News - 11.06.2015

Grèves, revendications, Daech et la Libye : Les réponses-clefs de Caïd Essebsi

Grèves, revendications, Daech et la Libye : Les réponses-clefs de Caïd Essebsi

« Ce qui s’est passé dans le Sud tunisien n’est pas innocent. Ceux qui y sont derrière, on les connaît, ce sont ceux qui n’ont pas accepté le verdict des urnes et gardent espoir de revenir au pouvoir ! » Le président Béji Caïd Essebsi, multipliera ce jeudi matin les messages clefs qu’il tient à adresser à la classe politique et à tous les Tunisiens. 

En orgues de Staline, les propos s’enchaînent. « Ils veulent disloquer l’Etat, ils n’y parviendront pas », « la partition de la Libye sera une catastrophe, la Tunisie sera la première exposée à ses conséquences ». Les revendications sociales, sont compréhensibles. Mais, nous ne pouvons pas y répondre aujourd’hui. La situation économique est désastreuse. Il faut des solutions politiques. La réconciliation nationale est alors impérative. Certains font des poursuites en justice un fonds de commerce. Si le vocable de réconciliation ne leur convient pas, qu’ils lui trouvent une autre appellation. Nous devons rattraper le déficit d’Etat en édifiant un état de droit, moderne, du XXIème siècle. Certains n’ont pas compris, ou ne veulent pas comprendre l’importance du soutien obtenu à Washington et auprès du G7 ».

Dans l’avion qui le ramenait lundi soir du Sommet du G7 en Allemagne, certains de ses conseillers avaient discrètement sondé le président Caïd Essebsi pour savoir s’il envisageait de s’adresser à la nation. Entretetant le flou artistique comme à son habitude, il leur a glissé : « C’est indispensable. Il faut faire de la pédagogie, expliquer ! ». Sans leur donner plus de détails sur la date et le lieu. L’opportunité, il l’a saisira jeudi en acceptant de présider l’ouverture du colloque sur « La prospective et la planification stratégique en Tunisie ». Organisé par l’Institut tunisien d’Etudes stratégiques (ITES), relevant de la Présidence de la République  - et que supervise pour le moment Mohsen Marzouk - en collaboration avec le Centre Al Kawakbi, il regroupe des représentants de partis et organisations nationales, experts, universitaires, hauts cadres et anciens ministres « technocrates » dans différents gouvernements, ainsi que des ambassadeurs. 

Rebondissant sur l’occasion, Béji Caïd Essebsi partira de la nécessité d’engager une  réflexion prospective pour éclairer les décisionnaires et les Tunisiens, tout en prendre en compte les urgences du quotidien. Ces urgences, soulignera-t-il, sont d'ordre sécuritaire, économique et social. L’élan est ainsi pris pour énoncer ses messages clefs et les développer. Verbatim. 

Modèle et contre-modèle

La transition réussie en Tunisie constitue un modèle pour de nombreux pays et un contre-modèle pour certains autres. Ne croyez pas qu’ils sont tous contents. Ce n’est pas facile à gérer.
Légitimité, nécessaire union nationale
Nous avons été élus par le peuple. En toute liberté, les Tunisiens ont choisi un président de la République et leurs représentants à l’Assemblée. Le peuple est souverain dans ses choix et nul ne saurait s’y opposer. »
Ce qui est projeté, c’est la dislocation de l’Etat. Mais, les ennemis de la démocratie et de l’union nationale n’y parviendront pas.
La guerre contre le terrorisme a ses exigences politiques et populaires : c’est le rassemblement en masses indéfectibles autour de l’Etat.  

Un Etat de droit

Nous avons un déficit d’Etat qu’il faut rattraper au plus vite, en consolidant un Etat de droit, moderne, ancré dans le XXIème siècle. Pas de démocratie sans un Etat de droit qu’on ne peut pas édifier aujourd’hui avec d’anciens modèles et d’anciens cadres. C’est aux nouvelles générations de le bâtir ».

Social : des revendications compréhensibles, mais...

« Je comprends les revendications sociales et les demandes d’augmentation de salaires. Ces travailleurs ont raison. Le coût de la vie est élevé. Mais, je leur dis : autant je vous donne raison, autant je vous dis que ce n’est pas le moment. Ils doivent y surseoir. Quand ils se mettent à comparer, ce n’est pas entre tel ou tel niveau de salaire, mais entre celui qui perçoit un salaire et celui qui en est privé et trime pour se nourrir ».

Economie: la dégradation continue, à moins que...

« La situation économique est désastreuse, encore plus chaque jour. Nous devons mettre les points sur les i. La Tunisie ne cesse d’accumuler les mauvais scores, accentués par des baisses continues de la notation souveraine. Il faut des solutions politiques et j’y ai bien réfléchi. 

L’impérative réconciliation nationale

C’est ainsi que j’ai abouti à l’impérative réconciliation nationale. On ne peut poursuivre aujourd’hui quelqu’un pour avoir appartenu à tel ou tel parti. S’il a commis des infractions, c’est à la justice de le juger. Je n’innocente personne, mais une sentence collective inique est inacceptable. Sans condamnation par la justice, chacun doit reprendre sa place dans la société. Il en va de même pour les chefs d’entreprise. Il est grand temps de les affranchir pour qu’ils retrouvent leur esprit d’initiative et entreprennent de nouveaux projets. Certains font de la poursuite en justice d’hommes d’affaires et ancien hauts cadres, un fonds de commerce et récusent la réconciliation nationale. Si le vocable les gêne, rien n’empêche qu’on le change et lui en  trouve une autre appellation. Moi, je lance l’initiative, à vous de lui trouver les formes appropriées ».

Libye: une grande catastrophe annoncée

« Ce qui se passe en Libye est très grave. Daech s’étend en métastases, prenant en contrôle des zones entières. La partition de la Libye sera une grande catastrophe. Pour la Libye, d’abord, mais aussi pour la Tunisie. Certains essayent d’y intervenir, mais tous ont leurs propres agendas. La Tunisie sera la première exposée à tous les risques qui menacent la Libye ».
 
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