News - 16.05.2013

Enfin, l'initiative de l'UGTT sur les rails, mais que de temps perdu

« Il est inacceptable qu’une « nikabée » soit empêchée de passer ses examens universitaires ». Moncef Marzouki  n’a pas terminé sa phrase que déjà sa voix est couverte  par les cris désapprobateurs d’une partie de l’assistance (essentiellement, des représentants de la société) qui a préféré quitter la salle. Cela s’est passé ce jeudi 16 mai à l’ouverture de la deuxième manche du Dialogue national initié par l’UGTT. Une conférence qui était censée rapprocher les vues plutôt que discuter de sujets qui divisent. Quelle mouche a donc piqué le président de la république pour remuer le couteau dans la plaie, alors que rien ne le justifiait, ni le cadre de la réunion, ni la conjoncture, comme s’il n’y avait pas suffisamment des sujets de discorde dans le pays. On aurait voulu faire avorter ce dialogue, on ne s'y serait pas pris autrement d'autant plus que l'affaire a été tranchée par les 194 Conseils scientifiques.

Ce n’est pas le seul impair commis par notre président. On se souvient du tollé provoqué par ses attaques contre ceux qui «s‘en prennent à Qatar». Voilà qu’il récidive en dénonçant  ceux qui « dénigrent » sa personne  et l’institution de la présidence de la république : « c’est inacceptable,  s'est-il exclamé et ceux qui s’en sont rendus coupables devront  rendre des comptes car c'est une atteinte au prestige des institutions de l’Etat qu'il incombe à tous de respecter».

Un  autre couac a marqué cette journée. Dans son intervention, le secrétaire général des patriotes démocrates, Ziad Lakhdar a dit que son parti a accepté de  venir dialoguer avec la partie qui porte une responsabilité morale et politique dans l'assassinat de Chokri Belaïd parce que «c'est dans l'intérêt du pays», provoquant le départ de la délégation d'Ennahdha. Celle-ci n'est revenue dans la salle qu'après la fin de l'intervention de M. Lakhdar.

Malgré tout, le mérite de l'UGTT est grand d'avoir réussi son pari. Mais que de temps perdu. Il aura fallu, l'agression commise par la Ligue de «Protection» de la Révolution contre le siège de l'UGTT, le 4 décembre 2012 et la  grave crise qui s'est ensuivie, l'assassinat de Chokri Belaïd, le 6 février 2013, la démission du gouvernement Jebali et ses tentatives avortées de former un cabinet de technocrates, puis la désignation d'Ali Larayedh, enfin les évènements du Chaambi pour que la troika, Ennahdha en tête, accepte de dialoguer avec les autres partis sans aucune exclusive. Que d’occasions ratés depuis ce 13 octobre 2012, lorsque l’initiative lancée par la centrale ouvrière a été étouffée dans l’œuf par Ennahdha est son mauvais génie, le CPR, arguant de la présence de Nidaa Tounès, alors que la principale raison était le refus d'Ennadha de voir l'UGTT jouer le rôle d'arbitre entre les partis. Huit mois se sont écoulés. Mais il n'est jamais trop tard pour bien faire. Espérons surtout que les différentes parties soient animées des meilleures intentions du monde et qu'on ne cherche pas seulement à gagner du temps, car «les seuls accords qui comptent sont conclus entre les arrières-pensées».

Mustapha

 

 

 

 

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