News - 02.06.2017

Accord sur le climat : Donald Trump choisit l’Amérique plutôt que la planète

Accord sur le climat : Donald Trump choisit l’Amérique plutôt que la planète

Le Mahatma Gandhi avait l’habitude de dire : « Il y a assez de tout dans le monde pour satisfaire aux besoins de l’homme, mais pas assez pour assouvir son avidité ».
En dénonçant jeudi 1er juin 2017 l’Accord sur le climat signé dans la capitale française en décembre dernier par tous les Etats de la terre (sauf la Syrie et le Nicaragua), le président Donald Trump a trahi la planète plutôt que ses électeurs et a prouvé que son avidité  est sans limite. Parlant depuis la Roseraie de la Maison Blanche, Donald Trump a jeté des tombereaux   d’épines à la face des humains et notamment les plus faibles et ceux qui,  aujourd’hui,  subissent de  plein fouet les dégâts du dérèglement climatique.   

Climat…..et FBI ?

A moins que cette fracassante et violente déclaration ne soit destinée à sonner le rappel de tout ce que les Etats Unis ont  de réactionnaire et de nauséabond pour courir au secours d’un président cerné par les affaires et menacé de destitution (impeachment). Le directeur du FBI ne va-t-il pas  témoigner contre lui devant le Sénat ? La classe politique ne se pose-t-elle pas des questions sur l’implication de l’ambassade russe à Washington dans le processus électoral lors de la présidentielle ?  

Il était donc essentiel pour lui de reprendre l’initiative. A tout prix.

Se délier de l’Accord de Paris, d’après l’article 28 de ce traité, exigera quatre années entières, en somme la durée du mandat de l’actuel locataire de la Maison Blanche qui s’achève en 2020. Quel engagement crédible pour le climat sur le long terme pour l’Etat le plus riche de la planète qui s’est pourtant délié des accords sur le climat de Kyoto et de Copenhague ? En fait, note le New York Times (2 juin 2017),  ce sera aux électeurs américains de décider.

Pas un sou pour le fonds vert pour le climat

Par contre, la déclaration de l’homme d’affaires devenu président va immédiatement avoir un impact énorme sur les pays en voie de développement et ceux qui déjà souffrent des catastrophes climatiques. En effet, le Fonds Vert destiné à aider ces Etats à surmonter ces phénomènes climatiques désastreux et à les aider dans leur transition énergétique va immédiatement sentir les effets de du désengagement américain. Les Etats Unis devaient verser trois milliards de dollars à ce Fonds dans le cadre de l’accord de Paris. Ils n’en ont versé jusqu’ici qu’un milliard. Ce Fonds ne va plus pouvoir faire face à sa mission. Verser ces trois milliards est un simple geste de justice climatique car des pays comme le nôtre ainsi que  les pays insulaires et africains n’ont pas eu le développement connu par les pays riches (Union Européenne -et notamment Angleterre, Allemagne, France,  Bénelux-Japon, Amérique du Nord….) lors de la Révolution Industrielle au XIXème siècle, révolution qui a permis leur industrialisation. Au cours de cette période, ces puissances ont déversé d’énormes quantités de gaz à effet de serre et surtout  du   gaz carbonique provenant de la combustion du charbon, de l’anthracite, de la tourbe…et qui ont conduit à l’accumulation dans l’atmosphère terrestre de ces gaz à l’origine des dérèglements climatiques observées aujourd’hui. Leur responsabilité des pays industrialisés est patente dans la crise que vit l’Humanité aujourd’hui. Il est donc normal qu’ils paient pour réparer les dégâts. Jeudi, le fantasque président américain a émis un tonitruant NO à la face des pays en voie de développement. Même si les objectifs de l’Accord de Paris sont bien insuffisants – moins deux degrés Celsius à l’horizon 2030- et bien peu contraignants, ils ont eu le mérite d’enclencher une dynamique vertueuse. Donald Trump n’en a cure, enfermé dans un égoïsme sans limite et flattant les sentiments les plus mesquins de ses concitoyens. Trump devrait écouter les sages de l’Afrique quand ils disent : « Qui mange seul, s’étrangle seul ». Homme de bilans comptables, Trump met dans la colonne pertes et profits les réfugiés de l’environnement qui se comptent par millions actuellement ainsi que les dégâts de la sécheresse, des inondations et de la montée des eaux des mers. M. Trump ne tient aucun compte de la biodiversité menacée, essentielle pour la vie sur terre et pour la production agricole. Il ne tient aucun compte du fait que le dérèglement climatique affame des millions d’humains et les chasse de leur patrie. Il ne tient pas plus compte des guerres, des migrations et des pénuries en vue qui vont ajouter au chaos mondial que nous vivons aujourd’hui.

