News - 17.05.2014

Washington : les retrouvailles entre Ben Jaafar et une grande amie de la Tunisie

A l’occasion de sa visite à Washington D.C, Mustapha Ben Jaafar était invité par l'Université Johns Hopkins (SAIS) et le Centre pour les Relations Transatlantiques pour donner une conférence sur le succès du processus constitutionnel tunisien et les futurs enjeux de la transition démocratique.

En dehors de son aspect formel et des messages qui ont déjà été relayés par la presse,  la visite du président de l'ANC à l'université Hopkins a été marquée par les retrouvailles entre Mustapha Ben Jaafar et Janean Mann, ancienne conseillère politique à l'ambassade des États-Unis à Tunis.

En effet, alors que Mustapha Ben Jaafar s’apprêtait à quitter la conférence, une dame s'est  approchée de lui pour se rappeler à son bon souvenir et aux années qu’elle avait passées en Tunisie.  Bien entendu, M. Ben Jaafar a tout de suite reconnu son interlocutrice, heureux de retrouver après tant d’années une grande amie de la Tunisie qui n'a jamais cessé, dans l’ombre ou publiquement,  de soutenir le combat des militants et des militantes tunisiens pour la liberté et la démocratie.

Janean Mann a été conseillère politique à l'ambassade des États-Unis de 1989 à 1992. Sa mission était multiple. D'abord, rapporter et analyser les développements politiques en Tunisie pour les décideurs au Département d'Etat  ; ensuite encourager le soutien des responsables tunisiens sur un éventail de questions et de préoccupations importantes pour les États-Unis aussi bien sur le plan bilatéral que multilatéral. Son bureau a également été fortement impliqué dans les efforts visant à promouvoir la démocratie en Tunisie et à apporter un soutien pour la protection des droits de l'homme.

Janean Mann nous a fait part de sa joie pour ces retrouvailles et souligné l'excellent souvenir qu'elle garde de son expérience en Tunisie. «J'ai été vraiment ravie de revoir Dr Ben Jaafar et d'écouter son évaluation des progrès réalisés en Tunisie. J'ai suivi de près les développements en Tunisie à travers les médias et par mes amis tunisiens, et je suis heureuse de voir tous les progrès accomplis, même s’il reste encore un long chemin à parcourir. Les États-Unis font évoluer leur démocratie depuis plus de 200 ans et nous avons encore des progrès à faire. Le changement est un processus difficile et prend beaucoup de temps.

«Ce fut un véritable honneur et un plaisir por moi de retrouver le Dr Ben Jaafar et de de l’entendre égréner, les  progrès réalisés à ce jour. Il m'a aussi remis en mémoire le climat  lourd de la répression qui pesait sur la Tunisie pendant la période où j’y étais, et le courage de tant de gens comme Dr Ben Jaafar qui sont responsables des changements que nous avons vus. Grâce à Mustapha Ben Jaafar, j'ai eu une meilleure compréhension du peuple tunisien et j’ai été en mesure d'aider le Département d'État à mieux apprécier le profond désir de changement des Tunisiens».
 
«J'ai eu la chance d'avoir l'occasion de rencontrer de nombreux dirigeants de l'opposition et leaders des  droits de l'homme,  dont Mustapha Ben Jaafar, et développé de solides liens d'amitié avec eux car on avait de nombreux objectifs en commun. Nous avons beaucoup écouté ces dirigeants et leaders sur les manières dont lesquelles les États-Unis pouvaient soutenir et encourager la démocratie et les droits de l'homme en Tunisie.

«En même temps, j’étais souvent très frustré quand j’étais en Tunisie. J'ai rencontré beaucoup d'hommes et de femmes travailleurs, dévoués et courageux qui voulaient vraiment le changement dans le pays et qui essayaient de concrétiser ces changements. Malheureusement, ils étaient continuellement bloqués et parfois même menacés physiquement par le régime de Ben Ali. Je me souviens par exemple de la voiture de Mustapha Ben Jaafar qui a été détruite et comment il a été démis de ses fonctions. D’autres militants que nous avons également appuyés dans leurs efforts pour promouvoir les droits de l'homme, ont été constamment harcelés. Je me souviens d’une activiste pour les droits de la femme qui a dû attendre plusieurs mois juste pour que Ben Ali daigne approuver une affiche qu'elle voulait mettre en place pour informer les femmes sur l’endroit où elles pouvaient trouver de l'aide si elles étaient victimes de violence.

«En tant qu'ancienne journaliste, j’étais consterné par l'absence totale de liberté de la presse en Tunisie et nous avons essayé à plusieurs reprises d’encourager le gouvernement à tolérer cette liberté. Absolument tout dans les médias de l'époque devait être approuvé par le ministère de l'Information avant toute publication. Chaque émission d’information à la télévision devait commencer avec ces images de Ben Ali gesticulant mais sans que sa voix ne soit jamais entendue. Une autre voix off était là pour diffuser l’information qui était autorisée par le gouvernement à être diffusée.

«Suite à l’incitation des États-Unis, le gouvernement Tunisien avait enfin désigné des personnes pour surveiller les droits de l'homme et recommander des améliorations, mais ces personnes se sont très vite aperçues qu'elles avaient peu d’influence et d’opportunités pour modifier les actions du gouvernement de Ben Ali.

« Au cours de cette période, nous avons également organisé des visites et des séminaires par des juges et autres corps de métier pour favoriser l'amélioration des pratiques en matière de droits de l’homme en Tunisie. Lors de l'une de ces conférences de trois jours, nous avons  entre autres invité les juges et les procureurs fédéraux américains pour parler des moyens d'obtenir des informations des suspects sans avoir à recourir à la torture. A cette époque, il y avait une répression contre les "islamistes " et des individus ont été torturés et parfois tués.

Au cours de mes trois années en Tunisie j'ai voyagé partout dans le pays, couvrant près de 50.000 km, et rencontré des Tunisiens de tous les horizons. Ma capacité à parler l'arabe a rendu les choses beaucoup plus faciles pour moi. J'ai trouvé les Tunisiens amicaux, ouverts, intelligents. La quasi-totalité, sauf un très petit nombre entourant Ben Ali, voulait le changement.»