News - 26.02.2020

Un divan à Tunis : la Tunisie se livre sur ses tourments post-révolutionnaires

Un divan à Tunis : la Tunisie se livre sur ses tourments post-révolutionnaires

Pour son premier long-métrage, la comédie dramatique de Manele Labidi donne un grand coup de pied dans les clichés.

Selma, une trentenaire française d’origine tunisienne revient au « bled » pour s’y installer en tant que psychanalyste. Elle ouvre son cabinet en banlieue de Tunis à Ezzahra. La psychanalyste est interprétée par une magnifique Golshifteh Farahani, excellente en psychanalyste pleine d’écoute avec du caractère, accompagnée par Majd Mastoura, Aïcha Ben Miled, Feriel Chammari et Hichem Yacoubi.

Manele Laabidi se livre sur la naissance du film et le personnage atypique de Selma. Pour elle, la naissance de son projet a été déclenchée par la révolution : « La révolution a rendu le pays tout d’un coup « bavard » après des décennies de dictature et c’est cette effusion de parole intime et collective que j’avais envie de traiter ». Quant au personnage de Selma, il est tout en mystère et en silence signifiant : « Le personnage de Selma est atypique même si l’on sort du cadre purement tunisien. Je tenais à créer un personnage de « cow-boy », taiseux, solitaire, mystérieux, viril, qui ne cherche pas son salut dans une vie de famille ou une relation amoureuse. »

Surprenant, attachant et plein de dérision : le postulat sur lequel s’appuie Un divan à Tunis est plein de paradoxes et de double sens. D’abord, une Française d’origine tunisienne décide de revenir au pays d’origine de ses parents : sachant que la tendance migratoire est plutôt inverse, il s’agit d’une situation qui en étonnerait plus d’un. Puis, elle part s’y installer en tant que psychanalyste, dans un quartier qui en est dépourvu : la psychanalyse semble une montagne pour beaucoup, qui y voient un tabou, et qui nieraient même son rôle. L’on pourrait encore et encore décortiquer le scénario, à n’en plus finir : les rondeurs du films et ses courbes narratives recèlent d’un grand nombre de recoins où l’on pourrait s’y perdre. Le film joue constamment à l’équilibriste entre deux tendances. Et cet équilibre délicat à maintenir représente la quête continue de sens de chacun des personnages.

S.Boussen