Couvre- feu idéologique aux états unis

Il y a quelque chose d’obscène et d’insupportable dans les coups de menton de cet homme parvenu au sommet du pouvoir aux Etats Unis. D’abord, dans un pays où la crème des scientifiques de la terre travaillant dans les meilleures institutions et les plus prestigieuses universités confirme de manière indiscutable,  jour après jour, le rôle des gaz à effet de serre - et en particulier celui du CO2 -prédit par le chimiste suédois Svante Arrhénius (1857- 1927), le président de ce pays jette par-dessus bord toutes les preuves scientifiques accumulées.  Situation d’autant plus ironique que le GIEC (Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat) a été porté sur les fonts baptismaux  par les politiciens de droite que sont le président Reagan et Margaret Thatcher et qui a mis en évidence la plus grande partie de ce que nous savons  du rôle de la combustion des fossiles sur le climat. Ensuite, c’est à croire que M. Donald Trump ignore les retombées du changement climatique que subit aujourd’hui son propre pays : ouragans dévastateurs très forts, inondations à Manhattan et à la Nouvelle Orléans, sécheresse exceptionnelle non seulement dans la Corn Belt (production du blé et du maïs) mais aussi en Californie, violents incendies en juin dernier dans le sud et l’ouest (en Alaska, Arizona, Californie). Enfin, M. Trump devrait se souvenir que son pays émet le tiers du gaz carbonique de la planète  alors que ses habitants ne représentent  que 4% de la population mondiale. Trump récuse donc la réduction de 26% des émissions de CO2 de son pays d’ici 2025 comme stipulé dans l’Accord de Paris. Parler des émissions de la Chine ne le dédouane en rien car ce pays- le plus gros émetteur aujourd’hui- est quatre fois plus peuplé que le sien et qu’en plus, il a réalisé des avancées significatives dans sa transition énergétique. A l’horizon 2030, la Chine aura stabilisé ses émissions. Et ne l’oublions pas : l’Occident délocalise en Chine et en Inde une bonne partie de ses émissions de gaz carbonique. Alors que la Chine a mis au point une stratégie de sortie du charbon, M. Trump continue une  danse du ventre déplacée et mortifère face au lobby du charbon du Kentucky. Le fait que son pays a aujourd’hui les plus fortes réserves de charbon au monde et que son extraction est très bon marché ne saurait être une raison pour dévaster la planète pour « sauver » 50000 emplois de mineurs –électeurs aux Etats Unis !

Il est de plus en plus clair que M. Trump est déconnecté de la réalité de son pays. MM. Obama, Sanders, Kerry, Al Gore ont condamné sa démarche. Les Etats de New York, de Californie et des Etats côtiers affirment leur maintien dans l’Accord de Paris. Trump divise son pays. De grandes entreprises ne lui emboîtent pas le pas non plus. Peut-être que l’Accord de Paris n’est pas assez contraignant et que son architecture doive être revue à terme, mais nul ne peut mettre en doute sa contrainte éthique.   Quoi qu’il en soi, ces entreprises  mettent en avant la baisse du coût du stockage de l’énergie et la non-attractivité du moteur thermique. L’Inde ne prévoit-t-elle pas de passer au transport électrique dès 2030 ? La Chine veut aller plus vite et plus loin dans la transition énergétique.
Donald Trump serait-il le Dr Folamour du film de Stanley Kubrick alors que le Pape en personne appelle à la protection de la planète ?
L’Amérique d’abord de M. trump, c’est l’Amérique seule !

Un monde est en train de s’effondrer et Trump essaie l’impossible pour le retenir avec un cynisme et une  avidité honteux.
La Chine et l’Inde ont pris maintenant le leadership pour le  basculement vers un monde sans carbone. M. Trump a néanmoins provoqué « une crise utile et mobilisatrice » affirme  Laurence Tubiana, cheville ouvrière française de l’Accord de Paris.

Les pays arabes, eux, sont aux abonnés absents sur ce plan comme sur bien d’autres, hélas ! Cette crise les tirera-t-elle d’un sommeil suicidaire ?
A notre modeste niveau tunisien, réjouissons-nous de cet l’appel d’offre du  Ministère de l’Energie pour développer l’éolien et le renouvelable en Tunisie pour l’obtention de l’électricité comme l’annonce le site de Leaders ce matin fort à propos!

Mohamed Larbi Bouguerra