Blogs - 02.04.2009

"Voyez comment les Tunisiens s'y sont pris, puis suivez les"

Dans le Panthéon des grands hommes africains, l’ancien président-poète sénégalais, Léopold Sédar Senghor figure en bonne place. Chantre de la négritude avec Aimé Césaire; héraut de la francophonie aux côtés de Bourguiba et du Nigérien, Hamani Diori, il était aussi un grand humaniste qui s’était fait un point d’honneur de placer l’homme au centre de ses préoccupations qu’elles aient été  politiques ou littéraires. Ce grand africain était un ami de la Tunisie qu’il visitait régulièrement dans les années 70 et au début des années 80 du siècle dernier- avant de se retirer de la vie politique-pour y rencontrer son ami, Bourguiba qu’il admirait beaucoup, mais aussi parce que « chaque visite, disait-il, est pour moi un pèlerinage aux sources de l’africanité », faisant allusion à l’Africa de l’Antiquité.

Mais pas seulement. Senghor était, également, séduit par le modèle de développement tunisien qu’il essayait d'adapter à son pays. A l’une de ses visites en Tunisie, il s’était laissé aller à une confidence : « quand un de mes ministres me faisait part des difficultés qu’il trouvait à traiter un problème épineux, je lui répondais : voyez comment les Tunisiens s’y sont pris  puis, suivez les. »

L’exemple du président sénégalais n’est pas isolé. En Afrique Occidentale et au Maghreb, notamment, le capital  sympathie dont bénéficie notre pays est immense. Le mot « tunisien » y est, souvent, synonyme d’excellence, d’intelligence, d’imagination et de grande capacité d'anticipation. Bien exploité, il pourrait nous procurer beaucoup de satisfactions.

Cela est bon à savoir par les temps qui courent parce que nous avons une propension à l’autocritique qui confine, parfois à l’autoflagellation. Cela ne peut que nous donner davantage de confiance en nos moyens. La plupart des nos hommes d’affaires sont encore jeunes, ils n’ont pas connu le choc pétrolier de 74, ni la crise économique et sociale de 85-86 en Tunisie. Ils doivent savoir que si la mondialisation a du bon, la facilitation des échanges, elle  a, aussi, ses effets pervers, une interdépendance plus accentuée des pays qui peut favoriser la propagation des crises.

La vie d’un homme d’affaires ne peut pas être un long fleuve tranquille. Les crises sont dans l’ordre naturel des choses. Elles surgissent de manière cyclique, « lorsque l’ancien meurt et que le nouveau hésite à naître », comme disait Gramsci. Bien qu’elle n’ait fait que nous effleurer, pour le moment, la crise peut constituer pour nous un véritable challenge. Parce qu’elle peut être le révélateur de nos propres travers, elle nous incite à nous remettre en question, à explorer de nouveaux marchés, à comprimer nos coûts, à améliorer notre productivité, bref, à nous attaquer à des dossiers auxquels on n’osait, auparavant, y toucher par pusillanimité, par paresse intellectuelle ou parce qu’on pensait qu’il n’y a pas de problème qu’une absence prolongée de solution ne finisse par résoudre. Dans notre sous-région, nous avons toujours été des précurseurs. La crise offre à la « petite » Tunisie l’occasion de s’illustrer. Gageons qu’elle saura se montrer ce qu’elle n’a jamais cessé d’être :  intelligente, audacieuse, imaginative, en un mot exemplaire.

Hedi