News - 02.08.2015

Mélange explosif ou pétard mouillé : En niqab au Capes de physique !

Mélange explosif ou pétard mouillé : En  niqab au Capes de physique !

Par Mohamed Larbi Bouguerra. C’est un spectacle qui fait chaud au cœur que la télévision nationale nous a servi  jeudi  soir à 20 h : des citoyens et des ministres s’activant à l’entretien et l’embellissement du collège Alaoui à Tunis et dans une école primaire du Sahel.

S’occuper ainsi des établissements d’enseignement est particulièrement utile car comment s’adonner à l’étude - et surtout y prendre plaisir - quand votre école est laide, sans verdure, sans toilettes, sans poubelles, sans une cour de récréation protégée et sans eau ? 

Reste l’élément principal : l’enseignant.

Sur ce plan, il y a quelques jours , on a appris que, lors des épreuves du CAPES à l’Ariana, une candidate s’est présentée en niqab. Une physicienne, qui plus est semble-t-il ! 

Nous avons toujours été habitués à voir nos enseignants en blouse blanche !  Voilà que maintenant certains, téléguidés par des mollahs antédiluviens, veulent introduire le niqab dans nos écoles! Nous ne sommes pas loin, dans ce cas de figure, des oukases rétrogrades de Boko Haram qui interdisent en fait le livre (Book devenu Boko dans le parler local nigérian) qui donne des idées et libère les esprits car « le chercheur s’interroge sans cesse, le croyant ne doute jamais ». (Jean-Claude Carrière, « Croyance », Editions Odile Jacob, Paris, 2015, p. 73).

Comment communiquer avec ses élèves le visage couvert ? Comment faire devant une classe des expériences et des démonstrations de physique ou de chimie dans cet accoutrement ? Ne risque-t-on pas de provoquer des accidents, des incendies ? Ces deux disciplines n’ont rien de livresque et sans exercices expérimentaux, elles perdent beaucoup de leur intérêt. Ce qui remet en mémoire le grand apport du physicien et astronome italien Galilée (1564- 1642): à son époque, on enseignait la physique d’après les livres d’Aristote… lesquels charriaient depuis l’Antiquité des bêtises concernant la chute des corps. Etant professeur à l’Université de Pise, Galilée s’est livré à quelques expériences du haut de la célèbre Tour Penchée de la ville. Celles-ci prouvèrent que le grand Aristote (385- 322 avant J.C.) avait tort. Galilée* inaugura ainsi le début de la connaissance mathématique exacte des mouvements des corps. « Et ce fut lui qui fit le plus pour montrer, de façon spectaculaire et irréfutable, combien il est facile de répéter une assertion de génération en génération, alors que la moindre tentative de vérification en aurait montré la fausseté. Pendant les deux mille ans qui séparent Aristote de Galilée, nul n’avait pensé à vérifier si les  lois  sur la chute des corps étaient bien ce qu’Aristote dit qu’elles sont. Il peut nous paraître naturel de vérifier de telles assertions ; mais, à l’époque de Galilée, il fallait du génie ».  (Bertrand Russell, « Science et religion », Gallimard-Idées NRF, Paris, 1971, p. 27). Paracelse (1493- 1541) aussi milita pour l’expérimentation en médecine et en thérapeutique. Il  brûla en place publique à Bâle les livres de Galien, de Celse (savant romain) et d’Ibn Sina. 

Comment un enseignant jouissant de toutes ses facultés peut-il prétendre enseigner ces deux disciplines ainsi vêtu ? A moins que cela ne soit en service commandé ! Pour impressionner les jeunes et introduire des concepts n’ayant rien à voir avec la Science dans notre école - école que la Constitution exige et impose comme non confessionnelle.

Depuis longtemps, les salafistes, dans notre pays, ont fait du combat contre le Savoir, la Science et l’Intelligence en général, une de leurs activités majeures : ils ont ainsi essayé d’incendier le département des Sciences Naturelles à la Faculté des Sciences de Tunis coupable, à leurs yeux, d’enseigner les concepts évolutionnistes, suivant en cela des Américains** et des Turcs** *rétrogrades. Et puis, il y a eu la saga lamentable des niqabées de la Manouba, les troubles  dans les universités de Sousse et de Kairouan en 2011 et la campagne contre les safirates à laquelle  le premier magistrat du pays n’a pas hésité à mettre son grain de sel. Ce faisant, les salafistes essaient d’occulter les vraies difficultés du pays : terrorisme aveugle, corruption, sécurité, chômage de masse, écoles en déshérence… et de leurrer une jeunesse sans repères. S’interrogeant sur la signification d’Ennahda, le journaliste égyptien Salama Moussa (1887-1958) répondait : « L’adoption des valeurs anciennes ? Ce que je crains de pire, c’est de remporter la victoire sur les colonisateurs et les chassions, que nous triomphions des exploiteurs et les soumettions, puis soyons incapables d’infliger la défaite au Moyen-Age qui caractérise notre vie et revenions au mot d’ordre : « Retour aux Anciens ». 

La société tunisienne doit exprimer fortement son rejet de ces tentatives de dévoiement de la mission sacrée de l’école. Dès les années 1930, les manifestants destouriens réclamaient,  outre l’indépendance,  l’accès à l’école pour leurs enfants, faisant leur l’expression du révolutionnaire français Georges Danton : « Après le pain, l’éducation est le premier besoin du peuple ». 

Aujourd’hui, il nous faut jeter aux orties le pétard mouillé de cette pseudo-physicienne niqabée et de ses commanditaires qui veulent faire exploser l’école publique tunisienne. 

Pour lutter contre ces fanatiques, Messieurs du gouvernement, pensez à doter chaque école d’un petit laboratoire…pour utiliser le microscope, les produits chimiques et pour disséquer un poisson ! Et éveiller ainsi des vocations scientifiques !

Mohamed Larbi Bouguerra

 

* Galilée a été condamné, emprisonné et empêché de vivre avec sa famille par l’Eglise Catholique pour ses apports à l’astronomie qui contredisaient la Bible et confirmaient Copernic. Il fut le premier à utiliser une lunette astronomique pour observer les montagnes de la lune et découvrit les satellites de Jupiter. Sa condamnation n’a été levée qu’en 1992 par le pape Jean-Paul II !

**Le 21 juillet 1925, un enseignant américain John T. Scopes a été condamné à Dayton (Tennessee) pour « violation de la loi sur l’enseignement de la théorie de Darwin sur l’évolution ». Le jugement devait cependant être cassé plus tard. Mais les « newborns » continuent à sévir aujourd’hui aux Etats Unis.

*** En  2007, un très grand nombre d’enseignants de biologie, d’anthropologie et de géologie  des universités américaines et françaises ont reçu en cadeau un ouvrage de 850 pages qu'ils n'avaient pas demandé : l'Atlas de la Création, écrit par un  créationniste turc , Adnan Oktar sous le pseudonyme d'Harun Yahya.