Opinions - 11.01.2016

L’accord de Paris d’août 2013 : BCE devrait dire toute la vérité.

L’accord de Paris d’août 2013 : BCE devrait dire toute la vérité.

J’ai cru à l’explication que nous a donnée BCE à propos de son rapprochement avec Ennahdha au vu des résultats des élections qui bien que lui étant favorables, ne lui ont pas permis, néanmoins, d’avoir une majorité confortable à l’ARP, nécessaire à ses yeux pour diriger seul le pays.

Les événements qui se sont succédé viennent d’aboutir à une scission effective au sein de Nidaa qui serait couronnée par la création d’un nouveau parti le 2 mars prochain.
J’ai pensé qu’il s’agissait d’une course au Pouvoir et d’égos démesurés entre le clan Marzouk et celui de HCE et qui pouvait être résolue par la pression morale de BCE.
Mais est-ce  de cela qu’il s’agit?

Certes, la pression morale de BCE est enfin intervenue mais a favorisé, à ma grande surprise, un clan au détriment de l’autre rien qu’à voir la composition et le choix du président de la commission des 13 et la désignation des nouveaux dirigeants de Nidaa annoncée aujourd’hui.

Le Congrès «consensuel» de Sousse a fait émerger HCE comme secrétaire national, chargé de la direction exécutive. Mohamed Ennaceur, Lazhar Karoui Chebbi et Baccouche ont été écartés.

La voie est ainsi balisée pour HCE pour la Présidence du parti, voire la Présidence du pays.

Mais, est-ce la volonté  réelle  de BCE de confier à son fils les destinées du parti qu’il a crée avec quelques uns d’autres ou tient-il à réaliser, grâce à l’appui indéfectible de son fils un autre dessein?

N’a-t-il pas dit, un jour, que Nidaa, en dehors de lui, ne contient pas de grosses pointures?

L’observateur le moins averti, relève que les déclarations d’Ennahdha ne sont plus ce qu’elles étaient après le recours à la politique du consensus.

Il est parfois  difficile de trouver des différences entre les déclarations et les positions des responsables d’Ennahdha et  ceux de Nidaa. Il y a une certaine symbiose  qui saute aux yeux, à ce niveau.

Ennahdha va jusqu’à réserver des surprises au niveau des décisions de son prochain Congrès.

Certains s’attendent même à ce qu’Ennahdha décidera de trancher le cordon ombilical en séparant le politique du religieux, pomme de discorde entre ceux qui ont voté pour Nidaa et la pratique d’Ennahdha lorsqu’elle était au Pouvoir.

C’est le modèle social défendu par Ennahdha qui a motivé plus d’un d’entre nous, et surtout les femmes, à voter Nidaa et BCE.

L’accueil chaleureux réservé au Cheikh par les congressistes  ce  9 janvier et la qualification de son parti et de celui de Nida d’être « les deux ailes d’un oiseau » ce qui a irrité Affek et UPL et en vérité tout démocrate, me pousse à conclure qu’un accord écrit ou verbal aurait en fait été conclu entre BCE et Ennahdha à Paris en 2013 et que BCE serait tenu de respecter et de le faire respecter durant son mandat.

Seul son fils pourrait le faire car personne d’autre ne pourrait emporter sa confiance. Ajouter à cela  que HCE est cautionné par Ennahdha, voire Erdogan.

Ce n’est pas en fait la volonté de léguer à son fils un héritage politique, mais plutôt une obligation politique qu’il aurait prise et qu’il y a lieu de respecter, coûte que coûte, sous peine de perdre sa crédibilité.

Les USA, dans une réaction à chaud, ont retiré leur appui politique, financier et militaire à l’Egypte au lendemain de la prise du Pouvoir par Sissi se démasquant ainsi en révélant leur appui aux partis islamistes.

Rappelez-vous aussi que leur Président Obama a  été vivement intéressé par l’idée de BCE de soutenir que la démocratie  peut coexister avec l’Islam. Obama a même voulu en savoir plus en se rapprochant du siège de BCE à Washington.
Il n’y a qu’un pas pour penser que les USA ont appuyé, pour ne pas dire conditionné, leur aide à une participation d’Ennahdha au Pouvoir.

Par conséquent, la scission de Nidaa   ne peut s’expliquer, essentiellement, que par la divergence  sur la participation ou non d’Ennahdha au Pouvoir.

En vérité, cette grave crise, loin d’être un «nuage passager», ne concerne pas seulement les adhérents à Nidaa et à Ennahdha, mais tout le peuple tunisien.

Le respect qu’on doit à ce peuple justifie que l’accord  qui serait conclu entre les deux « vieux » soit publié, in extenso, pour que ce peuple sache ce qui l’attend dans les années à venir et, en particulier, les lignes rouges que les deux vieux se sont engagés à ne pas franchir.

A cet égard, l’affaire de la mosquée Sidi Lakhmi  et la désignation des Imams n’a-t-elle pas montré les lignes rouges à ne pas franchir?

Si politiquement, et pour l’essentiel, Nidaa et Ennahdha, après son Congrès, ne formeront plus, en fait, qu’un seul parti, il y a là une négation de la démocratie et un retour en fait à un parti unique déguisé.

Une élection n’a plus de sens entre deux partis qui ne forment en fait qu’un. D’ailleurs, n’a-t-on pas pensé à des élections municipales avec des listes communes?

Ceci a pour corollaire la nécessité de l’émergence d’une force politique crédible nouvelle pour faire contrepoids à ce conglomérat.

Personnellement, Je compte sur les femmes et les jeunes pourvu qu’on les motive pour qu’ils s’inscrivent aux élections et  dans certains hommes politiques qui ne se sont pas encore" mouillés", sinon je ferais mes adieux à la démocratie.

Cet accord de Paris est en outre fragile et périlleux car il  ne dépend que de la volonté de deux personnalités politiques âgées.

Pour devenir pérenne, cet accord a besoin, non pas des résultats des dernières élections qui n’ont pas en fait départagé les deux partis, mais d’un appui ou d’un rejet populaire net qui ne peut être obtenu que par voie référendaire.

Le peuple tunisien est mûr dans son écrasante majorité et ne peut accepter d’être le témoin d’un accord qui se serait fait à son insu avec toutes ses conséquences.

Je cherche à comprendre, par exemple, pourquoi mon pays à adhéré à l’accord de lutte contre le terrorisme, initié par l’Arabie saoudite et comprenant exclusivement des pays sunnites mais  d’où l’Algérie est paradoxalement absente avec laquelle nous avons pourtant 2000 km de frontières et un ennemi commun!

La confiance ne peut être rétablie dans BCE et dans son équipe que si les détails de l’accord étaient publiés.

Et au  peuple tunisien d’accepter ou de rejeter cet accord par référendum.

Pour l’instant, je ne puis donner mon appui à Mohsen Marzouk qui se propose de créer un nouveau parti tant qu’il n’aura pas fait de mise au point concernant les graves accusations portées à son encontre, successivement , par HCE, Ons Hattab et Baccouche.

Pour une fois, que les politiques  manifestent un peu plus de respect pour un peuple  qui pourrait accepter certaines contraintes pourvu  qu’on adopte la transparence et le langage de la vérité.

11/01/2016
Mokhtar el Khlifi