News - 06.07.2015

La subversion de Roger Mucchielli

La subversion de Roger Mucchielli

Une « technique d’affaiblissement du pouvoir et de démoralisation des citoyens » plus insidieuse que séditieuse en raison d’une asymétrie des rapports de force, elle agit sur l’opinion par effet de pourrissement. Ses agents noyauteurs pratiquent l’entrisme dans les groupes-clés, l’observation-participation, l’influence. Son efficacité repose sur trois principes manipulatoires concomitants : paraître de bonne foi, parler au nom du bon sens, en appeler toujours à la justice et à la liberté. Une guerre de la com.’, ni plus ni moins. Son support privilégié est donc bien entendu la propagande noire, qui cherche à tromper l’adversaire sur l’origine ou l’appartenance de l’action de propagande. Les mass media servent de tremplin au triple objectif de la subversion : démoraliser la nation visée et les groupes qui la composent ; discréditer l’autorité, ses défenseurs, ses fonctionnaires, ses notables ; neutraliser les masses pour empêcher toute intervention spontanée générale en faveur de l’ordre établi, au moment choisi pour la prise non violente du pouvoir par une petite minorité. Par une «panique muette », les membres de la collectivité sont ainsi isolés et désolidarisés : Mucchielli nomme cela la neutralisation active.

La subversion met en œuvre diverses méthodes de pression au changement, de persuasion et de conversion des esprits. La propagande de recrutement et d’expression se double d’une propagande d’endoctrinement ou d’intégration, destinée à l’uniformisation idéologique. L’agitation, forme moderne de la propagande, a étendu le champ d’action de la subversion, avec l’organisation trinitaire parti / chef / doctrine d’exploitation des mécontentements. L’objectif est de détacher du pouvoir tous ceux qui lui resteraient loyaux…

La révolution, expose Mucchielli, se fait à présent avec l’accord de un pour mille (rien de bien neuf en fait, à regarder 1789, 1917 ou encore la FED). La minorité active utilise les nouveaux moyens de communication pour créer chez le récepteur apathique la réalité qui sied à la subversion. L’ère de l’image permet d’en appeler à ses tripes et à son irrationalité. Le réel importe peu. Par la manipulation du langage, les subversifs utilisent les mots à forte charge émotionnelle, car les mythes, note Mucchielli, sont davantage mobilisateurs que les réalités objectives. D’où l’invocation fictive – mais galvanisante – du «peuple», l’invention de la notion de «majorité silencieuse» pour s’auto-légitimer, etc., en se proclamant bien entendu (à l’époque) socialiste – comme on se dirait aujourd’hui démocrate-humaniste-partisan des droits de l’homme contre les forces réactionnaires des heures les plus sombres. Ce dernier point a son utilité : parer de «l’auréole de la justice sociale et de l’authenticité des idéaux révolutionnaires.» Et l’avantage de pouvoir cataloguer tout individu loyal comme réactionnaire pour le pousser à se détacher du pouvoir.

Source : notes sur œuvres, scriptoblog.com, novembre 2011

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