News - 05.11.2013

Suspension du Dialogue national : les causes d'un blocage

Les prolongations successives n’ont pas réussi à parvenir à un consensus sur le prochain chef de gouvernement. Tard dans la soirée du lundi, Houcine Abbassi, secrétaire général de l’UGTT, ne cachait pas sa forte amertume de l'échec des pourparlers et de la suspension du Dialogue national. « Nous aurions tant aimé annoncer à notre peuple, dit-il, en cette veille du nouvel an de l’hégire, la bonne nouvelle d’un accord, mais tous nos efforts se sont révélés vains. Dès le début, nous nous attendions à des tentatives de parasitage du Dialogue national et nous nous sommes employés à barrer la route à ceux qui veulent le torpiller ».

Abbassi mentionne d’ailleurs la tentative des élus de la majorité à l’ANC de réviser en leur faveur absolue le règlement intérieur de l’Assemblée. « Nous ne croyons pas à l’échec et nous œuvrerons à aplanir les difficultés par le dialogue et la concertation » a-t-il répété. Affirmant que le Quartet initiateur du Dialogue national s’emploiera à reprendre les concertations en vue de bâtir une nouvelle plateforme favorable à la reprise des pourparlers, Abbassi a souligné qu’il n’hésitera pas le cas échéant à dénoncer ceux qui compromettent le Dialogue. « Nous prendrons aussi notre responsabilité, a-t-il ajouté, pour proposer des personnalités capables de diriger le gouvernement ».

Marzouki récuse Zebidi

Toute la journée du lundi a été épuisée dans de longs débats avec d’un côté Ennhadha et son allié Ettakatol pour imposer Ahmed Mestiri et de l’autre, une bonne partie de l’opposition, tenant à Mohamed Ennaceur. Un troisième nom a été avancé, celui de l’ancien ministre de la Santé et de la Défense, Abdelkérim Zebidi. Rached Ghannouchi dira que celui-ci s’est excusé de ne pouvoir accepter cette mission et a rappelé que les difficultés qu’il avait avec le président Marzouki.

« Mais que fait le président de la République dans cette affaire et pourquoi veut-il interférer à présent dans le Dialogue national ? » s’est emporté Hamma Hammami. « Son parti, le CPR, a refusé d’y participer et voilà qu’il essaye d’intervenir d’une autre manière, a-t-il ajouté.

Chebbi propose un Quartet à la Kasbah

Par souci de compromis, Ahmed Néjib Chebbi a proposé de retenir les quatre nominés finalistes en confiant à Ahmed Mestiri la présidence du gouvernement, désignant Mohamed Ennaceur et Mustapha Kamel Nabli en tant que vice-présidents et confiant à Jalloul Ayed un grand ministère. Proposition rejetée. Hamma Hammami a d’abord précisé qu’Ahmed Mestiri avait déclaré en recevant une délégation d’Al Massar, qu’il refuserait qu’on lui impose des personnalités à adjoindre dans le gouvernement qu’il serait appelé à former. « Mais, aussi, il est mentionné sur la feuille de la route qu’il s’agit de choisir un chef de gouvernement et nous devons nous y tenir. Si on commence à désigner des membres de ce gouvernement, autant décider de l’ensemble des ministres ».

Face à cet imbrolio, Rached Ghannouchi est resté imperturbable : « Nous n’avons pas d’alternative à Ahmed Mestiri  et nous ne voyons pas de raison de le refuser sauf à faire de l’opposition pour l’opposition ou la recherche d’une personnalité moins indépendante», a-t-il affirmé. Ennhadha, a-t-il ajouté, a accepté de transmettre le pouvoir non pas par des élections ou un complot, mais à la faveur des concertations et du consensus, et ce dans le but de permettre l’organisation d’élections libres et transparentes que seront à l’abri de toute contestation. En passant de la légitimité électorale à celle du consensus, et passant le pouvoir à un groupe séculier, le mouvement islamique montre sa bonne volonté pour faire prévaloir le consensus. »

Houcine Abbassi, certes déçu par ce blocage, garde cependant espoir. Le Quartet ne baissera pas les bras. Si aucune date précise n’a été fixée pour la reprise du Dialogue, l’aggravation de la crise politique sur fond de menaces sécuritaires et d’enlisement économique et financier, souligne davantage l’urgence d’une sortie de crise.