Opinions - 30.08.2018

Mohamed Nafti : éloge de la dictature

Mohamed Nafti : Apologie de la dictature

Il ne reste plus que quelques mois pour organiser les élections de 2019. Et comme  on dit jamais deux sans trois, elles seront, comme celles de 2011 et de 2014, démocratiques. Le  monde entier félicitera la Tunisie  pour cette action grandiose. Mais le rêve d’une bonne partie de la population  sera-t-il jamais réalisé ? A vrai dire, on n’attend plus rien des élections, puisque rien ne va changer. A sept années de vaches maigres, succéderont cinq autres années maigres. Car ce territoire mal reposé et mal gouverné ne suscite plus aucun espoir et aucun rêve.

Ma pauvre Tunisie
Tu rêves tu rêves tu rêves tu rêves
Mais tes arbres n’ont plus de sève
Et tes branches n’ont plus de fruits…
( S. Reggiani)

La Tunisie a expérimenté le gouvernement de la  Troika, le gouvernement des Technos, le gouvernement du Consensus et le gouvernement d’Union Nationale de Carthage (allusion à l’entente de Carthage) mais rien ne réussit. Pourquoi ne pas adopter le gouvernement à la Romaine. Une Dictature à la romaine.

La Dictature romaine sous la république a été instaurée pour gérer une situation d’urgence le plus efficacement possible. Une situation d’urgence née d’une crise politique interne par exemple, d’un désastre économique, sociétal ou environnemental. C’est un peu le cas de la Tunisie aujourd’hui. Le Dictateur était élu (démocratiquement) pour un  mandat de six mois, renouvelable une seule fois et avait pour mission de remettre le pays sur la bonne voie. Du temps de Rome, si le dictateur ne réussit pas, il est emprisonné à vie ou au pire des cas il aura la tête tranchée. On n’en est pas là. L’essentiel est que son travail soit évalué et jugé.

On dira qu’en Tunisie, la dictature c’est du passé. On répondra que notre société a besoin d’une Dictature. Notre maitre à penser, Ibn Khaldoun, dans sa théorie du pacte social, conçoit que la société a besoin d’être gouvernée par une autorité répressive. La Tunisie indépendante a été gouvernée par Bourguiba qui demeure l’idole d’une large partie de la population et qui, sans minimiser son action grandiose en Tunisie, n’est pas du tout démocrate et qu’on pourrait l’assimiler à un Dictateur romain. Aujourd’hui, la Tunisie respire la Dictature dans tous les aspects de la vie, exceptée dans le gouvernement. Et c’est ce paradoxe qui est la source de tous nos maux. On subit la dictature de l’Informel dans tous ses états. L’économie est rongée par la dictature et la corruption. L’éducation est saignée par la dictature de l’incompétence. La Justice subit la dictature de la peur et de l’insécurité. La société est entrainée par la dictature de l’extrémisme religieux. En fait, nous nous accommodons bien de la dictature.

Que nous réserve la rentrée ? Des titres obscurs dans  les  journaux ces dernières heures. Une rentrée scolaire houleuse, un remaniement ministériel  sans utilité, des mines à Chaambi, une faillite des caisses de retraite, un départ du chef du gouvernement, des grèves, des grèves, des grèves qui remplacent les Rêves.

Madame Tunisie
Tu pleures, tu pleures, tu pleures, tu pleures
Mais ce soir je n’ai plus de cœur de partager tes insomnies.
Madame, j’ai envie ce soir d’être infidèle
Dans les bras d’une belle qui ressemble à la vie.
Alors, que doit-on choisir ? La dictature Informelle ou la dictature à la Romaine?

Mohamed Nafti