News - 10.11.2015

Sahara occidental: quelle solution ?

Sahara occidental: quelle solution...

Un ancien secrétaire  d’état américain, Henry Kissinger a soutenu que la diplomatie était -aussi et souvent- affaire de sémantique. Sous ce prisme, les diplomates tiennent le même discours  de principe sur la paix, la sécurité, la démocratie, etc...sans conférer  aux mots la même signification. Par appréhension  des retombées. Sur ce point, ces protagonistes semblent avoir bien digéré la leçon du linguiste Noam Chomsky, aussi longtemps que chacun défend  l'idée qu'il a derrière la tète  et -pour les pays- leurs  intérêts.

C’est pour cela, poursuit -par induction- Kissinger, que certains conflits  émaillant les relations internationales gagneraient à être  plutôt  gérés, dans le temps que résolus dans l’espace.

La question du Sahara occidental  fait –justement- partie de ces conflits qui cherchent désespérément la solution. Depuis plus de quarante ans.

Faisant l’objet de l’intérêt  de la communauté internationale depuis 1966, cette question intéresse au plus haut degré, le Maroc  et le Polisario, les deux parties  disputant  le statut final à accorder  à ce territoire, anciennement occupé par l’Espagne qui s’en était retirée en 1975.

Consécutivement, en février  1976, la république arabe sahraouie  démocratique  (RASD)fut auto- proclamée. Elle annonce la couleur.
«Nous sommes déterminés  à poursuivre  la lutte  jusqu’à la victoire, quels que soient les sacrifices», déclare son premier gouvernement..

Encouragée  par la Mauritanie qui renonce  en 1979 à toute revendication  territoriale sur le Sahara, l’Assemblée  générale de l’ONU adopte  la résolution (3145) relative au principe de l’autodétermination et l’indépendance du peuple sahraoui. Les résolutions antérieures et postérieures du conseil de sécurité  abondaient  dans le sens  de la recherche  d’un «règlement politique juste et durable» à ce conflit  assimilé  à un problème de décolonisation.( 4éme commission).

Et lorsqu'en en 1981,Rabat  accepte le principe de l’autodétermination, une fenêtre d’espoir était entrouverte et  vite refermée après  que le Maroc eut manœuvré (marche dite verte), sans succès pour inclure sa liste additionnelle d’électeurs potentiels. La manœuvre était claire : faire basculer le résultat du scrutin en sa faveur.

L’ONU a  préconisé que ce référendum s’opère selon les chiffres d’un recensement  espagnol datant de 1974.Dés lors, s’ensuivent la construction  -fait accompli- par le Maroc d’un mur de séparation( 1987), la conclusion d’un cessez-le-feu entre les deux belligérants et la mise en place en 1991 de la Minurso (mission des nations unies  pour le référendum  au sahara occidental.) La mission est prorogée depuis et périodiquement par le conseil de sécurité de l’ONU.

Toutefois, le peuple sahraoui vit divisé depuis 1976. Une partie sous occupation  ( version polisario ), une autre dans les camps de réfugiés à Tindouf (à l’Ouest algérien). Une partie vit dans «les provinces du sud du royaume  «et l’autre» séquestrée»  (version marocaine.) De l’usage des mots.

En juin  2007, le Maroc  et le Polisario ont mené, face à face, et sous les auspices de l’ONU quatre rounds de négociations  à Manhassat, dans la banlieue new –yorkaise.
 Objectif:  négocier «une solution juste et globale «Les négociateurs s’étaient quittés sans résultat substantiel. Le Maroc s’en tient à sa position qu’il qualifie de «réaliste».Il envisage d’accorder une large autonomie -sous sa souveraineté-  au peuple sahraoui, tandis que le Polisario  demande l’application des résolutions  pertinentes de l’ONU  sur l’autodétermination par le biais  référendaire. Constat. Ni les initiatives des ex – secrétaires généraux de l’ONU, ni le plan James Baker ( du nom d’un autre ancien secrétaire  d’état Us  ) ni les négociations  précédentes de Manhassat  et suivantes ne sont parvenues à sortir ce conflit des sables mouvants où il demeure embourbé.

Il ne reste alors à Ban Ki-Moon, secrétaire général de l’ONU  que de dépêcher, dans la région, son ancien- nouvel envoyé personnel, Christopher  Ross; dans le but de relancer les négociations  entre les deux parties  et  l’espoir de parvenir  à «une solution juste et durable» au conflit perdurant.

M.Ross, maîtrisant  la langue arabe n’est pas étranger à la région pour y avoir exercé sa profession de diplomate. Il s’est rendu à Rabat, Tindouf et Alger. Rabat lui interdit désormais  tout accès à Layoune.

A Tindouf où vivaient  165 .000  réfugiés sahraouis,100.000 selon une autre estimation  et 40.000 selon le  Maroc dont le souverain  vient de gratifier d'un "qu'ils n'ont à vouloir qu'à eux  mêmes",  l’émissaire onusien  a eu  toujours des discussions «franches et profondes»  avec Mohamed Adelaziz, le président de la RASD» .

«Francs et fructueux» furent aussi, les entretiens avec Abdelaziz Bouteflika, le président Algérien. Même tonalité du coté marocain.

Cependant la  visite dans la région s’était  prolongée  par  des déplacements à Madrid, Paris et Washington, dans la quête de "la contribution " de ces capitales pour l’accomplissement de sa mission. Les trois capitales occidentales sont acquises – avec des nuances diplomatiques- à la thèse marocaine.

Il reste à  craindre que cette dernière   risque de ne pas aboutir comme celles qui l’ont précédée, si M.Ross n’est  pas porteur de solutions  alternatives et concrètes  au conflit (autonomie transitoire,  projet de fédération ou de confédération, découpage territorial…) . Sinon, retour à la case départ ?

Dans  sa  première déclaration, le gouvernement sahraoui a ajouté, comme par prémonition  que «Cette région (Le Maghreb) ne connaîtra ni la paix ni stabilité  tant que durera l’agression et tant que notre peuple n’aura pas parachevé  la libération de son territoire national». On y est depuis des lustres .

De quoi brouiller  davantage  les cartes des  peuples   du Maghreb. Perdants, ceux –ci  s’accommodent paradoxalement  de leur unité géo- culturelle et de la désunion politique de leur Etat respectif. A chacun son champ lexical, Kissinger. Et rebelote du ballet  diplomatique. Les  générations de réfugiés sahraouis peuvent –ils encore  attendre...

Habib Ofakhri