, qui s’accumulent dans nos habitats à crédit, avec les bouts de papier concédés pour nos vies de travail. Endettés et heureux de l’être.

Si la dette asservit le débiteur elle élève le créancier au rang de seigneur. Et les seigneurs saignent. Et ont des courtisans par milliers, qu’ils appellent rois pour exécuter leurs basses besognes. Ces rois pensent régner sur des califats imaginaires, des terres saintes confisquées et peuplées d’homo économicus pucés et scannés sans répit et des Gigarmarchés appelés continents. Bientôt gardés par des chiens robots pour contenir et mater la bétaillère.

Mais même les rois, surtout les rois, ont des dettes. Qu’ils sont incapables de rembourser. Et leurs montants sont si faramineux que leur servitude n’est même pas imaginable pour nous autres. Qui devra la porter ? Qui portera le lourd fardeau des dettes de ces incompétents qui nous gouvernent par procuration ?

Ceci nous amène à nous poser la question de l’incompétence qui régit ce monde.

Pourquoi sommes-nous gouvernés par des incompétents notoires ? A part quelques exceptions notoires, la médiocrité et l’incompétence règnent sans partage sur le globe.

Pour la même raison : la dette.

Qui n’a pas souffert dans sa vie d’un patron incompétent ? Qui ne s’est pas posé la question mille fois : Mas comment est-il (elle) parvenu(e) à ce poste si sensible avec tant d’incompétence flagrante à son actif ? Comment se maintient il (elle) à ce poste ?

La réponse est simple : promouvoir la compétence n’engendre ni la loyauté ni la reconnaissance. Ce n’est que justice pour le promu méritant.

En revanche promouvoir un incompétent crée de la dette. L’incompétent est l’éternel débiteur de celui qui le promeut (le créancier).

L’incompétent sera alors loyal et servile ad nauséum. Il placera aussi ses poulains partout en suivant la même logique. Une pyramide de Ponzi de l’incompétence sans fin.

Une pyramide toxique à l’infini gouvernant un troupeau. Et à la tête de la pyramide, cachée par des nuages, quelques seigneurs ghettoïsés caressant des rêves divins.

Le troupeau devient alors menaçant et brandissant tour à tour l’orange ou le jaune pour protester contre sa servitude.

Alors le troupeau fut confiné, sa dette surmultipliée et l’outil de remboursement de sa peine, ravagé. Que lui restera-t-il ? Encore plus de servitude et un peu moins d’amnistie.

Tristes temporalités. Le troupeau déconfiné s’empressera de faire la queue pour acheter des chiffons à porter, pour paraitre. Avec les allocations de son chômage à venir.

Notre génération a souffert au vingtième siècle du mal être existentielle et nous avons été bombardés par l’industrie du bien-être et de la bigoterie bien pensante.

A l’aube du vingt et unième, inauguré par une « pandémie », règne déjà le non être. Les puces nous redonneront une raison d’être. Virtuelle. Et la compétence ne sera même plus un mot prononçable.

Des lois sanctionneront ceux qui oseront le prononcer.

C’est cela qui est en train d’être réalisé. ID2020 alliance, déplore qu’il reste plus encore plus d’un milliard d’humains non traçables électroniquement. Encore un effort. Plus qu’un petit milliard. Et tout le troupeau sera dans la bergerie.

Dans « le jouet », un film de Francis Weber dans lequel le fils d’un redoutable milliardaire (Michel Bouquet) achète un journaliste pour jouer une scène qui illustre à merveille mon propos.

Qui est le plus à blâmer, disait le milliardaire à son adjoint (un lumineux Jacques François), celui qui vous demande de vous déshabiller devant tout le monde ou celui qui le fait ?

Habib Habib