Blogs - 11.02.2009

L'humour tunisien en danger

FellegAu début des années 90, le public tunisien découvrait un jeune humoriste algérien  qui, fuyant les intégristes, avait quitté sa Kabylie natale pour venir s’installer à Tunis.

Chaque soir, il faisait salle comble à El téatro, dont il avait fait son fief pendant quelques années avant de « monter» à Paris où ses sketchs à l’humour aussi décapant  que caustique lui ont permis de conquérir un large public et pas seulement maghrébin.

Fellag, c’est de lui qu’il s’agit, est certainement, aujourd’hui, le plus grand humoriste maghrébin avec Jamel Dabbouze même s’il existe une différence notoire entre les deux humoristes: le premier  apportant un soin particulier à ses textes alors que le second est le champion incontesté et incontestable de l’improvisation tant au plan maghrébin qu'à celui du monde francophone.

Lamine NahdiDe quoi donner des complexes aux Tunisiens qui, depuis la disparition de Salah Khémissi  (encore qu’il ne s’agisse pas tant d’un humoriste que d’un chansonnier), attendent   celui  ou celle qui les ferait rire de leurs travers. Apparemment, ce n’est pas pour bientôt. 

Quand on écoute, aujourd'hui, nos humoristes ou ce qui en tient lieu, on se dit que tous les désespoirs sont permis. Vulgaires, superficiels, ils sont dans leur majorité  à des années-lumière des Fellag, Debbouze et compagnie .Ils en sont encore à imiter l’accent du monde paysan -dont ils sont pourtant issus- et celui des «beldis». Une vieille recette usée jusqu’à la corde. Une de mes connaissances, originaire de la région de Medjez El Bab  me confiait récemment  que sa fillette était venue en pleurs  lui demander un jour: « pourquoi notre accent fait-il rire à ce point les gens ?» après avoir vu, précisément, un sketch de ce genre à la télévision. 

Jemel DabouzeManquant totalement d’imagination, leurs thèmes  de prédilection sont éculés. Généralement, en fait d’humour on a  droit à quelques pitreries et des plaisanteries de mauvais goût. 

Certes, il y a quelques exceptions, notamment le très doué Lamine Nahdi mais il n’a produit, en quatorze ans, que deux sketchs écrits par Moncef Dhouib. Assurément, le public tunisien mérite mieux. Cette situation est d’autant moins compréhensible que les Tunisiens est un peuple qui ne passe pas pour être particulièrement austère  qui par dessus tout  aime rire,  affectionne les bons mots. L’accueil réservé aux humoristes français lorsqu’ils se produisent à Tunis le prouve à l’abondance.

Vivement  le jour où un jeune émergera, enfin, pour défendre l'honneur de l'humour tunisien trop longtemps bafoué.

 

 

 

 

Hedi