Opinions - 03.04.2017

Mokhtar el khlifi: Créer de nouveaux partis, est-ce une nécessité ?

Mokhtar el khlifi: Créer de nouveaux partis, est-ce une nécessité ?

A ceux qui ont créé de nouveaux partis ou projettent d’en créer, je dis que vous faites erreur nonobstant les arguments que vous invoquez.

Le pays a-t-il besoin, dans les circonstances actuelles, d’accroître l’effritement de ses forces vives ou plutôt leur rassemblement  face aux grands défis de l’heure?

N’y a-t-il pas une véritable pléthore  de partis politiques suite au mauvais choix de la loi électorale ?

Faute d’un financement préalable public, Il est à craindre que seuls certains pourront en créer, ce qui fausse le jeu démocratique et favorise, en dehors de toute transparence, l’intervention de parties dont les intérêts ne coïncident pas forcément avec ceux de la population. L’ARP a commis une grave erreur sur ce plan.

L’électeur, surtout celui qui n’a pas un véritable bagage politique, se perd dans le nombre de plus en plus grand de partis qui tous lui promettent monts et merveilles.

Chat échaudé craint l’eau froide dit-t-on. Et le bon sens a prévalu puisque  les sondages d’opinion révèlent qu’un trop grand nombre d’électeurs a décidé de ne pas aller voter.

Déjà une grande partie des citoyens en âge de voter, surtout les jeunes, ne se sont pas fait inscrire sur les listes électorales au cours des élections précédentes. Qu’est-ce qui les fera changer d’avis au vu des maigres réalisations de la coalition au Pouvoir ?

On leur dira  certainement qu’on fera beaucoup mieux  que ceux qui nous ont précédés au Pouvoir depuis six ans. Peut-être sont-ils de bonne foi et que certains pourraient leur accorder un préjugé favorable quitte à se mordre les doigts après. D’ailleurs, plus d’un d’entre nous a accordé ce préjugé favorable à BCE et à son équipe. Nonobstant son alliance inattendue et contre nature avec ses  rivaux politiques d’hier que voyons-nous ? A-t-il gagné son défi ? Certes, des progrès indéniables mais trop lents ont été réalisés surtout en matière de défense mais Chaanbi et Semmama continuent encore à être des zones de non-droit. Notre économie piétine encore. Au rythme attendu des taux de croissance de l’économie projetés, il nous sera difficile, dans les prochaines années, d’inverser la courbe du chômage. Par ailleurs, notre modèle sociétal est sur une corde raide d’après ce que l’on voit sur le terrain. Il nous semble qu’on s’achemine vers la consolidation d’Ennahdha sur le terrain avec la  bénédiction de Nidaa ou de ce qu’il en reste et qu’on l’aura au Pouvoir pour plusieurs années encore.

Par quelle baguette magique les nouveaux partis  parviendront-ils à inverser ces tendances, à rétablir rapidement les équilibres financiers du pays, à booster l’investissement en commençant par le national, à arrêter la chute du Dinar, à rééquilibrer nos caisses sociales déficitaires et à engager les réformes tant attendues dont  celle de la justice, de la fiscalité, de l’administration  sans occulter une lutte véritable contre le fléau de la corruption ?

Tous les partis crées et à naître connaissent l’amère situation du pays et n’ont nullement besoin de réaliser des études approfondies. Mais comme leur véritable objectif inavoué est d’accaparer le Pouvoir, ils font tout pour hâter sa chute.

Sachant qu’il sera ma foi difficile pour les nouveaux partis de réunir un électorat significatif ex nihilo, en peu de temps, à la manière de Nidaa de BCE à ses premières heures, ils vont essayer de grignoter sur l’électorat des autres partis centristes qui réagiront à leur manière pour se défendre. Il est à craindre  que les manœuvres électorales, non démocratiques,  vont se développer crescendo.
C’est pourquoi je dis que l’intérêt supérieur du pays nous commande de faire l’économie de ces luttes intestines pour le Pouvoir.
 Si les intentions de toutes les parties sont véritablement bonnes, à gauche comme à droite, c'est-à-dire tirer le pays du marasme dans lequel ses enfants l’ont plongé, il faudrait plutôt unir leurs efforts au lieu de contribuer à leur dispersion.

C’est le rôle dévolu normalement à une ARP  issue réellement d’un mode de scrutin qui   exprimerait la volonté populaire des différentes couches de la population ce qui n’est pas le cas actuellement.
Si le régime choisi eut été un régime présidentiel, avec les gardes fous nécessaires, peut-être ne serions-nous pas dans cette situation.
Pour remédier à cette déficience du Pouvoir qui ne manquera pas de s’accentuer si la couleur de l’ARP deviendrait demain différente de celle de l’exécutif, la société civile  doit de  se mobiliser pour impulser les changements nécessaires.

Les  adhérents aux partis politiques en place qui ne sont pas contents de la façon dont sont conduites les affaires de l’Etat et ceux qui pensent adhérer à de nouveaux partis à créer, pourraient se réunir en Congrès pour arrêter les choix qui s’imposent et les mesures concrètes à prendre.

Dans ce Congrès on y trouvera non pas une gauche irréaliste, une droite tenant à ses privilèges, ou des partisans  d’idéologies désuètes, mais des citoyens  républicains patriotes faisant réellement passer l’intérêt du pays avant le leur et donc prêts à des concessions.

Je crois qu’une UGTT, expurgée de ses éléments extrémistes, pourrait  avoir la force  de jouer ce rôle de sauveur de la République en parrainant cet aréopage.

L’histoire de l’UGTT, lorsqu'elle était guidée par FarhatHached,  s’est montrée à la hauteur des événements.

A une date plus récente, l’aboutissement du dialogue social qui a sauvé le pays de la guerre civile et a été justement récompensé par le Prix Nobel de la Paix, est la preuve que l’histoire peut se répéter.
Pour l’élite responsable l’heure  n’est pas à la multiplication des partis pour détenir les rênes du Pouvoir et défendre certains intérêts, mais à l’Union des énergies que nous impose le choix de ce régime hybride caractérisé par une déficience au niveau de la gouvernance.

La société civile, avec à sa tête l'UGTT, se doit intervenir pacifiquement, cela s’entend, pour opérer les redressements qui s’imposent.
Que voulons-nous au juste ? L’intérêt du pays ou la prise du Pouvoir  à des fins personnelles? Un militantisme pour sauver la barque avec tout ce qu’elle transporte ou la poursuite de gains personnels éphémères?

Le bon sens nous commande d’œuvrer pour rassembler les énergies pour sauver le pays.

Mokhtar el khlifi